To be stuck inside of Mobile ?

Le virus démobilise les rois du mobile

Le Covid-19 est passé par là... pas de MWC-2020 à Barcelone... Foto: LGE-MWC2018 / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(Jean-Marc Claus) – Né sur la Côte d’Azur en 1987, le Mobile World Congress s’est tenu à Cannes jusqu’en 2011. En 2012, il a mis le cap sur l‘Ouest-Sud-Ouest, pour s’installer à Barcelone. Le projet étant d’y rester jusqu’au moins 2023, la capitale catalane a jusqu’ici très bien su tirer avantage de cette grand-messe annuelle du téléphone cellulaire. Organisé chaque année par la GSM Association, une organisation regroupant 800 opérateurs ainsi que 200 fabricants et industriels, ce congrès réunit au mois de février les principaux acteurs de la téléphonie mobile. Comme à son habitude, Barcelone se préparait à recevoir une nouvelle fois les plus de 100.000 participants à cet événements, jusqu’à ce qu’un virus, non virtuel mais bien réel, vienne faire bugger le programme.

En effet, le 2019nCoV, nommé aussi Covid-19, a (entre autres exactions) planté le MWC-2020. Une formulation qui prêterait juste à rire si un examen plus détaillé de la situation ne donnait pas aussi à réfléchir. Chronologiquement, l’attention de l’Organisation Mondiale de la Santé a été attirée le 31/12/2019 par plusieurs cas de pneumonie virale détectés dans la région de Wuhan, au centre de la Chine. La mondialisation aidant, notamment via les voyages intercontinentaux, le virus responsable de ces pathologies infectieuses graves s’est forcément échappé des frontières de l’ex-Empire du Milieu. Après moult valses-hésitations et une sacrée partie de poker-menteur, nous en sommes enfin arrivées, de côté ci de l’Oural, à prendre enfin cette affaire au sérieux. C’est ainsi qu’à Barcelone est venu, après le temps de l’optimisme, celui de l’incertitude, suivi du temps des défections en cascade, pour en arriver au final à celui de l’annulation pure et simple.

Le Mobile World Congress, qui devait se tenir du 24 au 27 Février, est officiellement annulé depuis le 12 février. Pourtant, le 8 Février, El País titrait encore « Un Mobile con mascarilla y sin apretones de manos » (« Un salon Mobile avec masques et sans se serrer la main ») assurant, après le renoncement de LG et Ericsson de participer au congrès pour garantir la santé de leurs employés, que la GSMA mettrait à la disposition des plus de 100.000 participants, autant de masques qu’il en faudrait. La Generalitat de Catalunya s’était également positionnée, via Alba Vergés, sa ministre de la Santé, en annonçant lors d’une conférence de presse que les structures de soins étaient prêtes à détecter et traiter la maladie. La GSMA avait mis au point toute une série de mesures d’hygiène et de prévention ; à faire pâlir un hôpital… Antoni Trilla Garcia, un ponte de la Faculté de Médecine de Barcelone, avait appelé au calme. Mais ces premières annulations ont fait tâche d’huile et le 2019nCoV a abattu le MWC-2020, sans même tirer une seule cartouche. Ainsi va le désamour au temps du choléra, dirons-nous pour faire un clin d’oeil à Gabriel García Márquez.

Mais plus sérieusement, Gabriel García Márquez, qui dans « Cien años de soledad », décrivait la détresse des villageois de Macondo, confrontés à une étrange maladie les privant de sommeil, puis leur faisant progressivement perdre la mémoire, mériterait d’être invité dans le débat. La progression importante du virus en Chine, c’est-à-dire dans son foyer d’origine, et les quelques cas détectés de par le monde, nous renvoient inévitablement à nos angoisses et nos vulnérabilités. Réelles, imaginaires ou supposées, là n’est pas la question. Factuellement parlant, la maladie a mis à mal un événement international relatif à un objet devenu, à tort ou à raison, essentiel à notre quotidien : le téléphone cellulaire. Toujours aussi factuellement, ce sont 492.000.000 d’€ de bénéfices, dont le virus prive la ville de Barcelone, soit juste quelques footballeurs. Concrètement, ce sont 14.000 emplois potentiels qui vont pâtir de cette annulation. Les démêlées juridiques avec les assurances, suite aux ruptures de contrats provoquées par les firmes impliquées, vont être particulièrement complexes, selon le professeur Borja Adsuada Valera, expert en droit s’exprimant dans les colonnes d’El País le 13/02. Pire encore, on ne peut dès à présent, exclure totalement la possible non-reconduite de la manifestation l’an prochain.

Rappelons que, si la GSM Association a renoncé à la tenue du MWC -2020 en raison de « l’inquiétude mondiale » suscitée par le 2019nCoV, l’OMS qui avait décrété à son propos l’urgence internationale, déconseillait d’imposer des restrictions de circulation des personnes et des biens en dehors de la Chine. Mais il est vrai que l’économie chinoise, damant le pion ces dernières années à nombre de ses concurrentes, notamment en matière de téléphonie mobile, nous pouvons imaginer la portée symbolique de cette crise sanitaire. Reste à savoir si, sans Mobile World Congress en 2020, et peut-être aussi en 2021, les accros aux objets technologiques vont se remettre des conséquences de cedtte pandémie. A cette heure, beaucoup de terriens, hyperstimulés par les objets technologiques, ont déjà perdu le sommeil, comme les villageois de Macondo dans « Cien años de soledad ». Perdent-ils alors progressivement la mémoire ? Les habituels salarié(e)s des emplois induits par le Mobile World Congress, ainsi que les autorités de la ville de Barcelone, vont perdre le sommeil pour d’autres raisons et, sentant durement passer la facture de ce fiasco, ne risquent pas de l’oublier de si tôt…

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