Vacances en Belarus

Les manifs et les violences continuent : jusqu’où ?

Au centre de Minsk dimanche soir Foto: Nacha Niva/CC-BY-SA/4.0Int

(Marc Chaudeur) – Dimanche, manifestations regroupant des milliers de personnes en plein centre ville de Minsk, la capitale. Pour protester contre le score prétendu de Loukachenko (80,23%), produit d’élections évidemment truquées. La personne que les médias ont dit morte ne l’est pas ; elle se trouve dans une situation sérieuse, à l’hôpital. Aujourd’hui, les manifestations, à peine moins massives, se poursuivent.

Selon quelques connaissances de Belarus, des heurts d’une extrême violence ont lieu dans tout le pays, et pas seulement à Minsk. La police tire des balles de caoutchouc sur les manifestants et lance des grenades lacrymogènes. OMON, la police, est partout, secondée par les milices privées que rétribue le dictateur Loukachenka. Les policiers intimident, tabassent très violemment et arrêtent des citoyens, souvent au hasard.

Dès dimanche, les autorités elles-mêmes ont informé les médias de l’arrestation de presque 3000 personnes. Auxquelles s’ajoutent celles qui occupent les commissariats depuis hier lundi. Dans la journée d’hier, le pays était en proie à une grande agitation. Des manifestants ont bloqué la rue menant au centre commercial de Korona ; ils tenaient le drapeau rouge-blanc-rouge interdit, scandaient des slogans et chantaient des chansons d’opposition comme le désormais fameux Peremen. Les fenêtres des voitures, dans beaucoup de villes, sont ornées du drapeau de l’opposition et les gens font le V de la Victoire en roulant, bandeau blanc au bras. Dans un autre centre commercial, les OMON ont bloqué les issues et jeté des grenades lacrymos sur les gens, un peu au hasard. Ce n’est pas le bon peuple, donc supprimons le peuple, comme disait à peu près Brecht au sujet de ses frères ennemis communistes.

La concurrente électorale de Loukachenka, Sviatlana Tsikhanouskaia, a été détenue un certain temps. Il semblerait qu’elle ait été relâchée, mais hier soir, personne n’avait pu lui parler.

Au centre de Minsk, tous les commerces sont fermés. Les poubelles et les bancs ont été supprimés devant les arrêts de bus. Les manifestants essaient d’atteindre le centre de la capitale, ce qui est à peu près impossible. Ils se rassemblent dans les stations de métro, qui leur permettent une certaine mobilité et donc d’échapper aux manœuvres d’encerclement de la milice et des nervis privés. Beaucoup de personnes ont été arrêtées sur la « Stella », ainsi qu’on appelle l’Avenue de la Victoire ; un lieu qui tend à cristalliser l’agitation de la population indignée par les tripatouillages de la dictature et la violence de ses polices. Les gens fuient ces arrestations en se dirigeant plutôt vers la gare de bus.

Autres nœuds de confrontation : l’hôtel Jubilé, où on nous dit qu’une quinzaine de personnes au moins ont été arrêtées après un regroupement important d’au moins 200 manifestants qui criaient : « Vive le Belarus ! ». Et la Place Pouchkine : ici, blocage du passage des OMON par des voitures et des camions, y compris un camion citerne… Sur les murs, des graffitis : « Gloire au Belarus ! » Et on distribue des tracts qui appellent à une grève générale illimitée, jusqu’au départ d’Aleksandr Loukachenka. Et autour des gens, les explosions des grenades, la fumée des lacrymos, des pavés qui volent en direction des policiers avec des cris : «  Honte aux fascistes ! ». Même genre de heurts violents dans les villes de Grodno et de Brest.

Les manifestants, très déterminés, appellent à continuer la protestation jusqu’à l’abandon du pouvoir par le dictateur. Cela peut-il arriver ? On ne peut se montrer vraiment optimiste, hélas, sur la possibilité de cette issue. Loukachenka est prêt depuis très longtemps pour l’épreuve de force. Et ses troupes, elles, ne risquent guère de se rallier à la population : la situation n’est pas assez favorable à cette dernière, et l’instabilité n’est qu’apparente. Du moins pour l’instant.

Que se passera-t-il dans une semaine, dans un mois ? Les manifestants pourront-il tenir jusque là ? Espérons le… En attendant, Xi Jinping et Poutine affichent leur soutien : le dirigeant chinois a été le premier à féliciter Loukachenka pour son succès, tandis que le second insiste pour que la tranquillité de son voisin soit assurée. Sous entendu : par tous les moyens.

 

 

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