Thuringe – rien n’est réglé

Après la démission du Ministre-président Thomas Kemmerich (FDP) élu avec les voix de l'AfD, la situation est tout sauf claire. L'AfD continue à faire des siennes.

C'est fait - Thomas Kemmerich n'est plus Ministre-président de la Thuringe. Mais la suite reste ouverte. Foto: ScS EJ

(KL) – En Thuringe, la situation reste chaotique. Après l’élection surprise de Thomas Kemmerich (FDP) à la tête du gouvernement régional, rendue possible grâce aux votes de la CDU et de l’extrême-droite AfD, l’Allemagne politique avait réagi immédiatement. La chancelière Angela Merkel avait demandé depuis l’Afrique où elle se trouvait que « cette erreur soit corrigée », et le SPD avait indiqué que si Kemmerich restait en poste, il allait remettre en question la poursuite de la « Grande Coalition » à Berlin. C’est fait : ce week-end, Thomas Kemmerich a démissionné. Mais le chaos à Thuringe continue.

En démissionnant, Thomas Kemmerich laisse le Land de Thuringe dans une crise politique, et réduit le nombre d’options dont dispose le parlement régional. Pour dissoudre le parlement et ouvrir ainsi la voie vers des élections anticipées, il faudrait que le parlement en décide ainsi avec les 2/3 des voix des députés – et l’AfD a déjà annoncé ne pas voter pour une dissolution. La CDU et le FDP ne sont pas non plus favorables à des élections anticipées, craignant de fortes pertes suite à cet imbroglio politique.

La deuxième option, un vote de confiance, n’est plus possible non plus, puisque Kemmerich a déjà démissionné. Reste comme seule option que le parlement d’ Erfurt élise un nouveau Ministre-président. Le candidat le plus probable est l’ancien Ministre-Président Bodo Ramelow (Die Linke) qui avait dirigé une coalition Die Linke-SPD-Verts pendant la dernière mandature. Mais ce vote s’annonce compliqué : l’AfD réfléchit à voix haute à voter pour lui, car « élu avec les votes de l’AfD, Ramelow ne pourra pas accepter son élection ». On comprend clairement que le but de l’extrême-droite en Thuringe, dirigée par le fasciste Björn Höcke, est de saboter le processus politique.

Pour la première fois, les Allemands découvrent comment l’extrême-droite agit pour arriver au pouvoir – et visiblement, ce « remake » du début des années 30 du siècle dernier fait peur. En 4 jours, l’AfD baisse de 2% dans les sondages nationaux pour se situer maintenant à 9%, le FDP baisse également à 5% et si la CDU ne trouve pas rapidement une position claire, elle paiera aussi les frais de ce feuilleton incroyable.

Pour que Bodo Ramelow puisse effectivement accepter une élection à la tête du nouveau gouvernement en Thuringe, l’ensemble des partis démocratiques doit faire un effort et se ranger derrière Ramelow qui ne pourra en effet accepter son élection qu’à condition qu’une grande majorité du parlement à Thuringe vote pour lui – il lui faut une majorité telle que les possibles votes de l’AfD ne fassent pas la différence.

En attendant, Thomas Kemmerich peut encore jouer le patron pendant quelques jours ; après sa démission, il reste Ministre-président commissaire, le temps qu’un successeur ait été élu.

Quelle leçon de politique pour les Allemands ! Désormais, il convient d’être encore plus prudent qu’auparavant – maintenant on sait comment les néo-fascistes allemands s’y prennent pour intégrer la sphère du pouvoir. Exactement comme en 1930. Mais en Allemagne, les réactions sont encourageantes. Voyant les agissements de l’AfD, l’opinion publique est alertée, et la baisse de l’AfD dans les sondages montre que bon nombre d’Allemands ont compris la stratégie de l’AfD.

Que l’extrême-droite continue à se délecter de la situation qu’elle a créée en Thuringe : au niveau national, ce spectacle fait baisser la côte de l’AfD. Qui démontre maintenant clairement ses vrais objectifs – créer le chaos (comme pendant la « République de Weimar » qui annonçait la fin de la jeune démocratie allemande le siècle dernier) pour ensuite percer. Mais les Allemands ne sont pas dupes – les fascistes ne passeront pas une deuxième fois.

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