Txalaparta et Makilas

Il suffit de quelques planches et des pilons de bois, pour faire en « Euskadi », du son qui est bien plus que de la musique.

La « txalaparta », un instrument très ancien, un temps oublié, mais aujourd’hui transgénérationnel. Foto: Iñaki LL / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Jean-Marc Claus) – Initialement une planche posée horizontalement sur deux paniers, dont elle est isolée par du foin, des feuilles de maïs, de la laine ou des peaux, la « txalaparta » a évolué, mais elle est toujours frappée perpendiculairement par des pilons appelés « makilas ». Comme son orthographe le laisse supposer, cet instrument fait partie intégrante des traditions musicales et culturelles du Pays Basque, ou « Euskal Herria » ou « Euskadi » en basque et « País Vasco » en espagnol.

Plus qu’un combiné de xylophone et de balafon à la façon Gulliver, bien que ses origines soient floues, il y a tout lieu de penser qu’il servait initialement à communiquer. Ressemblant par son usage au « simantre », qui appelait les fidèles à la prière et à l’office jusqu’au IXe siècle où il fut remplacé par les cloches, la « txalaparta » est un moyen de communiquer qui devint instrument de musique. Chose du reste très fréquente, dans la catégorie des percussions, la « txalaparta » étant alors à ranger dans la catégorie des idiophones.

Selon Josu Goiri, auteur de référence en la matière, elle rappelle que la musique est la vie. En effet, le vocable « txalaparta », évoquant une pluie intense mais aussi le galop d’un cheval sous forme d’onomatopée, il devient alors très clair que dans un contexte rural, le martellement rythmé du bois ne peut que célébrer le vivant. C’est aussi dans cet esprit que certains commentateurs la mettent en lien avec les fêtes des récoltes, voire même certains rituels dits païens, qu’il importe de replacer dans une compréhension animiste du monde.

Manquant de sombrer dans l’oubli, à l’époque des Trente Glorieuses, la « txalaparta » a été sauvée à partir des années soixante, pour devenir au début du XXIe siècle, plus qu’une simple curiosité. Les « txalapartari », jouant toujours en binôme sur le même instrument, entretiennent un dialogue qui fait mélodie. D’où la nécessité de développer suffisamment de complicité, pour jouer de concert sur un mode d’improvisation.

Plus qu’un exercice de piano à quatre mains, le jeu des « txalapartari », qu’ils soient face à face ou côte à côte, est une célébration chargée de nombreux symboles : verticalité / horizontalité, mouvement / immobilité, son / silence, féminin (txalaparta) / masculin (makila), équilibre / déséquilibre, etc… Traditionnellement, le « tatkun » ou « tukutun » joue deux coups répétés régulièrement avec un espace entre chaque salve. Dans son jeu, vient s’intercaler « l’herrena » ou « urguna », jouant des combinaisons variés.

S’entendant à une distance de 5 kilomètres, le jeu des « txalapartari » avait aussi cette fonction d’invitation à des célébrations rurales, comme par exemple les fêtes autour du pressage des pommes à cidre. On utilisait alors les planches du pressoir qui, encore humides, rendaient un son particulier. Lui était associé « l’adarra », un instrument à vent réalisé dans une corne de bœuf.

Jouée de façon traditionnelle, comme à Oiartzun dans la province basque de Guipuscoa, la « txalaparta » peut aussi s’adapter à des styles infiniment plus contemporains. Ainsi pour une interprétation de « Sagarra Jo », une chanson emblématique du Pays Basque, Madonna lors sa tournée de 2012, était accompagnée par des « txalapartari ».

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