Les différentes guerres de Recep Tayyip Erdogan

Le président turc Recep Tayyip Erdogan continue sa guerre sanglante contre les Kurdes – ce qui jette un doute sur ses véritables intentions. Est-ce que la Turquie peut réellement être un partenaire européen ?

Ici, dans le triangle "Turqie - Syrie - Irak", Erdogan mène sa guerre - non pas contre le Daesh, mais contre les Kurdes. Foto: http://veimages.gsfc.nasa.gov 5370//SWAsia/A2003122.0800-250m / Wikimedia Commons / PD

(KL) – La Turquie affiche un comportement étrange ces jours-ci. Le nouveau meilleur ami de l’Union Européenne dont l’UE espère qu’il puisse résoudre la question des réfugiés syriens à notre place, mène une guerre sans merci contre les Kurdes qui eux, pour l’instant, représentaient les seuls à vraiment combattre le «Daesh», ce qui n’est pas exactement le cas d’Erdogan toujours soupçonné de commercer avec le «Daesh». Tandis que la Turquie continue à fermer les deux yeux devant les nombreux occidentaux qui rejoignent les rangs du «Daesh» via la Turquie, a tué le week-end dernier 28 combattants du PKK kurde. L’Europe serait bien conseillée de remettre en question les promesses faites à la Turquie en amont des élections législatives au pays.

Qui est le vrai ennemi de la Turquie ? Actuellement, on pourrait avoir l’impression que la Turquie se bat contre tout le monde, la Russie, les réfugiés, les Kurdes, mais qu’elle continue à laisser la main libre au «Daesh». Au lieu de museler l’organisation terroriste qui sévit juste devant la frontière syrienne-turque, l’armée turque a encerclé le quartier «Zap» de la ville de Silopi (sud-est de la Turquie) pour y tuer 28 combattants kurdes. En toute occurrence, la Turquie considère qu’il convient de combattre ceux qui combattent le «Daesh», ce qui revient à un soutien implicite de cette organisation terroriste. Est-ce vraiment acceptable pour un potentiel candidat à l’adhésion à l’Union Européenne.

Erdogan joue une partie de poker politique qui risque de coûter cher à l’Europe. En contrepartie pour la promesse de stopper l’afflux de réfugiés syriens vers l’espace Schengen, l’UE a promis 3 milliards d’euros à la Turquie, tout comme la facilitation d’obtention de visas et l’accélération des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE. Entre temps, le monde a découvert que les structures d’accueil destinées aux réfugiés syriens en Turquie, ressemblent en partie plus à des camps de concentration qu’à des centres d’accueil et le comportement d’Erdogan vis-à-vis des Kurdes est tout simplement inacceptable.

Même les dirigeants du parti pro-kurde HDP sont menacés par Erdogan – qui compte leur intenter un procès à Ankara et ce, malgré le fait que le HDP ait été élu par environ 10% des Turcs lors des récentes élections législatives. Le HDP avait renouvelé sa demande d’autonomie pour les territoires kurdes, ce qui constitue pour Erdogan une violation de la constitution turque. Par conséquent, il a déclenché la levée d’immunité des élus du HDP pour pouvoir leur faire un procès dont le résultat semble acquis d’avance : «Il faut qu’ils paient», a décrété Erdogan, «cela facilitera la lutte contre le terrorisme».

Mais de quel terrorisme parle Erdogan ? En Turquie, le commerce avec le «Daesh» fleurit, les soutiens des terroristes fondamentalistes peuvent transiter la Turquie sans être molestés, tandis que l’armée turque exerce une sorte de «terrorisme d’état» contre les Kurdes, affaiblissant par ce biais, les efforts de la coalition internationale de combattre «l’Etat Islamique» – à quoi joue donc le président turc ?

Face aux difficultés que rencontre l’Union Européenne actuellement, face à la scission entre les pays de l’est de l’Union et les pays de l’ouest, face à la menace de la Grande Bretagne de quitter l’Union, le rapprochement entre l’Union et la Turquie pourrait s’avérer fatal pour l’Europe institutionnelle. La Turquie de Recep Tayyip Erdogan n’a pas sa place dans l’Union Européenne et il faudra être très vigilant dans les coopérations – si l’UE persiste à vouloir laisser régler la question des réfugiés syriens par Erdogan, elle risque de se rendre coupable de ce qui peut leur arriver en Turquie. Ankara s’éloigne de plus en plus des valeurs européennes et se disqualifie ainsi d’une potentielle adhésion. Peut-être faudra-t-il le dire clairement à Erdogan ?

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste