Des camps de détention de réfugiés en Turquie

Selon un rapport publié par «Amnesty International», la Turquie aurait ouvert plusieurs centres de détention pour réfugiés où elle les met devant un choix terrible.

Ce camp de réfugiés à la frontière entre la Turquie et la Syrie constitue encore la version "luxe" de ce qui peut arriver aux réfugiés en Turquie. Foto: Voice of America, Scott Bobb / Wikimedia Commons / PD

(KL) – Les nouveaux «meilleurs amis» de l’Union Européenne, la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, a une façon singulière de respecter les Droits de l’Homme. Si on doit concéder que la Turquie a accueilli un nombre impressionnant de réfugiés syriens, le traitement qui leur est réservé, donne à réfléchir. Au moins deux centres de détention auraient été installés où les réfugiés sont interdit de communiquer avec le monde extérieur et où on leur donne le «choix». Soit, ils restent internés sans limitation de temps, soit ils se font expulser là d’où ils viennent – la horreur d’une guerre meurtrière.

Selon l’experte pour les questions d’asile d’Amnesty International, Wiebke Judith, son organisation a pu mettre la main sur des photos prises clandestinement dans ces centres – montrant que les équipements dans ces centres proviennent au moins en partie de l’Union Européenne. Toujours selon l’experte, ses homologues en Turquie lui auraient confirmé que les six «centres d’accueil» pour réfugiés syriens que la Turquie veut mettre en œuvre dans le cadre de l’accord avec l’Union Européenne, sont également censés être ce genre de camps d’internement. Question : Est-ce que l’UE, pour arriver à gérer le dossier des réfugiés syriens dans l’espace Schengen, serait en train de financer une sorte de «camps de concentration» en Turquie ?

Pour Amnesty International, la situation est claire : il est inconcevable de coopérer avec la Turquie sur ma question des réfugiés si le pays ne se conforme pas aux accords internationaux – qui prévoient qu’aucun réfugié ne peut être renvoyé dans un pays en guerre où il n’est pas en sécurité. Et l’Union Européenne montre une nouvelle fois ce qu’elle entend par «Droits de l’Homme» – pour ne pas nous sentir molester par les réfugiés qui viennent d’un pays que nous sommes en train de bombarder, nous sommes prêts à soutenir la mise en œuvre de camps de concentration devant les frontières de l’Union.

Mais ces frontières n’existeront plus pour longtemps, car la demande de la Turquie d’accélérer le processus d’adhésion à l’UE se fait de plus en plus pressante. Et puisque les états-membres de l’Union ont surtout horreur que l’on puisse venir piquer notre dinde aux marrons de la table de Noël, nous sommes prêts à tout – y compris l’adhésion de la Turquie dans le «club des 28» qui lui, perd tous les jours un peu plus de son sens.

Il faut se mettre une seconde à la place de ces réfugiés – ils viennent de sortir de leur pays qui est ravagé par une guerre où tout le monde tire sur tout le monde, pendant que la Russie, la Grande Bretagne, la France et les Etats-Unis déversent des tonnes de bombes sur tout le monde. Le pays est devenu un «patchwork», les zones de combat et de contrôle par les différentes milices changent tous les jours et les victimes se chiffrent par millions. Alors, vous venez de sortir de votre pays, meurtri, et on vous met dans un «camp de concentration» où on vous dit soit de rester ad eternam, soit on vous propose de rentrer dans la zone de guerre de laquelle vous venez de vous échapper. C’est inhumain et l’Union Européenne n’a pas le droit de soutenir une telle démarche. Pourtant…

Aujourd’hui, les pays accueillant des réfugiés, se retrouvent à Bruxelles pour discuter de la situation. Est-ce qu’ils risquent de trouver des solutions autres que mathématiques ? Le Luxembourg propose de reprendre 50 000 réfugiés à la Turquie, de les comptabiliser sur les 160 000 que nous n’arrivons déjà pas à distribuer sur les états-membres et de transférer ce problème humanitaire sur des tableaux Excel. Cela ne fonctionnera pas.

Et un moment donné, il faudra aussi réfléchir quant aux causes et aux conséquences. Est-ce vraiment si surprenant que le nombre de réfugiés reste aussi élevé pendant que nous bombardons à tout va le pays ? Est-ce qu’il y a un rapport entre la guerre en Syrie et le fait que les gens fuient massivement leur pays ? Bien sûr que oui – et nous atteignons actuellement le summum du cynisme en finançant des camps de concentration à moins de 3 heures de vol de Paris et de Berlin.

Il faut que l’Union Européenne instaure des systèmes de contrôle en Turquie pour assurer que les réfugiés y soient traités correctement. Mais avant de faire cela, il faudra aussi que nous fassions pareil dans nos propres pays, tout en obligeant les pays de l’est de l’Europe à changer d’optique par rapport à cette catastrophe humanitaire. Décidément, c’est pas Noël pour tout le monde…

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