La France va mieux, mais… va-t-elle bien ?

Alain Howiller sur les perspectives économiques après le changement du gouvernement français.

Est-ce que le nouveau gouvernement français transformera la France en CECI ? Foto: panoramio M. Pinarci / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Par Alain Howiller) – Si les célèbres « petits hommes verts » de cette planète inconnue dont tout le monde rêve(!) s’avisaient de débarquer dans la France de l’après élection, ils ne manqueraient pas, dubitatifs, de se caresser le menton en regardant la scène sur laquelle nouveaux et anciens ténors s’agitent pour le… bien du pays ! On ne sait pas encore vraiment comment le « pays » se sortira de la guerre des tranchées qu’il mène en fait depuis des décennies et s’il a eu la majorité dont il a voulu se doter, il est vrai dans des circonstances particulières (refus de l’extrême droite, abstentions relayées parfois par les bulletins de vote blancs ou nuls !), arrivera à concrétiser la « marche » en avant qu’elle avait promise. Comment ne pas le souhaiter alors que nombre de ceux que des Français décidés ont voulu écarter continuent à ne pas comprendre ce qui leur est arrivé et ne font que rêver de se donner de nouveaux chefs pour revenir au pouvoir dès que possible !

Pour construire le monde qui veut succéder à l’ancien rejeté, il ne suffira pas de vouloir « pourrir la vie » de ceux qui ont déjà creusé de nouvelles fondations, il ne suffira pas de contester la légitimité de ceux que le suffrage universel a désigné alors que sa propre légitimité n’est sorti des urnes de la 4ème circonscription de Marseille grâce (malgré ?) à un peu plus de… 64% d’abstentions. Il ne suffira pas de « dire », il faudra « faire ». Et il ne suffira pas non plus de suivre les appels lancés du haut d’un « minaret-beffroi » du Pas de Calais pour s’engager dans une hypothétique bataille contre des « oligarchies » qui viennent… d’éclater !

Merkel et Schäuble ont compris !… – C’est sans doute ce que rappellera le Président de la République lorsqu’il s’adressera aux parlementaires réunis en congrès à Versailles. C’est sans nul doute ce sur quoi insistera également le Premier Ministre, le 4 Juillet, dans le discours de politique générale qui ouvrira le débat sur sa demande d’investiture. A entendre les propos des uns et des autres, on peut douter de la disposition des opposants d’aujourd’hui, à être en capacité de quitter leurs oripeaux d’opposants d’hier : chacun restera, comme les petits hommes verts (!) pourraient le constater, à camper dans son camp car l’objectif ultime -quoi qu’ils en disent- est de fermer ce qu’ils pensent être une parenthèse et de retrouver rapidement l’exercice du pouvoir. Au Président, à son gouvernement, à sa majorité de démontrer que le quinquennat qui démarre concrétisera leurs engagements.

Si ce devait être le cas, qui peut douter que la France qu’ils laisseraient à leurs successeurs seraient une autre France et sans doute une autre… République ! L’opposition devrait y réfléchir, mais le pouvoir en place aussi si ses représentants veulent éviter de se développer -comme tant de leurs prédécesseurs- en « hors sol » ! Le paradoxe veut que ce soient Angela Merkel et Wolfgang Schäuble qui l’ont le mieux compris : ils sont disposés, malgré leur appétence « austéritaire »(!) à accompagner la politique Macron pour redresser la France. La chancelière allemande a même rappelé : « Ce n’est pas l’Allemagne qui a inventé la règle des 3% ». Elle n’a pas eu la cruauté de souligner que cette règle (fixée quasiment au « doigt mouillé » !) avait été proposée par… François Mitterrand ! Le commissaire français de Bruxelles Pierre Moscovici (qui… comprend l’allemand) saura-t-il s’en souvenir si besoin en était ?

