Série : Qu’attend la Tunisie de l’Union Européenne ? (1)

La Tunisie est le pays arabe où le « Printemps Arabe » a déclenché un processus de démocratisation. Est-ce que les Tunisiens voudraient que l’Europe soutienne cette évolution ? Cheker Berhima a posé la question.

Les quatres premières voix tunisiennes qui expriment leurs attentes vis-à-vis de l'Europe. Foto: Cheker Berhima

(Par Cheker Berhima) – La Tunisie est à la fois loin et proche de l’Europe. Cheker Berhima a donc voulu savoir ce que la société tunisienne attend de la part de l’Union Européenne. En exclusivité pour Eurojournalist(e), Cheker a rencontré des personnalités du monde politique, culturel, économique et aussi des citoyens et citoyennes pour leur poser quelques questions – comment apercevez-vous l’Union Européenne ? Qu’attendez-vous des institutions européennes et des pays occidentaux ? Comment voyez-vous les relations entre la Tunisie et l’Europe ? Le résultat de l’enquête est une série qui commence aujourd’hui sur Eurojournalist(e).

Abdellaziz Belkhodja, écrivain

L’Union européenne est composée de plusieurs des Etats les plus puissants de la planète, or, ce que tout citoyen, qu’il soit européen ou étranger, attend de cette puissance, c’est plus de vigueur dans la lutte contre la corruption, l’injustice et aussi dans la défense des grands principes qui font l’humanité.

Or, le saccage de l’humanité se poursuit partout. Soutien aux terroristes, soutien aux régimes dégénérés et intégristes, soutien aux multinationales qui corrompent les pouvoirs et contribuent ainsi à la misère des peuples et à des richesses aussi indues qu’indécentes, soutien aux attaques de pays pour des raisons géostratégiques ou économiques, bref, tout le malheur de l’humanité se poursuit dans l’indifférence des puissants, dont l’Union Européenne.

Ezzeddine El Anes, franco-tunisien retraité d’Air France

Je vais répondre en tant que franco-tunisien, vivant sur les deux rives, et complètement conscient d’être privilégié, par bien des aspects, ceci étant, je considère l’Union Européenne comme une structure socio-politico-économique incontournable et primordiale pour le développement de la Tunisie et j’attends de cette institution qu’elle participe encore plus activement dans l’enracinement de cette démocratie palpable mais encore fragile. Je me sens bien, que ce soit d’un coté ou de l’autre de la Méditerranée qui sépare mes deux « chez-moi », mais j’aimerai tant les rassembler !

Un « statut privilégié » de l’UE pour la Tunisie, un « plan Marshall », ou toute forme d’aide, sera propice à améliorer les niveaux de vie, et créera les emplois qui manquent aux jeunes, mais pour cela, il ne faut pas attendre qu’il soit trop tard, car, car, si ce n’est pas avec l’UE, cela se fera à notre détriment réciproque, avec d’autres sans aucunes affinités ni liens historiques !

Ghazi Mrabet, avocat et militant

L’union européenne est une force politico-économique indiscutable dans toute la région… Son influence n’a cessé de croître. La Tunisie a pu depuis toujours bénéficier de son soutien et plus particulièrement ces 20 dernières années. Les aides à l’investissement, mais elle aussi a soutenu la société civile dans son action pour plus de libertés.

Nous avons l’impression depuis le printemps arabe que l’UE coopère d’une façon différente. La dégradation continue de l’économie tunisienne a poussé l’UE à cibler son aide en se concentrant principalement sur l’investissement et la transition démocratique. Ce soutien a été précieux mais je reste convaincu que cela sera plus efficace en finançant directement des projets économiques et sociaux dans les régions défavorisées. Le soutien de l’UE aux ONG locales doit être revu et notamment en matière de droits économiques et sociaux. Je propose que l’UE accompagne directement certaines ONG. Nous avons l’impression que le gouvernement tunisien renoue avec les anciennes pratiques dans la mesure où il favorise l’octroi des fonds à certaines ONG sans d’autres. Pour combattre le favoritisme, il serait plus judicieux de coopérer directement avec les ONG qui méritent l’aide directe de l’Europe.

D’un autre coté, je pense que le désengagement de l’UE de l’ALECA devient inéluctable et de se tourner un peu plus vers les pays de la Méditerrané du Sud qu’on associe jamais à ce genre de projet.

Enfin, il est devenu urgent que l’UE augmente sa pression sur les autorités tunisiennes en matière du respect des Droits de l’Homme et des libertés publiques et principalement d’œuvrer à l’abrogation de l’article 230 du code pénal tunisien qui punit les homosexuels à 3 ans de prison ferme. Mais aussi l’abrogation de la peine de mort alors qu’elle vient d’être confirmé par la nouvelle loi antiterroriste. Et enfin l’abrogation de la loi 52 relative aux stupéfiants qui punit le simple consommateur de Cannabis d’une peine d’un an à 5 ans de prison ferme et remplit les prisons tunisiennes du tiers du nombre total de la population carcérale dont la plus part ont moins de 25 ans.

Yassmine Ben Hmida ; 18 ans, bachelière lycée Annabi Bizerte

En tant que jeune bachelière tunisienne, je pense que les interventions de l’Union Européenne dans le projet de reconstruction du système éducatif tunisien n’avaient pas de résultats remarquables, du coup je m’attends à ce que les prochaines interventions soient plus efficaces et adéquates aux problèmes auxquels font face les jeunes tunisiens, non seulement au niveau du programme, mais également au niveau de l’infrastructure usée des établissements scolaires tunisiens.

Je tiens à préciser que les interventions ne devraient pas forcément être matériel, mais peut-être sous la forme de propositions de solutions à ces problèmes et par la suite, adapter tout cela à l’ouverture de nouveaux horizons aux jeunes bacheliers tunisiens pour des études supérieures aux pays occidentaux et ce, en facilitant les démarches d’obtention de visa ou en offrant des bourses d’études etc … Au niveau culturel, je m’attends aussi à ce qu’on encourage plus les programmes d’échange de jeunes ou d’élèves, ce qui sera bénéfique sur plusieurs échelles et pour les Tunisiens, mais aussi pour les jeunes européens.

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