Sacrées Journées : la 8ème édition

« Qui que tu sois, viens, viens : même si tu es un athée, c’est ici la demeure de l’espoir » (RUMI)

Préludes aux Sacrées Journées : l'Ensemble soufi albanais Alb Rifai, le Trio juif Zamir et un membre de l'Ensemble russe orthodoxe Kovcheg Foto: marcchaudeur/Eurojournalist/

(Marc Chaudeur) – Depuis 2013, le Festival Sacrées Journées donne à entendre à Strasbourg, en toute fraternité, les sons des spiritualités du monde. Avec certes un recentrage sur les grands monothéismes, depuis ces dernières années. La devise du Festival est « Osons la fraternité » : c’est bien ce que permettent les musiques du monde entier quand elles se mettent à accorder leurs violons en toute bienveillance et en toute lumière.

Les préludes au Festival ont eu lieu samedi dernier. Si en effet, la manifestation elle même se tiendra du 26 janvier au 2 février 2020, cet automne flamboyant nous aura permis d’en entendre les prémices dans la plus belle Cathédrale européenne. Sans que la chose ne semble avoir été clairement thématisée, les 3 ensembles présents proviennent de pays où ont durement sévi l’un ou l’autre totalitarisme : d’Albanie, de Russie et d’Allemagne. Dans le premier, la religion a été radicalement proscrite durant 40 ans ; en Russie, elle s’est arrangée et compromise avec les pouvoirs anti-religieux. En Allemagne, c’est le judaïsme qui a été pourchassé, meurtri, assassiné et qu’on a essayé (en vain) d’éradiquer.

C’est avec plaisir, mais avec un plaisir inquiet que nous voyons évoluer devant nous la magnifique gestuelle soufie et derviche de l’Ensemble Alb Rifai : cet ensemble appartient à la Confrérie Tarika Rifai et c’est le directeur du Service des Arts et Culture de Tirana la capitale qui le dirige. Plaisir et incertitude de l’avenir dans ce pays où les mosquées et les églises, durant plusieurs décennies, étaient transformées en gymnases, et où l’un des établissements les plus fréquentés était le Musée de l’Athéisme…

Entendre l’Ensemble Alb Rifai est un exercice spirituel à soi tout seul. Asseyons nous bien droit, les pieds à plat, respirons, et écoutons. Et partons pour le royaume de la Dévotion – nul n’est besoin d’être musulman pour cela, les (vrais) soufis vous le diront sans que vous le leur demandiez. Version effectivement complémentaires d’une même spiritualité.

Le Trio Zamir (2 chantres dont une femme, et un guitariste) spécialiste des airs liturgiques juifs à travers les siècles, ils participent au projet musical Trimum, et répondent à leur manière (en musique!) à la question : « Juifs, chrétiens et musulmans peuvent-ils chanter ensemble ? ». Question à laquelle la réponse est d’autant plus facile qu’on s’éloigne davantage d’un confessionnalisme étroit, et qu’on construit une spiritualité universelle. Ou bien évidemment, de manière totalement négative, qu’on ne s’en éloigne pas du tout ! En tout cas, pour savoir si on le peut, il faut essayer. Le Trio, entre Rosh Hashana et Osse Shalom, a centré le répertoire de ce concert sur la Paix. La Paix : le mot Shalom signifie, non pas seulement la paix du fauteuil, mais la Paix que nous atteignons quand nous parvenons à réaliser notre être vrai et profond. Et il nous concerne donc tous, goyim aussi bien que juifs.

L’Ensemble Kovcheg de Saint-Pétersbourg, lui, vogue sur son Arche (signification en russe de son nom). L’Arche qui permet de franchir les flots de toutes nos vicissitudes particulières et d’arriver… plus loin. Kovcheg a été créé en 1991 dans la ville de Pierre le Grand où il se produit fréquemment, ainsi que dans toute la Russie. Les 5 membres interprètent des œuvres liturgiques et des chansons d’amour et lient ainsi harmonieusement Eros et Agapè, amours terrestres et amour de Dieu tant ils sont indissociables. Et notamment le chant Oh, vous les colombes : la colombe, c’est l’image de la paix ; c’est aussi celle de l’âme qui s’envole vers l’éternité qu’elle a quittée durant un certain temps – et c’est, dans les textes biblique, un symbole d’amour passionné, ce qu’on oublie trop souvent.

Ce qu’on oublie le plus souvent, justement, ce sont les liens entre Paix, Amour et éternité… Et ces chants magnifiques interprétés séparément, puis, en fin de concert, ensemble et… avec un bel ensemble, s’arrangent pour nous le rappeler, et de quelle manière ! Oui, juifs, musulmans et chrétiens peuvent chanter ensemble, la preuve !

Et ainsi, au fond, voilà ce qui importe véritablement, et peut-être uniquement : « Dans le cœur passe une image : « Retourne vers ta Source » (RUMI).

Festival des Sacrées Journées : programme bientôt disponible sur www.sacreesjournees.eu

Et puis : Le Festival des Sacrées Journées 10, rue du Hohwald 67000 Strasbourg

tél : 03 88 16 31 09 mail : contact@sacréesjournees.eu

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