Espoirs en Europe Centrale

Le Centre de l’Europe n’est pas ce qu’on croit parfois

Jeune vendeuse polonaise de mets traditionnels qui arrachent la bouche Foto: Bouette /Wikimédia Commons/ CC-BY-SA 3.0Unp

(Marc Chaudeur) – On le suggère depuis un an dans Eurojournalist(e) : il n’y a aucune fatalité du populisme et du conservatisme en Pologne, Hongrie, Slovaquie ou République tchèque. Tout bouge, tout s’est remis à bouger. Et il faudra accompagner du mieux possible cette Europe qui, dans un an, ne sera nullement celle qu’en France on croit.

Faut- il qu’un journaliste meure pour que les choses changent ? En tout cas, la victoire de Zuzana Čaputová avant-hier samedi est très spectaculaire. Elle tranche sur plus de dix ans de politique corrompue et populiste où le parti au pouvoir, qui se classe lui-même au centre gauche, était lié avec un parti nationaliste. Madame Čaputová est une ancienne militante écologiste et qu’on qualifie le plus souvent de progressiste. L’accession au pouvoir de cette avocate de 45 ans (voir nos articles précédents) changera-t-elle le pays ? Réellement sans doute, mais modestement : le président slovaque n’est pas un monarque républicain à la française. Par ailleurs, le président sortant est une personnalité admirable à l’esprit ouvert, auquel la Slovaquie doit plus qu’on ne le pense.Mais espérons surtout que les tendances libérales de la présidente n’entraîneront pas, au moins indirectement, les mêmes problèmes que par exemple, dans le pays où se dresse la Tour Eiffel…

En Pologne, c’est l’assassinat du maire de Gdańsk, en janvier dernier, qui a sensiblement fait bouger les consciences et les sensibilités, bien qu’à un degré moindre qu’à Bratislava. Beaucoup de Polonais ont pris conscience à cette occasion de l’ambiance pesante et délétère, voire souvent menaçante, que le parti au pouvoir, le PiS (Droit et Justice) fait peser dans le pays. Si le parti Wiosna (Printemps !) de Robert Biedroń, anticlérical, gay et « libéral de gauche » n’a pas remporté encore les succès escomptés, il faut rappeler que le parti d’opposition libérale centriste détient toutes les grandes villes et beaucoup de moins grandes : les dernières élections locales et régionales ont largement été un succès pour la Plateforme. En décembre prochain, les législatives revêtent ainsi un importance particulière pour ce qui est du recul annoncé du PiS.

A Budapest, le Fidesz national-populiste pèse si lourdement sur la société, mais aussi sur les institutions démocratiques, qu’on a parfois l’impression qu’il est enraciné là depuis des lustres. Mais non : la Hongrie d’il y a dix ans était toute différente, et aspirera sans doute à redevenir ce qu’il peut être… En ce printemps 2019, le pays a connu de longues et assez graves crises sociales, qui ont montré la fragilité du Fidesz, ce molosse aux pieds d’argile. Y compris dans la ville natale de Viktor Orbán… Les prochaines municipales, à la fin de l’année, réservent de fort belles surprises.

Et puis, il se passe des choses fort savoureuses aussi à Prague, où le président du gouvernement tchèque, Andrej Babiš, dont l’arrogance et le niveau de corruption sont devenus proverbiaux, sera bientôt convoqué devant les tribunaux pour y répondre d’une accusation de détournement de subventions européennes. A suivre absolument ! Dans quelques semaines ou au moins, dans quelques mois, on vivra un grand moment de démocratie judiciaire.

Nous devons lutter avec acharnement contre les tendances de certains médias français (et allemands…) à essentialiser les pays de l’Europe centrale, à les présenter comme s’il y régnait une sorte de fatalité de la corruption, des voyouteries contre les institutions démocratiques et de l’autoritarisme. Eh bien non et non ! Ces pays, dans un an ou deux, seront tout différents. On parie ?

 

 

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