Yolanda n’est pas allée à Canossa !

La rencontre entre la seconde vice-présidente du gouvernement espagnol et le pape, a suscité nombre de réactions hostiles. Certains auraient bien aimé qu’elle se rende à Rome, comme l'empereur Henri IV alla à Canossa, pour s’humilier devant le pape Grégoire VII.

Yolanda Díaz n’a pas perdu le sourire, suite à son entretien avec le Pape François. Et pour cause ! Foto: Ministerio de Trabajo y Economía Social / Wikimedia Commons / CC0 1.0

(Jean-Marc Claus) – La rencontre au Palais Apostolique du Vatican entre le pape François et Yolanda Díaz, seconde vice-présidente du Gouvernement Sánchez II, qui s’est déroulée samedi dernier, au grand dam des esprits réactionnaires de tous ordres, fut riche d’enseignements ou d’énervements, selon que l’on la considère avec plus ou moins d’ouverture d’esprit.

Accompagnée du secrétaire d’état à l’emploi Joaquín Pérez Rey, la vice-présidente, mais aussi ministre du travail et de l’économie sociale, a échangé durant une quarantaine de minutes avec le souverain pontife, notamment sur la thématique de l’emploi. Un sujet important pour Jorge Mario Bergoglio, car il considère que le travail est un droit humain, et se fait à ce propos, qualifier de communiste quand il le souligne et revendique pour tout être humain ce qu’il appelle « les trois T » (Toit – Terre – Travail).

« Une terre, un toit, un travail, pour lesquels vous vous battez, sont des droits sacrés. Les réclamer n’a rien d’inédit, c’est la doctrine sociale de l’Église », avait-il déclaré en 2014 en présence du président bolivien Evo Morales, devant des militants et des précaires. La diplomatie vaticane voulant que l’intégralité de l’entretien avec la vice-présidente espagnole ne soit pas rendue publique, il n’en demeure pas moins que ces échanges cordiaux, avaient une portée symbolique importante, à la veille d’une semaine de rencontres décisives en Espagne entre exécutif, syndicat et patronat.

La ministre communiste Yolanda Díaz n’est pas allée à Rome, obtenir par anticipation l’imprimatur, au sujet de la réforme des lois sur le travail voulue par le Gouvernement Sánchez II, mais une communauté de vues sur le respect de la dignité des travailleurs et le droit du travail en agace plus d’un, comme le rapporte depuis dimanche la presse espagnole. Autres sujets des plus agaçants pour les opposants à l’actuel gouvernement espagnol, dont certains se réclament haut et fort du catholicisme, étaient l’accueil des réfugiés et la crise climatique, sujets sur lesquels la vice-présidente espagnole et le pape sont globalement en phase.

Une horreur totale pour les chrétiens de façade et les communistes bas de plafond, ces « je-sais-tout-mieux-que-quiconque » ne faisant défaut à aucune des deux obédiences ! D’autant plus que les cadeaux offerts par Yolanda Díaz au Pape François, ont de quoi brouiller les pistes et susciter leur colère. Une étole réalisée en plastique brodée par les Carmélites Déchaussées d’Alcalá de Henares et une édition de « Follas Novas », ouvrage de la poète galicienne Rosalía de Castro (1837-1885) que les émigrés galiciens emportaient avec eux en Argentine.

Pour l’étole en plastique recyclé, le message est facilement décodable, et une vidéo tournée lors de sa remise montre l’intérêt que lui porte le Pape. Quant au livre de Rosalía de Castro publié en galicien, langue comptant trois millions de locuteurs, il faut savoir que son auteure est née à Saint-Jacques-de-Compostelle, l’un des trois lieux de pèlerinage de la chrétienté. Par ailleurs, si son œuvre littéraire est considérée comme un élément essentiel du renouveau de la Galice, la culture d’une identité régionale ne rimait pas pour elle avec séparatisme.

Une femme écrivant en galicien, à laquelle le poète Federico García Lorca (1898-1936) avait rendu un vibrant hommage l’année précédant son assassinat par les milices fascistes, voilà qui fait un peu désordre pour les tenants d’un certain ordre prétendu moral et les acharnés du séparatisme ! Mais visiblement, le Pape François ne manque pas de hauteur de vue, sans quoi Yolanda Díaz ne se serait pas rendue à Rome, car s’il en est qui doivent aller au Vatican comme on va à Canossa, ce sont justement ceux qui ont qualifié cette rencontre de sommet communiste (cumbre comunista).

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