Un an après la dissolution de l’Assemblée nationale…

Lundi 9 juin marquait le premier anniversaire de la dissolution de l’Assemblée nationale, une décision prise par Emmanuel Macron après la défaite de son camp à l'élection européenne.

L'Assemblée nationale après la dissolution. Un parlement sans élus, ça fait quand même vide... Foto: Coucouoeuf / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Félicia Dassonville) – C’est un jour qu’on n’est pas près d’oublier. Dimanche 9 juin 2024, Emmanuel Macron annonçait dissoudre l’Assemblée nationale, quelques instants après la publication des résultats de l’élection européenne qui annonçaient le Rassemblement nationale (RN) vainqueur, un échec pour le camp présidentiel. « J’ai décidé de vous redonner le choix de notre avenir parlementaire : je dissous ce soir l’Assemblée nationale », avait affirmé Emmanuel Macron lors de son allocution à la télévision. Une nouvelle qui a créé un véritable raz de marée dans la sphère politique et qui a mis fin à sa majorité relative. Après des élections express, l’Assemblée nationale prend un nouveau visage où aucun parti n’a la majorité absolue et le RN devient le parti le plus fort avec 123 députés.

Trois Premiers ministres, 130 textes examinés,… – Pendant cette année, la France n’a pas connu un moment de répit. À commencer par la nomination du Premier ministre qui allait succéder à Gabriel Attal, Michel Barnier, le 5 septembre dernier, après sept semaines d’attentes où le président de la République a enchaîné les hésitations. Mais le gouvernement de Michel Barnier ne tiendra pas, puisque l’Assemblée nationale a largement voté la motion de censure déposé par le Nouveau Front Populaire (NFP), avec 331 voix sur 574, une première depuis 1962. Une motion de censure qui s’inscrit dans un contexte particulier, puisque le Premier ministre a peiné à faire voter son projet de loi de finances de la Sécurité sociale.

François Bayrou y voit une opportunité pour accéder à Matignon, un poste qu’il convoite depuis 2017. « Si François Bayrou s’est montré aussi insistant, c’est qu’il s’est dit que c’était son moment pour la France et qu’il était l’homme de la situation », affirme auprès du journal Les Échos le sénateur centriste Olivier Henno. C’est finalement le 13 décembre que François Bayrou va être nommé Premier ministre par Emmanuel Macron. Mais les scandales vont très rapidement éclater, avec notamment l’affaire Bétharram où plus 200 anciens élèves de l’établissement catholique ont dénoncé des violences psychologiques, physiques ou sexuels entre 1950 et les années 2000. François Bayrou, alors ministre de l’Éducation, aurait eu connaissance des faits.

Avec une Assemblée nationale divisée, l’année n’a pas été simple pour le camp présidentiel. D’après les données de l’Assemblée nationale, 130 textes ont été examinés pendant les onze mois, contre 311 textes en deux ans et 823 textes entre 2017 à 2022, soit une moyenne de 164 par an. Les députés ont alors passé le plus de temps sur la question budgétaire. D’après le site de l’Assemblée nationale, plus de 126 heures ont été consacrées aux projets de lois de finances ces derniers mois, contre 74 heures un an plus tôt.

Pour beaucoup de spécialistes, le pays est à l’arrêt, c’est notamment le cas de Jean-Luc Fournier, journaliste pour le média Or Norme. « Un an plus tard, le pays est complètement bloqué. Institutionnellement parlant, la 5ème république a toujours prévu une majorité à la disposition du président et là, il n’y en a pas. Je crains que ça soit le cas pendant deux ans avant les élections présidentielles ». Il rajoute : « La société n’explose pas encore, alors qu’elle est profondément divisée ».

« Personne n’a compris » – Un an après, les Français semblent toujours contrariés – selon un sondage YouGov pour le Huffpost, 74% d’entre eux critiquent toujours la décision du chef de l’État. C’est notamment le cas de Thomas* qui estime que le choix du président n’a rien changé. « C’est toujours pareil, tout augmente à fond et personne ne bouge. On en a marre », affirme l’homme de 45 ans. Un avis partagé par Josiane*, retraitée. « C’était une source de désordre et personne n’a compris pourquoi on faisait une dissolution et après, ça ne s’est pas éclairci ». Mariam, âgée de 17 ans : « J’ai remarqué que les prix avaient augmenté depuis la dissolution. Je pense que la France va mal »

Vers une autre dissolution ? – Sans majorité à l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron pourrait une nouvelle fois dissoudre l’Assemblée. Mais selon l’article 12 de la Constitution, la dissolution doit intervenir un an après le second tour des législatives anticipées par la précédente dissolution, soit au plus tôt le 8 juillet. Mais la dissolution semble ne pas être dans les projets du président de la République. « Mon souhait, c’est qu’il n’y ait pas d’autre dissolution », a affirmé le locataire de l’Élysée, interrogé sur le sujet lors d’une conférence de presse depuis Nice, en marge de la Conférence des Nations unies sur l’Océan. Il rajoute : « Mais mon habitude n’est pas de me priver d’un pouvoir constitutionnel, parce que si des formations politiques décidaient d’avoir une approche totalement irresponsable et bloquer le pays, peut-être me retrouverais-je dans une situation où je dois utiliser la Constitution ». Pour Jean-Luc Fournier, dissoudre une nouvelle fois l’assemblée serait « stupide ». « Dissoudre une nouvelle fois, ça serait ajouter du malheur au malheur et de la stupidité à la stupidité, mais avec le personnage qu’on a à l’Élysée, on peut s’attendre à tout ».

La classe politique est divisée sur la question. Le RN veut une dissolution en automne pour espérer arriver au pouvoir, pour d’autres, redissoudre ne va rien arranger.

*Les prénoms ont été modifiés pour préserver l’anonymat.

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