La moralité c’est bien, l’emploi c’est… mieux ? – En tous les cas les chiffres sur l’emploi en France qui viennent de sortir rappelleront au Président et au gouvernement que, au-delà de la sensibilité des électeurs à la moralisation de la vie publique, le taux de chômage reste en tête des préoccupations des Français. Au mois de Mai, le taux a connu une nouvelle poussée de fièvre : +0,6% par rapport au mois précédent, +0,9% sur le trimestre. En Alsace, après un léger tassement en avril, la « poussée » de chômage a été de +0,1% sur un mois, chiffre du essentiellement à une légère progression dans le Haut Rhin les positions restent stables dans le Bas-Rhin.

Certes au niveau national le chômage a reculé de O,8%, mais à la veille de l’adoption de la loi d’habilitation autorisant le gouvernement à réformer le code (et subséquemment le marché) du travail par ordonnance, les nouveaux chiffres font désordre. Ils n’obèrent pas les ambitions gouvernementales de ramener le taux de près de 10% à 7% vers la fin du quinquennat, la situation économique laissant même envisager un taux se situant, dès cette année, en dessous de 9,5%. La Banque de France, intégrant les signes de reprise de la croissance sur le plan mondial, vient d’estimer que la croissance française pourrait atteindre +1,4% cette année contre 1,3% estimés jusqu’ici. Le taux serait de 1,6% (1,4% estimés précédemment) en 2018 et 2019 (1,5% estimés pour cette année là) (voir aussi eurojournalist.eu du 17 Mai).

Ce qui attend l’Alsace dans le « Grand Est » ! – Bien que le chômage reste ce qu’il est, l’économie française continue de créer des emplois (près de 76.000 postes créés au premier trimestre), les intentions d’embauche (+2% pour l’indice ManpowerGroup) se confirment, l’investissement (+2,9%, mais +3,9% réalisés en 2O16) reste à un certain niveau, les chefs d’entreprise (y compris dans l’industrie) sont plus optimistes, la croissance mondiale (en particulier au sein de l’Union Européenne, en Allemagne notamment) laisse envisager (au contraire de 2016) un redressement des exportations, l’INSEE s’attend à la création de 220.000 emplois (mais contre 255.000 créés en 2016) cette année. L’optimisme est revenu chez les chefs d’entreprise qui s’attendent à une rentrée positive, toujours alimentée par un effet Macron.

Dans le « Grand Est » la Banque de France, Direction Régionale de Strasbourg, relève dans son enquête mensuelle datée du mois de Mai : « D’après les chefs d’entreprise du Grand Est interrogés ce mois-ci, la production progresse nettement en mai, au même titre que les livraisons très soutenues, après correction des variations saisonnières. La demande affiche également un net rebond sur l’ensemble des marchés. Les carnets s’étoffent légèrement. La hausse des prix des matières premières ralentit régulièrement alors que les prix des produits finis évoluent peu. La production devrait conserver un bon rythme à court terme. Conformément aux attentes exprimées en avril, l’activité et la demande s’affichent en hausse dans les services en mai. Les perspectives à court terme restent prudemment ancrées autour des niveaux actuels, avec des progrès limités. »

« Marche » ou « course » au progrès ? – Echaudés par l’évolution en dent de scie d’une économie française qui s’échine souvent de déjouer (dans un sens comme dans l’autre !) les prévisionnistes restent prudents malgré des signes positifs : harcelés par les « Cassandre » de la politique-fiction, ils redoutent une mobilisation de la rue contre les projets gouvernementaux de réformes.

Les petits hommes verts dont je parlais d’entrée suivront avec intérêt l’éternel confrontation entre les tenants de ce qui est -voire de ce qui a été- et ceux qui veulent poisser vers une « France en Marche ».

Cette dernière, dirigée par un « chef » dont l’étoile et la baraka ont été exemplaires jusqu’ici, a bien l’intention de remporter la course au progrès ! Les semaines qui viennent nous donneront déjà, vacances ou pas, d’intéressantes indications. Pour reprendre le titre d’une ancienne émission populaire de télévision : « Deal or no deal ? ».

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