Unteilbar !

Le peuple est indivisible

La Manif UNTEILBAR samedi à Berlin, pour une société ouverte, unie et solidaire Foto: Luc Paquier, Berlin

(MC) – Une manif, ça sert à quoi ? Une manif a-t-elle jamais changé quelque chose ? Samedi après-midi, 240 000 personnes au moins ont défilé à Berlin. Ces personnes ont marché « pour une société libre et ouverte » et contre le racisme et la haine.

Le cortège est parti de l’Alexanderplatz pour progresser vers la Siegessäule. Un serpent de 2 kms de long… « Non, le racisme n’est pas une alternative », criaient certains des manifestants. lls faisaient allusion à l’AfD, le parti d’extrême-droite qui a le vent en poupe, surtout dans l’Est du pays, mais qui a fait un score non négligeable hier lors des élections du landtag de Bavière, dans le fief de la CSU «  démocrate-chrétienne » et surtout conservatrice.

Les manifestants scandaient aussi des slogans comme : « Sagt es laut, sagt es klar, wir sind alle unteilbar ! « (Dites le haut, dites le clair, nous sommes indivisibles ! »)

UNTEILBAR, c’est l’ alliance de milliers d’associations et d’organisations. A cette alliance se sont joints des organisations chrétiennes, des associations caritatives, des syndicats et des partis. La SPD et Pro Asyl, notamment, ont appelé à participer à cette manif. Unteilbar avait déjà rassemblé des milliers de personnes à Munich et à Hamburg les semaines précédentes. Tous ces manifestants protestent contre la bunkérisation européenne et l’édification d’une forteresse Europe, pour l’intégration des réfugiés, pour les droits de l’Homme, contre les nazillons et la remontée des eaux boueuses en général.

Des politiciens et des célébrités soutenaient la manif : notamment Heiko Maas, Ministre fédéral SPD des Affaires étrangères, qui a déclaré : « L’Allemagne ne se laissera pas diviser, surtout pas par les populistes de la droite ! » ; le présentateur TV Jan Böhmermann, le groupe Die Ärzte, etc. Et le chanteur Herbert Grönemeyer a fait une déclaration forte et pertinente : « Nous sommes un pays très, très jeune et fragile ; et nous avons soigneusement construit notre liberté au fil des ans, ensemble. Elle ne va pas de soi, et elle n’est pas sculptée dans la pierre. Nous sommes soumis à une épreuve, aujourd’hui, et il s’agit de défendre des choses essentielles. Personne n’est plus allemand que les autres ; il n’existe pas une Allemagne, mais il existe des millions d’ Allemagnes. Et c’est la beauté indissoluble de ce pays. »

Il y a division, cependant, et cette division passe au beau milieu de la gauche. Sahra Wagenknecht, qui dirige la fraction de la Gauche au Bundestag (Parlement fédéral) a annoncé officiellement que ni elle ni sa formation, Aufstehen, toute neuve (du moins chronologiquement, sinon par ses idées) ne participeront à la manif, bien que le parti Die Linke y sera représenté par son propre bloc. Sahra Wagenknecht estime que la revendication « de frontières ouvertes pour tous » exclut nombre de personnes qui s’opposent à ces frontières ouvertes, mais qui ne s’opposent pas moins au racisme.

Beaucoup la critiquent avec virulence et considèrent qu’ Aufstehen s’est couvert de honte et discrédité.. Que l’AfD avant tout se réjouisse de la critique de Sahra Wagenknecht contre la manif dit tout, estime Michael Kellner, le Secrétaire général des Verts.… Il est vrai que Gauland, le dirigeant de l’AfD, a loué tout récemment Wagenknecht parce que selon lui, elle fait entendre « la voix de la raison » .

Ce beau samedi ensoleillé d’automne a montré qu’une manif réussie, ça sert à quelque chose, et comment. Ça sert à se manifester ! C’est-à-dire à montrer son visage aux autres, à des êtres unis dans leurs différences. A en être reconnus et à les reconnaître. A tisser un lien dans la réalité, même projetée dans la perception idéale du festif. Cette manif a été étonnante aussi dans son expression quasi rousseauiste, peu commune en Allemagne, de la nécessité d’unité sociale. La Volonté générale est souveraine et indivisible, écrit Rousseau entre autres choses importantes, dans le Contrat social. Ils ont bien raison, les manifestants d’ UNTEILBAR : il faut faire participer le plus et du mieux possible les membres de la société à la décision politique – y compris les nouveaux arrivants, qui cherchent refuge, qui cherchent à vivre et à construire leur existence. Sans nécessairement supprimer leurs différences comme on essaie de le faire en France depuis 1793.

 

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