Thuringe : La gauche allemande se redécouvre

Bodo Ramelow a été élu premier Ministre-Président issu des «Die Linke» d'un Land allemand.

Bodo Ramelow est le premier Ministre-Président issu des "Die Linken". Une petite révolution ? Foto: Olaf Kosinsky / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0de

(KL) – L’élection de Bodo Ramelow comme Ministre-Président de la Thuringe, à la tête d’une coalition «Die Linke – SPD – Verts», marque un tournant dans la politique allemande. Pour la première fois, ces trois partis ont eu le courage de faire valoir une courte majorité pour prendre le pouvoir. Ce qui pourrait avoir un effet de signal au niveau de politique nationale. Même si les ténors de la politique nationale tentent de minimiser ce qui se passe en Thuringe.

Le parti de l’extrême-gauche allemand, traditionnellement fort dans les Länder de l’ex-RDA, dirigera pour la première fois un Land allemand. Suite aux élections début novembre, Die Linke, issu du scrutin comme le parti ayant recueilli le plus grand nombre de votes, a réussi à convaincre le SPD et les Verts de ne pas tomber dans la facilité en établissant une nouvelle «Grande Coalition» (CDU-SPD-Verts), mais d’opter pour une coalition qui aurait été possible l’année dernière également au niveau fédéral. Ou dans le Land de la Hesse, où SPD et Verts avaient permis à la CDU de garder le pouvoir, en refusant le dialogue avec «Die Linke».

Les tentatives berlinoises d’empêcher la constitution de cette coalition rouge-rouge-verte, ménées surtout par le Président allemand Joachim Gauck, étaient donc vaines. Mais il reste la question si «Die Linke» saura mener une politique «de gauche» ambitieuse ou si le parti devra accepter des compromis qui l’obligeront de trahir ses principes.

Vendredi, 5 décembre, était donc une date à marquer en rouge sur le calendrier. «Die Linke», mais surtout le SPD et les Verts ont fait preuve de courage, profitant enfin d’une très courte majorité (d’une seule voix) pour éjecter la CDU du gouvernement régional. Dans l’Allemagne fédérale où les Länder disposent de bien plus de compétences que les régions françaises, il s’agit d’un signal fort – une autre politique que l’éternelle et fort ennuyeuse alternance SPDVERTSCDUFDP devient donc possible. Et Bodo Ramelow, le premier Ministre-Président issu des «Die Linke» pourrait devenir celui qui pourra montrer aux Allemands qu’un autre modèle politique, plus social, ne signifie pas la fin de la civilisation occidentale.

A Berlin, la CDU doit actuellement transpirer, car ce qui se passe en Thuringe, a le potentiel de servir comme exemple pour d’autres Länder, mais également au niveau national. Si le modèle de la Thuringe s’avère être un succès, les prochaines élections législatives en 2017 pourraient devenir intéressantes. Car, à l’instar de la France, l’alternance SPDCDU conduit à une sorte de paralysie politique – lorsque la CDU se partage le pouvoir avec le SPD, elle mène une politique un peu social-démocrate, lorsque le SPD est au pouvoir, sa politique prend aussi des couleurs chrétien-démocrates. Quant aux Verts, toujours comme en France, ils se posent toujours la question s’ils sont un partie de la gauche ou de la droite. L’expérience en Thuringe pourrait les aider à se souvenir de leur racines et les remettre sur le bon chemin…

Est-ce que les partis de la gauche réussiront à sonner le glas de l’ère Merkel et de sa politique d’austérité qui a, en Allemagne et en Europe, creusé le fossé qui sépare la population de ses élites financières ? Si le premier Ministre-Président des «Die Linke» ne renversera pas encore le système politique allemand, Bodo Ramelow devient un porteur d’espoir pour la gauche allemande, mais aussi pour la gauche en Europe. A suivre attentivement !

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