Z. n’est pas un historien

Le révisionnisme zemmourien peut être efficacement combattu, à condition de se former en matière d’autodéfense intellectuelle.

Z. est un contre-historien, qui n’a par conséquent, rien d’un historien à la rigueur par nature scientifique. Foto: privée

(Jean-Marc Claus) – Non, Éric Zemmour n’est pas un historien, et s’il fallait le qualifier quant à cette discipline scientifique, le terme contre-historien lui conviendrait infiniment mieux. Terme ayant pris son essor au XXe siècle, quand « révisionniste », expression initialement neutre, acquérait un sens de plus en plus péjoratif. Oui, l’histoire est une science, et donc ne relève pas de la littérature où tout récit est validé du moment qu’il flatte l’ego de son auteur.

De nombreux chercheurs et historiens se sont mobilisés, pour expliquer comment et pourquoi le président-candidat de « Reconquète ! » briguant l’Élysée, tord l’histoire et la manipule. Laurent Joly, directeur de recherche au CNRS a publié en début d’année chez Grasset « La falsification de l’histoire », où il démontre que le choix de la collaboration par le Régime de Vichy n’était en rien une fatalité.

Mais la propension de Z. à falsifier les données historiques, ne se limite pas à la période de la Seconde Guerre Mondiale. Dans un ouvrage collectif de la collection « Tracts » publiée par Gallimard, seize historiens dont Laurent Joly, mais aussi la très médiatique et internetique Mathilde Larrère, démontent dix-neuf mensonges zemmouriens, allant de 502 à 1998. Ainsi, les cinquante-quatre pages de « Zemmour contre l’histoire » s’avèrent-elles des plus instructives, car révélatrices de l’état d’esprit du polémiste-candidat, qui, s’il est élu, risque fort de mettre fin à toute polémique en n’en tolérant aucune.

Pur produit du bollorisme dont il est issu, le zemmourisme n’a absolument rien d’un humanisme. Comme le dit la quatrième de couverture de cet opuscule, il aime à se faire passer pour un intellectuel, dépositaire d’un savoir sur le passé grâce auquel il aurait une compréhension intime et profonde des dynamiques du temps présent.

En fait, mobilisant ses quelques talents de romancier et d’orateur, il construit un récit propre à flatter les plus bas instincts, tant d’individus en déficit de connaissances historiques fiables que de manipulateurs instruits trouvant dans sa storytelling, tous les ingrédients nécessaires pour mobiliser les précédents. Or, il y a fort à craindre que, dans un très proche avenir grâce aux moyens médiatiques mis à la disposition de l’autoproclamé historien, ce poison se répande dans l’opinion publique avec le succès des infox complotistes.

D’où la nécessité de se former en matière d’autodéfense intellectuelle. Ainsi, reprenant dix-neuf affirmations, extraites de publications zemmouriennes et interventions dans les médias, le collectif de seize vrais historiens qui s’y est attelé, démontre leur fausseté en peu de mots.

Que cela plaise ou non à Z. :

- Clovis n’est pas oublié dans les manuels scolaires et la recherche historique.
- La Croisade n’est pas une victoire française.
- Saint Louis n’est pas un roi juif.
- Le Grand Ferré n’est pas un héros patriote.
- Les victimes protestantes des Guerres de Religion ne sont pas les bourreaux.
- Les nazis ne sont pas les héritiers de Voltaire
- La Révolution Française n’est pas un complot philosophico-maçonnique.
- Il n’y a pas eu de génocide vendéen.
- Les Français n’ont pas créé l’Algérie.
- Dreyfuss n’est pas coupable.
- Les mutins de 1917 ne voulaient pas continuer la guerre.
- Pétain a bel et bien tué la République
- Vichy n’a pas protégé les juifs français
- Simone de Beauvoir n’est pas Madame Jean-Paul Sartre, car elle existe par elle-même.
- (Le mathématicien et militant communiste) Maurice Audin n’a jamais tué personne.
- Le massacre du 17 Octobre 1961 n’est pas la répression d’une manifestation, mais le résultat d’une chasse à l’homme et de rafles.
- De Gaulle n’a pas donné l’indépendance à l’Algérie.
- Maurice Papon n’a pas été victime d’un procès politique en 1997-1998.

Z n’est pas un historien, mais un conteur d’histoires, capable de mobiliser une armée des crédules prétendant ne pas s’en laisser conter. Son discours, dont nous parlerons dans une prochaine publication, employant les mots comme des armes, rend ses fictions fascinantes pour un publique en quête de sens, à condition que ce dernier soit unique…

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste