Ukraine : Le pire est l’ennemi du mieux

Un vainqueur guignol et zombie

Zelensky, le Serviteur du Peuple Foto: Ukrinform TV/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 4.0Unp

(Marc Chaudeur) – Ainsi donc, après sa prestation lamentable de vendredi, dans ce stade par lui réclamé, Zelensky l’a emporté haut la main (73%) contre le président sortant. Un look de pré-président assez français (clic clic) avec son petit veston cintré et son visage de gamin, une prestation à succès où Zelensky jouait le rôle… de Président de la République : on ne pouvait rêver meilleure illustration de la société du spectacle. Et maintenant ? Comment Volodymyr Zelensky, 41 ans, compte-il résoudre les graves problèmes de la société et de l’État ukrainien ?

Indéniablement, ces deux dernières années, on pouvait observer de légers progrès de la démocratisation, et un élargissement de la place dévolue à la société civile. La lutte contre la corruption n’était pas nulle, sous l’égide de cette NABU fondée par Petro Porochenko, le Roi du chocolat himself – cela malgré les tentatives de détournement et de neutralisation partielle de son action, récurrentes. Et sous la pression (d’ailleurs contradictoire) très forte qu’exerce sur la société ukrainienne l’agression russe de 2014 et la guerre de cinq ans qui en est la conséquence.

Zelensky est une personnalité politiquement neutre, excellent en comm’, mais lamentablement ignorant et dilettante : chacune de ses apparitions publiques est catastrophique, à chaque fois qu’on dépasse le temps de la photographie et l’espace de la déclaration liminaire de 3 phrases. Et particulièrement inquiétant parce qu’on ne saurait nullement prévoir quelles décisions politiques il prendra face à la Russie, pour qui la défaite de Porochenko est objectivement une aubaine. « Objectivement »  parce qu’en Ukraine, c’est l’un des soupçons principaux qu’on porte à Zelensky : celui d’être très proche de Poutine, et même, d’être financé par lui – un point qui le relie fraternellement à Donald Trump… Accusation injustifiée ? Pour être un peu mieux fixé sur la question, il faudra poser la question à son mentor, le milliardaire Ihor Kolomoïski https://eurojournalist.eu/elections-en-ukraine-et-en-slovaquie/ Il faudra aussi attendre que la justice fasse son travail, ce qu’il lui arrive de faire, en Ukraine, et même plus souvent qu’on ne pense…

Alors, pourquoi élire une telle catastrophe sur pattes ? Porochenko et son gouvernement commençaient à sortir légèrement de la sphère historique initiée dans les années 1990, qui a vu les oligarques s’emparer du pouvoir… et des finances, et tout faire pour garder ce pouvoir. Et sans doute est-ce la latitude plus importante dévolue à la société civile qui explique, au moins partiellement, la candidature et la victoire du comédien Zelensky. On parle le plus souvent de « dégagisme » à ce sujet : Porochenko se retrouve ainsi dans le même panier que la revenante Julia Timochenko.

Dégagisme, populisme : aussi peu qu’en Europe occidentale, les protestataires et les ironistes (« Serviteur du Peuple », ainsi se nomme la sérié TV et le pseudo-parti monté de toutes pièces avant les élections par Zelensky) trouvent une solution de remplacement. Zelensky, comme une sorte de gilet jaune ukrainien, n’apporte pas l’ombre d’une proposition effective pour changer l’état des choses dans son pays. Que fera-t-il, au juste ? Comment composera-t-il avec le parlement, la Rada ? Et surtout, quelle sera son attitude face aux Russes, dans les Républiques séparatistes de l’Est, surtout le Donbass) et à l’extrémité occidentale de la Crimée ?

A l’extérieur, Volodymir Zelensky, ce polichinelle-zombie, ne fait qu’éveiller de fortes inquiétudes. Ces inquiétudes se réveilleront vivement dans le pays même ces prochains mois.

 

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