L’escalade suit la logique de la guerre

Les terribles images de la petite ville de Boutcha montrent clairement que la guerre en Ukraine entre dans une nouvelle dimension. Et le pire est encore à venir.

La réalité de la guerre et pourtant, nous ne vous montrons pas les pires photos... Foto: AP Photo/Serhii Nuzhenko / Wikimedia Commons / no licence

(KL) – Les images des barbaries russes commises à Boutcha et ailleurs, choquent le monde. Jusqu’ici, il s’agissait d’une « guerre anonyme », avec des images certes inconfortables, mais la boucherie à Boutcha perturbe ceux qui réclament depuis des semaines, une extension de cette guerre. Mais ils pensaient quoi ? Que l’armée russe allait se contenter de planter ses chars dans la boue ukrainienne ? Que les Ukrainiens allaient se limiter à orner ces chars de fleurs ? Non, en Ukraine, il s’agit d’une « vraie » guerre, avec des crimes, des brutalités, des violences et la mort. Et ceux qui s’excitent à l’idée que nos pays puissent intégrer cette guerre comme partie prenante, devraient regarder ces images attentivement. Les morts sur la route de Boutcha, sont-ils vraiment heureux d’avoir pu laisser leur vie pour la patrie ? Leurs familles, sont-elles heureuses de compter un héros dans leurs rangs ? Ou est-ce qu’il aurait mieux valu de vivre encore quelques années ?

Le monde est en train d’organiser un « remake » de 1914 et de 1939/40. Avec les mêmes mécanismes d’escalade, cette guerre prend de plus en plus d’ampleur. D’une côté, un dictateur ayant perdu tout sens des réalités, d’autre côté un président qui n’hésite pas à déclencher la IIIe Guerre Mondiale pour sauver son pays. Et nous avons été tous bercés par la propagande des deux côtés qui publie des chiffres peu plausibles concernant les victimes. Pour montrer que tout se passe bien, les deux côtés publient des chiffres extrêmement faibles, le vrai nombre de victimes doit se situer bien au-delà des chiffres publiés.

Et du coup, les images de Boutcha nous montrent la vraie nature de cette guerre. Une guerre, c’est une mort sale, dans la peur, dans la solitude, dans la douleur. Des citoyens lambda se transforment en bouchers qui commettent les pires d’atrocités. Il n’y a rien de noble à cette guerre, rien de héroïque, rien de positif. Mais au lieu de tout mettre en œuvre pour stopper cette folie, le monde entier s’efforce à rajouter couche sur couche.

La grande inconnue dans cette guerre est Vladimir Poutine. Visiblement, le « tsar » s’était totalement trompé sur la capacité de son armée de mener une « blitzkrieg » en Ukraine. Militairement parlant, cette invasion russe est un cuisant échec. Mais cela ne veut pas dire que Poutine soit prêt à terminer cette terrible guerre. Tout ce qu’il fait, c’est s’organiser à nouveau, cette fois avec l’objectif réduit qui consiste à la prise définitive du Donbass, de la Crimée et de la région d’Odessa. Les villes du nord, à commencer par Kiev ou les villes de l’ouest comme Lviv, subiront encore des attaques par des missiles, mais les troupes russes seront désormais concentrées dans le sud et le sud-est de l’Ukraine.

C’est à la communauté internationale de réagir à cette escalade. Comment peut-on encore commercer avec la Russie après des horreurs comme à Boutcha ? Tous les jours, l’Occident achète du gaz et du pétrole russe et permet ainsi à Poutine et la Russie, de continuer cette guerre. Le moment est venu d’isoler à 100% la Russie et l’argument que les sanctions doivent faire mal aux dirigeants, en ne pas détériorant les conditions de vie des Russes, est devenu obsolète. Les Russes, dans leur majorité, soutiennent Poutine et cette guerre et le narratif qui veut que cette guerre soit « celle de Poutine » est faux. C’est la guerre de la Russie et des Russes et si jamais ils n’en veulent pas, ils n’ont qu’à se débarrasser du tyran. D’ici là, les sanctions doivent frapper tout le pays et ses habitants.

C’est le propre des grandes guerres, elles n’épargnent pas les populations civiles. Les bombes que les nazis avaient jetées sur Coventry, ont surtout tué des civils. Les bombes que les alliés avaient jetées sur Dresde en 1945, ont tué la population civile, celle qui avait permis à Hitler de prendre le pouvoir et de commettre ses crimes contre l’humanité. Personne ne dirait aujourd’hui qu’il s’agissait de la « guerre de Hitler ». Et comme la IIe Guerre Mondiale était la « guerre de l’Allemagne nazie », la guerre en Ukraine est la « guerre de la Russie poutinienne ». Il n’y a donc aucune raison de tenter le grand écart, en « punissant » la caste politique russe, mais en épargnant la population russe qui, majoritairement, acclame Poutine.

Tous les politiques occidentaux qui voudraient que l’Occident devienne une partie prenante de cette guerre des nationalismes, devraient obligatoirement faire un tour à Boutcha, pour nous dire après si mourir pour la patrie est vraiment si « doux et honorifique ». A voir les images, il s’agit plutôt d’une mort très sale et triste.

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