Un concert pas comme les autres

Dimanche, 7 Avril à 18h, la Synagogue de la Paix à Strasbourg accueillera un concert très particulier. A vrai dire, tous les aspects de ce concert sont surprenants. Et rassurants en même temps.

Les partitions sont témoins - la musique juive est comme un organisme vivant... Foto: Marc Ackermann

(KL) – Un concert de musique liturgique juive. D’accord. Donc, un concert pour les aficionados. Du moins, c’est ce que l’on pourrait croire. Mais non, ce ne sera pas seulement un concert pour les initiés de la musique liturgique juive, mais un concert aux facettes multiples.

D’abord, il s’agira d’un concert franco-allemand, ce qui n’est pas du tout une évidence. Le Chœur de la Synagogue de la Paix, l’un des derniers en Europe, donnera ce concert avec le « Kehler Kammerorchester »“ et le tout sous la direction musicale d’un chef d’orchestre qui officie autant à la Synagogue qu’à la Cathédrale de Strasbourg. Rémi Studer, génie musical, s’est imprégné de la culture juive, au point d’avoir appris à lire l’hébreu pour maîtriser les partitions. Donc, il s’agira d’un concert aux notes franco-allemandes, dans une approche œcuménique vécue, dans la pratique, Juifs et „goys“ côte à côte, dans une normalité surprenante. Lors de notre rencontre avec Rémi Studer et Marc Ackermann du Consistoire de la Synagogue, nous avions presque l’impression que les deux étaient gênés de parler de cet aspect-là.

Il faut dire que les chanteurs du Chœur de la Paix sont des musiciens exceptionnels. Et les chanteurs se retrouveront dimanche à la Synagogue, non pas pour une manifestation œcuménique, mais pour faire de la musique. Nous n’avons pu nous empêcher de leur demander si ce concert franco-allemand n’était pas en même temps un « statement » contre la montée de l’antisémitisme en France, en Allemagne et ailleurs. Mais là non plus, les musiciens ne voulaient pas entrer dans le sujet ; et nous avons fini par comprendre que Rémi Studer, Marc Ackermann et les chanteurs et musiciens se situent dans une toute autre perspective.

En pérennisant la tradition des chants liturgiques juifs, ils donnent la réponse musicale à tous nos questionnements. Bien sûr, la solidarité transfrontalière et interconfessionnelle est importante à ce moment difficile où l’extrémisme trouve des façons de plus en plus décomplexées de s’exprimer. Bien sûr que c’est magnifique que des musiciens allemands puissent venir jouer dans une synagogue française, ce qui n’est pas une évidence. Mais le sujet n’est pas là.

Les artistes perpétuent une très vieille tradition musicale qui elle, perpétue la culture juive. Les partitions en témoignent, il s’agit « d’organismes vivants », gribouillées, raturées, adaptées, tantôt en français, tantôt en hébreu, tantôt en allemand. On a l’impression que les morceaux sont vivants, évoluent avec la communauté, s’adaptent aux chefs d’orchestre, aux saisons et au monde environnant.

Rémi Studer et Marc Ackermann nous avaient reçu à la Synagogue de la Paix où nous avons pu nous plonger dans cette culture et dans cette ambiance généreuse où les enfants peuvent être des enfants, où on échange, où on discute, où on vit une vie de communauté certes régie par plus de 600 règles difficiles à comprendre pour un non-juif, mais qui semble pourtant si proche des réalités des gens. Et du coup, on a compris que toutes nos questions concernant l’histoire avec un grand « H », concernant l’antisémitisme, concernant la politique, étaient hors sujet. Avec le concert du dimanche 7 Avril, les artistes donnent la réponse à toutes nos questions – en perpétuant cette tradition culturelle, la musique permet d’affirmer une identité juive, ouverte (si, si…), intégrant le monde d’aujourd’hui.

Il s’agit réellement de la réponse à tout – par ce concert, la communauté de la Synagogue de la Paix fait honneur à son nom, en intégrant tout naturellement la notion transfrontalière et donc franco-allemande. Par ce concert, la communauté donne la meilleure réponse à cette montée de l’antisémitisme – qui ne saura jamais imposer sa sinistre loi contre des âmes qui chantent, qui prient,  qui vivent. Et ce concert est également la réponse quant à l’avenir de la communauté juive.

Avec des gens comme Rémi Studer, Marc Ackermann et les autres artistes, on se croirait à l’époque de Jacques Sturm, au cœur de l’humanisme rhénan, à ce moment où la Cathédrale de Strasbourg était utilisée par plusieurs confessions. Le fait que Rémi Studer soit le chef d’orchestre autant à la Synagogue et la Cathédrale montre la voie.

Dimanche, 7 Avril, des musiciens et chanteurs allemands et français, juifs et chrétiens (et peut-être aussi d’autres confessions), donneront un exemple de tolérance, d’amitié et d’ouverture. Quelle meilleure réponse à tous ces phénomènes abjects qui veulent nous diviser et faire en sorte que la haine s’impose? A bien y réfléchir, il y a beaucoup de raisons pour assister à ce concert dimanche à la Synagogue de la Paix à Strasbourg…

Concert de musique liturgique juive
Dimanche, 7 Avril, 18 heures
Synagogue de la Paix, Avenue de la Paix, Strasbourg
Vente des billets sur place ou sur www.lechantsacre.fr

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste