Hongrie : Exit Viktor Orban ?

(Marc Chaudeur) – Lundi dernier, Viktor Orbán a reçu Heinz-Christian Strache, dirigeant du FPÖ, le parti d’extrême-droite au pouvoir en coalition avec l’ÖVP. A l’issue de la rencontre, Attila-Orbán a fait une déclaration contre Manfred Weber, et retiré son soutien au candidat bavarois du PPE. Orbán va-t-il donc quitter le PPE, et cela, avant même les élections ?
Ces dernières semaines, on se confortait dans l’idée que le Fidesz de Viktor Orbán allait demeurer au sein du groupe PPE, une fois les élections passées, et au prix sans doute de quelques concessions, d’ailleurs mineures et superficielles. On semblait tenir au maintien d’Attila- Orbán dans le groupe des conservateurs. Eh bien, cette semaine, les événements semblent se précipiter.
Lundi après-midi, Viktor Orbán a déclaré après l’entretien avec Strache : « Manfred Weber est inapte à diriger la Commission européenne ». C’est un désaveu : Orbán retire ainsi son soutien au candidat bavarois du PPE. Mais pourquoi maintenant, cette décision qui semble à l’évidence se profiler ? Pour l’essentiel, on peut avancer que le Fidesz s’est coincé lui-même dans sa conduite de rupture avec le PPE, puisqu’il s’y conduit en opposant tout en désirant y demeurer ! Et, corollaire à cette conduite : les sondages peu encourageants pour le Fidesz. Alors, autant franchir le Rubicon vers l’extrême-droite…
On se souvient qu’en février dernier, le Fidesz avait arboré de grandes affiches qui montraient les visages caricaturés et grimaçants comme des fétichistes de la jarretelle, hin hin, de Jean-Claude Juncker et George Soros, avec une légende du genre : « Ce que Bruxelles vous cache ». Ç’a été la goutte de vulgarité populiste qui a fait déborder le pot de chambre européen. Beaucoup de partis membres du PPE ont alors demandé l’exclusion du parti hongrois (voir l’article d’Eurojournalist). Manfred Weber avait donc décidé de mesures de suspension, assorties de trois exigences : la fin de cette absurde campagne d’affichage, le maintien de l’Université européenne fondée par Soros, et les excuses contre des personnalités du PPE qu’Attila-Orbán avait qualifiées d’ « idiots utiles » de la gauche. L’exclusion semblait ainsi évitée.
Mais voici quelques semaines, le climat s’est à nouveau détérioré, et les épées ont ressurgi de leur fourreau.Il est en effet sérieusement question, depuis avril, d’une coalition entre le PPE, le groupe Sociaux et Démocrates et le groupe centriste ALDE (Alliance des Libéraux et des Démocrates pour l’Europe) ; ceci précisément pour empêcher au maximum la formation d’un groupe populiste et d’extrême-droite nombreux et cohérent. Que reste-t-il alors à faire pour le Fidesz ? Il n’a à l’évidence plus sa place dans le groupe conservateur. Pour ce qui est du PPE lui-même, ses membres craignent grandement un départ toujours possible de sa fraction la moins conservatrice vers l’ALDE : et une manière de ralentir ce PPExit, c’est de pousser le Fidesz, plus réactionnaire que conservateur et nullement démocrate-chrétien, à réintégrer ainsi le nid de sa maman-coucou, où sont déjà couvés ses petits camarades para-et circumfascistes.
Ce futur groupe des droites radicales pourrait s’avérer fâcheux en formant – malgré toutes les divisions internes de cette droite – une forte minorité, qui pourrait exercer un blocage embarrassant à l’égard des possibles majorités (centre droit ou centre gauche) ; d’autant plus que sans Brexit, un nombre respectable de députés britanniques intégreront sans doute ce groupe.
Mais Orbán continue à afficher lourdement ses bonnes » relations avec le FPÖ autrichien et Matteo Salvini, ainsi qu’avec le parti de Berlusconi, Forza nova, et Les Républicains français. Pour les premiers, le souci de respectabilité du Fidesz fait que son chef ne lâche plus les guêtres de ces partis qui exercent les responsabilités du pouvoir dans leur pays. Et cependant, les alliances du parti de Salvini avec des partis de la droite radicale qui ne les exercent pas (l’AfD ou le RN) contrarient Orbán, pour cette raison précisément… Pour ce qui concerne les deux derniers, le Fidesz continue à considérer qu’il s’agit d’alliés susceptibles de l’aider dans son contre-projet pour l’Europe, notamment pour ce qui concerne le volet anti-immigration. Peut-être a-t-il raison, hélas…
Que faire ? Voter le 26 mai, chers lecteurs, et voter contre l’extrême-droite !
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