Ce week-end, on parle de la paix

A Djeddah en Arabie Saoudite, environ 30 pays se rencontrent ce week-end pour discuter d'éventuelles voies vers une « paix juste » en Ukraine. La meilleure action depuis février 2022.

Il faut espérer que la rencontre à Djeddah soit le point de départ pour une vraie initiative de paix en Ukraine. Foto: Gregor Rom / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – S’il ne faut pas s’attendre à des résultats spectaculaires de la rencontre à Djeddah, force est de constater que c’est la première fois qu’un nombre important de pays se réunit pour parler d’une paix en Ukraine. Grâce à l’initiative saoudienne, ces pays envoient leur représentants pour discuter non pas livraison d’armes et transfert de milliards, mais de paix. Sans la Russie, en espérant que la Chine enverra un haut fonctionnaire, mais en présence du Brésil, de l’Inde et de l’Afrique du Sud, donc trois pays BRICS, les participants essayeront de lancer le débat nécessaire sur la paix.

Cette rencontre ne sera pas vraiment facile, car déjà la définition d’une « paix juste » posera problème, en vue des intérêts divergents des pays participants. Il faudra considérer cette rencontre à Djeddah sous l’angle du prochain sommet des états BRICS en Afrique du Sud le 22 août qui lui, revêt d’une importance majeure pour la suite.

L’Arabie Saoudite, puissance cherchant actuellement la proximité avec la Chine, a réussi là où l’Occident a échoué – à lancer une première initiative de paix. Mais cette rencontre montre aussi la perte de poids de l’Occident sur l’échiquier politique international. Les grandes décisions se prennent aujourd’hui non plus aux USA et en Europe, mais à Beijing, à Moscou, à Delhi ou à Johannesburg. Les centres du pouvoir mondial ont changé, une paix en Ukraine passe par ces capitales et les Américains et Européens doivent accepter que ce ne sont plus eux qui dirigent le monde.

Parmi les participants, on trouve, outre les Saoudiens et l’Ukraine, les USA, plusieurs pays européens, aussi le Chili, l’Indonésie, l’Egypte ou encore la Turquie. Mais les Européens qui espèrent pouvoir forger une « Alliance pour la Paix » doivent appréhender cette rencontre avec davantage de réalisme. Même si la Chine devrait envoyer un représentant, l’espoir de voir monter la pression sur la Chine pour que celle-ci exerce de son côté de la pression sur la Russie, est irréaliste. Là, il s’agit d’une toute première tentative de changer le discours belliqueux international en remettant la paix à l’ordre du jour.

N’importe le résultat de cette rencontre à Djeddah, on comprend que le perdant de la guerre en Ukraine sera l’Europe. Politiquement, les Européens ne jouent plus de rôle important, la diplomatie internationale sera désormais dirigée par d’autres pays. Les équilibres politiques et économiques fragiles n’existent plus et il n’y aura même plus de grande concurrence entre les anciennes superpuissances, car aujourd’hui, il n’en reste plus qu’une, la Chine.

La Chine est le seul pays capable d’exercer une vraie pression sur Moscou, car la dépendance russe de la Chine est telle que Beijing détient le dernier levier pour empêcher une catastrophe mondiale. Mais la Chine défendra sans doute une autre vision d’une « paix juste » que les participants occidentaux et pour une fois, il faut espérer que les Européens écoutent bien ce qu’il se dit à Djeddah, en faisant par la suite, une analyse réaliste de cette rencontre.

L’attitude de l’Ukraine sera tout aussi importante. Kiev doit maintenant aborder la question de la paix aussi de manière réaliste et à Djeddah, personne ne donnera cher de la propagande ukrainienne qui veut toujours que ce conflit puisse être réglé militairement.

Ce week-end ne verra pas la gestation d’une « Alliance pour la Paix » souhaitée par l’Occident, mais cette rencontre marque le début d’un dialogue sur la paix. La paix est dans l’intérêt du monde entier qui aujourd’hui, souffre déjà à cause de cette guerre qui a fait collapser toutes les structures existantes jusqu’ici. En attendant, il ne faudra pas se réjouir trop vite, car pendant les débats à Djeddah, des drones et bombes continueront à tomber sur l’Ukraine et aussi la Russie et l’escalade de cette guerre terrible ne s’arrêtera pas parce qu’il y a cette rencontre en Arabie Saoudite.

Le monde est en train de changer profondément et Djeddah en est la preuve. L’Arabie Saoudite saura profiter de son nouveau rôle de médiateur entre les mondes et personne ne pourra le contester. En un an et demi, l’Occident n’a pas pu lancer la moindre initiative de paix et face à cette impuissance, il ne faudra pas s’étonner que d’autres assument maintenant le rôle que l’Union Européenne aurait pu remplir. Mais l’Union Européenne n’a plus de poids au niveau mondial, victime de ses propres règlements inefficaces, de sa corruption et de son incapacité de penser et d’agir en Européens. Il va falloir s’habituer à ce nouveau rôle, en laissant les grands organiser la paix en Ukraine. Espérons que Djeddah lance le monde sur une autre voie, celle de la paix.

1 Kommentar zu Ce week-end, on parle de la paix

  1. Parmi tous les États participant à cette rencontre initiée par l’Arabie Saoudite, il y en certains dont le niveau de corruption est sans doute bien supérieur à celui de l’UE. Cela n’empêchera pas ces États de jouer – peut-être – un rôle dans une solution – éventuelle – du conflit Russie-Ukraine. Notons toutefois un absent de marque… la Russie, ce qui en dit long aussi sur la volonté de paix de cette dernière…
    Quant à l’UE, elle n’est pas un État, elle n’a pas d’armée et ces adhérents ne partagent pas une vision commune de ce que doit être l’UE. Partant de là, tout est dit.

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