Une catastrophe annoncée…

Le parti d’extrême-droite AfD est désormais le 2e parti le plus fort en Allemagne. Et pendant ce temps-là, néo-nazis et antisémites défilent dans les rues. Sans être inquiétés outre mesure.

Samedi, dans les rues de Dortmund, des néo-nazis scandaient "Qui n'est pas antisémite, n'est pas allemand". Il y a péril en la demeure... Foto: Unknown / Wikimedia Commons / PD

(KL) – Commençons par les chiffres, et ces chiffres sont catastrophiques. L’actuel sondage de l’Institut Infratest Dimap (« Si vous aviez à voter dimanche prochain, pour quel parti voteriez-vous ? ») montre un paysage politique allemand en pleine mutation. Pendant que les partis traditionnels continuent leur descente en enfer, l’extrême-droite monte et monte et monte. L’Allemagne se divise et ceux qui semblent s’imposer de plus en plus, ce sont ceux qui portent maintenant la violence et la peur dans la rue.

Selon Infratest Dimap, la CDU/CSU se situe à 28%, la plus faible valeur jamais enregistrée pour ce parti au niveau national. L’extrême-droite, l’AfD, grimpe à la deuxième place avec 18%. Les social-démocrates se trouvent à 17%, les Verts à 15%, Die Linke à 10% et le FDP à 9%. Peu à peu, l’Allemagne devient ingouvernable ; et de cette situation de chaos politique, une seule formation profite – l’AfD.

Pourtant, on sent que les partis traditionnels se battent. Qu’ils multiplient les communications, les initiatives : ils vont même jusqu’à avouer publiquement que c’était une erreur de promouvoir l’ancien chef des Renseignements Généraux au grade de Secrétaire d’Etat – et tout cela ne sert à rien. Les gens n’écoutent plus. Ils sont las des querelles entre et même à l’intérieur des partis. Ce qui semble mobiliser l’électorat allemand, ce sont les manifestants néo -nazis et antisémites qui défilent dans les rues, non seulement à l’est du pays, mais ce weekend également à Dortmund, en scandant des slogans comme « Qui n’est pas antisémite, n’est pas allemand ! » et ce, sans que les forces de l’ordre estiment nécessaire d’intervenir. Cette ambiance des années 30 du siècle dernier doit interpeller des faibles d’esprit qui voteraient pour une AfD qui, elle, n’a même plus à faire de la politique. L’extrême-droite a compris qu’elle peut se tenir à l’écart des grands dossiers politiques. Il suffit de rester là, immobile, en soutenant plus ou moins ouvertement ces groupes violents terrorisant la rue – et l’AfD ne cesse de grimper dans les sondages.

Là, ça ne rigole plus. Là, il faut arrêter de minimiser en se consolant qu’à chaque manifestation des néo-nazis, il y a des contre-manifestations des antifascistes. Oui, ces antifascistes sont là, heureusement. Comme ils étaient là en 1933. Probablement, ils nous serviront comme « bonne conscience » dans quelques années, quand il faudra dire « mais les Allemands n’étaient pas TOUS des néo- nazis », l’Histoire se répète. Mais la rue appartient à ceux qui la prennent avec violence. Lorsque vous croisez une bande de 100 crânes rasés, armés de battes de baseball, scandant « l’Allemagne aux Allemands », vous éviterez d’afficher votre désapprobation, vous baissez le regard et essayez de passer ce groupe sans vous faire agresser. En somme, vous laissez faire. Normal, puisque personne ne veut jouer les héros, se faire tabasser par une horde de néo- nazis bourrés et à la recherche de la confrontation. Et c’est exactement ainsi que les régimes de la peur s’installent.

Mais là, nous ne parlons pas de science-fiction et pas non plus d’une leçon de l’histoire. Nous parlons de la réalité en Allemagne au mois de septembre 2018. Tout le monde détourne le regard, s’exerce dans le « business as usual » et exprime son indignation quant à ces marches néo- nazies et antisémites. Il n’y a plus de « business as usual » ! Bon sang, il faut se réveiller ! Les néo- nazis descendent dans la rue, font la chasse aux étrangers, beuglent des slogans antisémites, et on fait semblant de croire que tout va bien ?!

L’AfD est désormais la deuxième force politique en Allemagne. Les partis traditionnels et démocratiques ont maintenant une seule mission : se liguer contre le « nazisme 2.0 » et mener une nouvelle politique de l’ouverture, du consensus et de l’intelligence au service du pays et de l’Europe. Il n’y a plus lieu de gaspiller son temps et son énergie dans les querelles habituelles entre la droite et la gauche, il y a péril en la demeure ! L’ensemble des forces démocratiques doit maintenant agir de concert et combattre cette évolution qui conduit à une nouvelle catastrophe. Autrement, les terribles images de néo-nazis dans les rues allemandes se répéteront. Tout comme l’Histoire.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste