Un œil au beurre noir pour Friedrich Merz

Il fallait deux tours pour que le Bundestag finisse par élire Friedrich Merz (CDU) comme nouveau chancelier allemand. Le nouveau gouvernement sera fragile.

Le nouveau locataire de la chancellerie à Berlin s'appelle Friedrich Merz. Mais c'était loin d'être évident. Foto: Eurojournalist(e) / CC-BY 2.0

(KL) – C’était une première en Allemagne. Jamais, après l’accord sur une coalition gouvernementale, un candidat à la chancellerie n’a pas obtenu la majorité requise lors du premier tour de son élection. Il y a eu des élections serrées, Helmut Schmidt, Helmut Kohl ou Angela Merkel avaient fait l’expérience d’une majorité d’une seule voix, mais jamais, un candidat n’a été désavoué de la sorte. 18 membres de la nouvelle coalition n’avaient PAS voté pour Friedrich Merz lors du premier tour et cela n’est pas un bon signe pour le nouveau gouvernement.

Désormais, à chaque vote au Bundestag, la nouvelle coalition CDU/CSU-SPD doit compter avec la possibilité d’être sabotée par ses propres membres et ceux qui espéraient de la stabilité politique, seront déçus.

Lors de l’annonce du résultat du premier vote au Bundestag, l’expression sur les visages des protagonistes étaient extraordinaires. Friedrich Merz avait du mal à dissimuler sa déception, puisqu’il était certain de gagner ce premier tour – mais où est-ce qu’il avait perdu ces 18 votes dans ses propres rangs ?

Ensuite, c’était la panique. Pour pouvoir organiser un deuxième tour le même jour, il lui fallait une majorité des 2/3 des membres du parlement allemand, et pendant les heures entre les deux tours, la CDU devait négocier avec ses adversaires politiques de l’opposition, donc, les Verts et Die Linke, pour que ceux-ci ouvrent la voie pour un deuxième tour le même jour. Pourtant, Friedrich Merz avait toujours exclu de voter ensemble avec les Verts et Die Linke, mais ce principe était vite oublié sur la voie vers le pouvoir.

Et justement, les Verts et Die Linke se faisaient un plaisir d’annoncer qu’ils allait voter en faveur d’un deuxième tour, mais qu’ils n’allaient pas voter pour le candidat de la CDU. Friedrich Merz était désavoué autant par sa propre coalition que par son opposition.

Pendant ce temps, l’extrême-droite AfD jubilait. Le parti officiellement classé « d’extrême-droite » par les services de renseignement, ce qui risque de conduire à une procédure d’interdiction du parti, prenait du plaisir à assister à cette farce démocratique. L’AfD sait que, comme dans d’autres pays, que sa route vers le pouvoir est dessinée et il n’est plus qu’une question de temps avant que l’Allemagne vire dans le néofascisme comme d’autres pays où l’extrême-droite se trouve aux portes du pouvoir. Il ne faut pas oublier qu’actuellement, l’AfD est le parti le plus fort dans les sondages et cette fois, c’était sans doute la dernière fois que le « mur coupe-feu », comprendre : le barrage républicain, avait fonctionné.

L’Europe entière avait suivi cette élection et ceux qui espéraient que l’Allemagne se donne un gouvernement stable et capable de relancer la machine européenne, seront déçus. Mais qui pourra fédérer les Européens ? L’Allemagne a désormais un gouvernement assez faible, comme la France qui, depuis l’été 2024, va de crise politique en crise politique, avec six premiers ministres qui se sont succédé sans pouvoir convaincre. Dans cette configuration, l’Europe reste orpheline et les néo-nationalistes du genre Meloni imposeront leur vision politique qui elle, n’est pas européenne, mais justement nationaliste.

Si Friedrich Merz veut miser sur le franco-allemand (sa première visite le conduira à Paris où il rencontrera un président français aussi faible que lui-même), il aura fort à faire de créer une situation qui permettrait de relancer l’Union européenne qui elle, se décompose de plus en plus.

La faiblesse du nouveau gouvernement allemand est une mauvaise nouvelle pour toute l’Europe. Mais d’un autre côté, pourquoi l’Allemagne serait politiquement plus stable que les autres pays européens ? La crise se généralise…

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