Contrastes au Festival MUSICA

Années 1960 et post-expressionnisme, ce mardi.

Comme Jimmy Page avec son archet : le Talea Ensemble interprète Takasugi à l'Auditorium de FR3 Foto: Rédaction

(MC) – Le matin de ce mardi, l’une des quatre rencontres en partenariat avec la Bibliothèque Universitaire de Strasbourg réunissait Jean-Dominique Marco, le directeur du Festival, Thierry Balasse, directeur artistique de la compagnie Inouïe et Guillaume Kosmicki, écrivain, avec pour animateur Arnaud Merlin, producteur de France Musique. On a parlé des Années 1960…

Le débat a assez bien mis en relief les caractéristiques essentielles de cette décennie là, une décennie folle. Folle de créativité et d’audace tous azimuts, où tout a explosé : en matière de musique, de danse, de théâtre, de littérature… Rien n’a plus été comme avant. La décennie de Jimi Hendrix et du minimalisme, de Xenakis et de La Monte Young, du gigantisme fortuné et du dépouillement ascétique extrême… L’année aussi où, à Woodstock, on a a pataugé dans un bain de boue aux fines herbes et aux champignons. Et où le Capitaine Haddock et Milou ont été relayés sur le sol de la Lune par Armstrong et ses frères lais du triomphalisme yankee : ce qui fait le thème de Cosmos 1969, concocté par Thierry Balasse (avec des compositions de cette époque magique et ultra-violente : Pink Floyd, etc) qu’on a pu déguster hier mercredi et dont il sera reparlé.

Une époque très violente, oui, avec la crainte fondamentale, primaire, métaphysique : celle de la destruction totale de cette fichue planète bleue et the worst fear : fear to bring children into this world, comme le chantait Bob Dylan dans Masters of War. Et c’est bien certainement cette peur essentielle qui explique la fièvre et la soif brûlante de cette décennie.

Cette décennie qui, comme les intervenants de ce débat ne l’ont évoqué que fugitivement, a aussi été celle du développement pharaonique de l’industrie musicale, avec les conséquences gigantesques que l’on sait, le conditionnement de masse par l’entertainment du rock (oui oui) et des variétés planétaires. La décennie où, comme l’a très bien rappelé Jean-Dominique Marco qui citait Pierre Boulez, cette industrie a largement pillé les traditions musicales de cultures autres, détruisant certaines musiques traditionnelles pour les précipiter dans la moulinette de la boîte à rythmes et du business occidental.

Une époque formid’ et sensass’ !  Totalement différente de ce début du 20e siècle auquel se réfère implicitement Sideshow, l’oeuvre de Steven Kazuo Takazuki accueillie par France 3 dans son Auditorium. Takasugi est né en 1960… (voir plus haut). Le Talea Ensemble interprétait cette oeuvre « pour octuor amplifié et électronique » dont l’argument touffu (attractions foraines de Coney Island avec sa galerie de freaks – non, pas ceux de Shelton, ceux de Browning -, aphorismes de Karl Kraus, allusions à l’actualité des années 1900) prennent comme un pudding et engendrent une musique pointilliste et violente, dans une ambiance générale grimaçante et expressionniste. Les musiciens miment sur le devant de la scène l’homme-poisson en intervention chirurgicale, l’éléphant Topsy en train de flasher un max’ (il se fait électrocuter à Coney Island, un fait divers réel que la compagnie Edison a filmé en 1903). Tout cela, ce pointillisme acéré et et cet expressionnisme quasi simiesque, adhérant parfaitement à la causticité de Karl Kraus, brillant chroniqueur de la première modernité viennoise.

Les années 1960, l’expressionnisme viennois et une variante nihiliste du théâtre Nô : des chocs violents, contrastés, et passionnants. Nächstens mehr !

Festival MUSICA : http://contact@festivalmusica.org

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