Un an après les élections, un avenir en pointillés pour l’Europe ?

De l’enthousiasme pour un nouveau projet… ?

Si les responsables européens n'arrivent pas à donner une nouvelle orientation à l'UE, le désenchantement citoyen risque d'éteindre les lumière du PE... Foto: Eurojournalist(e)

(Par Alain Howiller) – Finalement, ils étaient 7. «Sept» comme les «Sept mercenaires» sortis tout droit du film de John Sturges ! «Sept» comme les «Sept samourais» mis en vedette dans le film d’Akira Kurosowa. La comparaison s’arrêtera là : il manquait de l’action, du débat dans le déroulé du «film» que proposait le président Philippe Richert mardi noir, à Strasbourg, au siège de la Région Alsace. Pourtant, les acteurs n’étaient pas des amateurs et ils avaient attiré plus de 200 personnes, le titre de la prestation proposée sous la forme d’une conférence-débat intitulée «Un an après, les élections européennes, quel avenir pour l’Europe ?»

Il y avait là outre Jean Paul Jacqué, Président du «Pôle Européen d’Administration Publique – PEAP», coorganisateur de la soirée, trois anciens présidents du Parlement Européen (l’espagnol José Maria Gil-Robles, la française Nicole Fontaine, qui fut également Ministre déléguée à l’Industrie et l’allemand Hans Gert Pöttering), l’ancienne Ministe de la Culture et Maire de Strasbourg Catherine Trautmann, l’ancienne Vice-Présidente de la Commission de Bruxelles et actuelle députée au Parlement de Strasbourg, la luxembourgeoise Viviane Reding et Joseph Daul, l’infatigable animateur du Parti Populaire Européen (PPE), actuel président du «Cercle Pierre Pflimlin». Comme aurait dit le rappeur-philosophe strasbourgeois Ab al Malik, c’était du «lourd, rien que du lourd !»

Combattre avec de l’audace, le désenchantement des citoyens ! – Tellement lourd que pratiquement tous les intervenants surfant sur la vague eurosceptique devenue trop souvent anti-européenne, se sont accordés pour vouloir un approfondissement de la politique d’Union Européenne plutôt qu’une remise en cause qui pourrait être une autre façon (la bonne ?) de combattre le désenchantement des citoyens européens !

Pourtant, en accueillant en quelque sorte dans «sa maison» les sept intervenants de la conférence (1), le Président Richert avait évoqué la soif d’enthousiasme que réclament les européens, la nécessité de renouer avec l’esprit des «pères fondateurs» de l’Europe, le besoin d’en appeler vis à vis du «projet européen» à l’audace, à la passion. Il évoquera la nécessité de retrouver la solidarité indispensable pour contrebalancer l’effet des propos de ceux qui -trop facilement et de plus faussement- accusent l’Europe de tous les maux, contribuant ainsi à décrédibiliser le projet européen.

Il nous faut retrouver «un cap, un projet, un destin», a conclu le président Richert dont Jean Paul Jacqué appuie l’enthousiasme en rappelant, notamment que le «repli sur soi n’est pas une solution, mais l’avenir repose bien plutôt sur une solidarité retrouvée. Celle-ci suppose un minimum de confiance qui permet d’établir des règles communes générant des disciplines acceptées». C’est l’une des leçons essentielles tirées de l’expérience du «Pôle Européen d’Administration Publique», enfant transfrontalier né de l’Europe «de» et «à» Strasbourg !

Une relance politique par la «zone euro» ? – Bien sûr, la plupart des orateurs ont été d’accord pour une relance européenne à terme, cela pourrait même se concrétiser par la conclusion d’un nouveau «traité européen» qu’il serait irréaliste de vouloir conclure dans le contexte actuel. Tout le monde s’accorde pour le regretter mais sans avancer -réalisme oblige- de pistes pour relancer la machine. Il y a bien eu Viviane Réding qui plaide contre ceux qui ont tendance, par manque de courage politique, à suivre l’opinion et à de conformer aux tendances dessinées par les sondages, et qui risque l’hypothèse d’une relance pour doter l’Eurozone d’une structure politique susceptible de permettre aux pays (en nombre plus limité que les membres de l’Union Européenne) de dépasser le contenu trop excessivement financier ou économique de la «zone euro».

Il y a bien eu, aussi, Nicole Fontaine plaidant pour une relance au sein de l’Union de la prise en compte des Droits de l’Homme et pour un développement de l’initiative populaire référendum (trop encadré actuellement par la Commission) qui permet de soumettre un problème au Parlement et évoquant une évolution vers une «Europe confédérale». Elle ne parle même pas -ou plus- d’Europe fédérale !

Face à la menace russe, l’Europe de la défense ! – Plutôt qu’une réforme des politiques, voire une nouvelle évolution institutionnelle, on évoque un approfondissement et un effort de lutte dans les domaines de l’emploi des jeunes, de la croissance (on déplore le manque d’ambition du plan de relance «Juncker»), de la monnaie, de l’immigration (empêcher les immigrés d’arriver ne suffit pas, il faut agir sur le sous-développement à l’origine de l’exode), de la défense enfin. Joseph Daul, «très inquiet devant la situation dans les Balkans et en Ukraine», insiste beaucoup sur la défense : il pense qu’une évolution vers une défense commune (certains ne sortent-ils pas de l’histoire l’idée d’une armée européenne) s’esquisse lentement mais sûrement grâce à… la menace russe !

Les orateurs(rices) se réjouissent (l’opinion, pourtant, avançant le poids des états, ne manifeste pas cet enthousiasme) de l’évolution enregistrée depuis 1979 dans les pouvoirs de la Commission et ceux du Parlement Européen ! L’auto-satisfaction l’emporte : ce à quoi les citoyens semblent peu adhérer ! On parle de petits pas dont il faut se contenter compte tenu de l’état de l’opinion : «Il faut avancer avec prudence», dit J. Daul.

L’Europe de la prudence et des petits pas. – «Nous avons obtenu, depuis 1979, des compétences nouvelles. Nous avons vécu, au Parlement Européen, une révolution pacifique. En dehors de la fiscalité, le Parlement Européen a les compétences d’un parlement national. La démocratie a bénéficié d’avancées et le parlementarisme, aussi. Nous n’avons pas besoin d’un nouveau Traité, mais de la volonté nécessaire pour appliquer les textes dont nous disposons !», affirme Hans-Gert Pöttering. On a envie de lui dire : «chiche, qu’attendez vous ?»

N’est ce pas ce qu’attendent les citoyens : une Europe proche d’eux pour qu’ils puissent se réconcilier avec l’Europe et la politique. «Il y a une attente de courage politique : or nous ne sommes trop souvent, pas à la hauteur de cette attente !», a lancé Catherine Trautmann qui ne devrait pas être trop mal placée pour obtenir une évolution positive du… gouvernement français ! Mais, dans le fond, on est peut-être trop éloigné du scénario des… «7 Mercenaires» !

(I) La conférence-débat ouvrait en quelque sorte les 10èmes «Rendez-vous européens de Strasbourg» organisés notamment par le «Pôle Européen d’Administration Publique – PEPA», dans le cadre du «Mois de l’Europe en Alsace». Contact, programme et inscriptions aux manifestations, conférences, ateliers, débats sous 10rves@ena.fr – Site web : rves.eu.

 

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