L’Europe de et à Strasbourg (14) : eu-LISA

Pour ce dernier article de la série « L’Europe de et à Strasbourg », Eurojournalist(e) propose de vous présenter l’Agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice, abrégée eu-LISA.

Ces systèmes qui se trouvent au cœur de nos vies... Foto: DARPA / Wikimedia Commons / PD

(Emma Kuhn) – Comme son nom complet l’indique, eu-LISA évolue dans la gestion opérationnelle des systèmes étendus dans les domaines de sécurité, de justice et de liberté. Avant sa création, ces systèmes existaient déjà : il s’agissait de SIS (Schengen Information System, opérationnel depuis 1995), VIS (Visa Information System) et Eurodac (pour les demandes d’asile). Un premier mandat en 2011 a ainsi permis la mise en œuvre de cette agence, qui a démarré ses activités l’année suivante. Sa création résultait de la volonté de centraliser la gestion des grandes bases de données déjà existantes.

Depuis, eu-LISA s’assure essentiellement du bon fonctionnement de ces trois systèmes. Ces derniers doivent tourner en permanence, afin que leurs services soient fournis en continu aux Etats membres de l’Union européenne. L’agence est en fait un de ses organismes et est dépendante de la Commission européenne. Elle est devenue le moteur numérique de l’espace Schengen. Eu-LISA stocke alors les données envoyées par chaque Etat membre dans la base de données centralisées qu’elle gère. Tous les autres Etats peuvent ainsi y avoir accès, faire des recherches, trouver des informations. Les utilisateurs peuvent également être les policiers ou les douaniers par exemple.

Le rôle des différents systèmes – Mais en quoi cela permet-il de maintenir la sécurité en Europe ? « Les systèmes permettent de coordonner les Etats membres au niveau des données », débute Damien Krauth, chef de l’unité Systems Operations Unit. « Imaginons qu’une personne veuille entrer en Europe. Elle fait une demande de visa dans un pays, l’Allemagne par exemple, et pour une raison particulière l’Allemagne refuse. Cette information est centralisée dans la base de données. Avec l’ouverture des frontières, cette même personne pourrait faire une demande en Suède, avoir son accord et ensuite se balader en Europe et rejoindre l’Allemagne. Or, avec ce système-là, lorsque la Suède reçoit une demande, elle peut vérifier dans la base de données si la personne a déjà fait une demande dans un autre Etat et si elle a été acceptée. Si elle a été refusée, la Suède peut consulter l’Etat membre en question pour demander la raison, et peut-être refuser à son tour la personne pour éviter qu’elle ne rentre sur le territoire européen. Donc cela permet d’aider à la sécurité », détaille-t-il. C’est le système VIS qui est utilisé.

Les informations centralisées dans les systèmes gérés par eu-LISA permettent aussi aux Etats d’entrer des alertes lorsqu’une personne est recherchée ou lorsqu’une voiture est volée. Grâce aux données du système SIS, la personne recherchée peut être retrouvée ailleurs dans l’espace Schengen. Sans cela, les policiers ou les douaniers qui effectuent les contrôles n’auraient pas cette information et ne pourraient pas se douter que la personne est recherchée. Néanmoins, l’agence eu-LISA ne participe pas à l’investigation criminelle et ne travaille pas pour autant avec les services de renseignement : elle met les systèmes à disposition, elle s’assure que les données soient sécurisées, mais elle ne les traite pas. « Ce sont les Etats membres qui introduisent les données, qui les modifient, qui les consultent. On n’y a pas accès », précise Ana Maria Andrei, cheffe du secteur Informatique & Architecture Informatique. Eu-LISA fournit ainsi les outils pour soutenir les actions des différentes entités.

Quant au système Eurodac, celui-ci gère le suivi par empreinte digitale des demandeurs d’asile dans l’Union européenne. « Les empreintes digitales sont prises, sont envoyées dans notre système central et par la suite les Etats membres peuvent faire une recherche à partir de l’empreinte digitale pour retrouver la personne concernée dans Eurodac. Ils peuvent voir qu’effectivement il y a eu une demande d’asile, voir l’état de la demande etc. C’est le même fonctionnement que pour les demandes de visas », explique Damien Krauth.

Regard vers le futur et informations supplémentaires – Depuis quelques années, de nouveaux systèmes sont en cours de développement : ils devraient être opérationnels dans les années à venir. Certains notamment remplaceront les tampons sur le passeport par exemple. Eu-LISA est en constante évolution. En 2018, le mandat avait d’ailleurs été revu afin de multiplier les activités de l’agence et de permettre, entre autres, l’interopérabilité. Il s’agit d’un projet donnant lieu à l’interconnexion de tous les systèmes, actuellement indépendants les uns des autres et nécessitant d’être tous gérés de manière individuelle. Le nombre de systèmes, aujourd’hui de trois, s’élèvera prochainement à sept. Parmi ses autres activités, eu-LISA forme les policiers ou les douaniers à l’utilisation des systèmes. Sur son site, elle publie aussi des rapports dans lesquels elle produit des statistiques, comme le nombre de personnes ayant demandé un visa telle ou telle année par exemple.

Bien qu’eu-LISA soit présentée dans cette série comme étant une institution européenne basée à Strasbourg, c’est à Tallinn, en Estonie, qu’elle siège. Son centre opérationnel se situe cependant dans la capitale européenne : c’est là qu’on y trouve l’élément essentiel, c’est-à-dire le data center. Les systèmes centraux y sont ainsi localisés. L’agence dispose également d’un site de secours en Autriche en cas d’incident.

Finalement, les outils que met à disposition eu-LISA permettent « d’activer la collaboration de tous les Etats membres, de manière centralisée sur des données en temps réel, dans les domaines de justice, de liberté et de sécurité », conclut Damien Krauth.

Eu-LISAAdresse : 18 rue de la Faisanderie, 67100 Strasbourg (centre opérationnel)

Création : 2012 (début des activités)

Effectif : 340 employés répartis sur tous les sites, dont 244 à Strasbourg

Budget : 262 millions d’euros (pour l’année 2023)

 

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