Allemagne – les Länder de l’Est en vedette

Trois élections pour un jubilé - la rentrée politique sera marquée par des élections régionales dans des Länder de l’ancienne RDA.

Dimanche, la Saxe élira son nouveau Parlement qui siège ici à Dresde. Foto: Kolossos / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(Par Alain Howiller) – Dans quelques semaines à peine, les projecteurs se braqueront à nouveau sur les cinq «nouveaux Bundesländer» pour fêter le 25ème anniversaire de la chute du Mur de Berlin. L’occasion sera belle pour dresser le bilan d’un jubilé contrasté qui se sera invité dans l’actualité bien avant les dates prévues : Gera, jadis l’une des villes-phares de Thuringe sur le plan de la culture notamment, s’est déclarée en faillite et la Ministre-Présidente du Land Christine Lieberknecht (CDU) a lancé un appel angoissé pour que l’Etat Fédéral aide les cinq länder de l’ex-DDR à faire face financièrement à leurs activités culturelles «qui servent de Luther, Bach, Liszt, la mémoire de l’ensemble de la Nation». Dans quelques jours -Dimanche le 31 Août- la Saxe renouvellera son Landtag, précédant de peu les élections régionales qui auront lieu dans le Brandebourg et la Thuringe pour renouveler les assemblées respectives de Potsdam et d’Erfurt.

Il s’agira là des premiers test régionaux en «grandeur nature», depuis la mise en place d’une «Grande Coalition» dont les responsables continuent à être bien perçus par l’opinion puisque selon le dernier «baromètre politique ZDF», aussi bien Angela Merkel, Frank-Walter Steinmeier (SPD), le Ministre des Affaires Etrangères, Wolfgang Schäuble, le Ministre CDU des Finances et Sigmar Gabriel, le Vice-Chancelier SPD, Ministre de l’Economie continuent à être placés dans cet ordre en tête des «politiques» les plus appréciés d’Allemagne, chacun gagnant respectivement 2,6, 2,1, 2,8 et 1,3 points par rapport au baromètre du mois de Juillet.

Saxe, Brandebourg et Thuringe. – Certes, il sera sans doute difficile de tirer des conclusions sur la perception que les électeurs allemands auront de la politique menée sur le plan national, tant les situations rencontrées dans les trois «Länder» sont éloignées -voire atypiques- de la conjonction CDU-CSU-SPD créée à Berlin par la «GroKo». La Saxe est dirigée par une coalition «CDU – Parti Libéral FDP», le Brandebourg est dirigé par une coalition «SPD – Die Linke», tandis que la Thuringe est gouvernée par une coalition «CDU – SPD». Bel exemple de cette diversité, propice au compromis, dont rêvent bien des «politiques» français! 14 partis sollicitent les suffrages des électeurs de Saxe : ils seront 11 au Brandebourg et 12 en Thuringe !

Et selon les sondages, tout porte à croire que la Saxe continuera à être dirigée par la CDU qui cependant subit une érosion, en plus, elle risque fort de perdre son «allié naturel» -le FDP- qui pourrait ne pas franchir le seuil des 5% de voix nécessaires pour permettre son retour au Landtag de Dresde. Si tel devait être le cas, le Ministre-Président sortant -Stanislaw Tillich- devra négocier un partenariat avec le SPD, les Verts (peu vraisemblable) voire avec le parti eurosceptique AfD («Alternative für Deutschland»). Une coalition avec le parti d’extrême droite «NPD», qui retournerait au parlement régional où il avait déjà 8 élus, est exclu tandis qu’une alliance avec «Die Linke», le parti d’extrême gauche, paraît peu vraisemblable.

En Thuringe, le premier Ministre-Président de «Die Linke» ? – Dans le Brandebourg où l’AfD pourrait également entrer dans le Landtag, la coalition actuelle (SPD – Die Linke) pourrait être reconduite, a souligné le Ministre-Président sortant – Dietmar Woidke (SPD). A moins que Die Linke, qui selon les derniers sondages a perdu 5 points dans les intentions de vote, continue de s’éroder au moment où la CDU régionale gagnaient : ira-t-on, dans ce contexte, jusqu’à un renversement d’alliance du type «GroKo» ? En Thuringe, où la présidente CDU – Christine Lieberknecht- subit l’impact de l’incapacité de ses services d’avoir su empêcher d’agir une cellule terroriste («NSU» pour «Nationalistischer Untergrund», auteur de 9 crimes racistes et de l’assassinat d’une policière, actuellement devant la justice), mais les sondages placent la CDU en tête, et les observateurs donnent de sérieuses chances à une reconduction de la «GroKo» locale à moins qu’on assiste à un renversement en faveur d’une coalition «Die Linke» (un peu plus de 27% d’intentions de vote contre 31,2 pour la CDU et 18,5 pour le SPD) avec le SPD : la Thuringe serait ainsi le premier Land à offrir une présidence à un représentant de… l’extrême gauche !

Comme on le voit, au delà des raisons historiques, l’Est risque de faire la «Une» de l’actualité à plusieurs reprises, d’autant qu’au fil des derniers mois, une polémique s’est enflée, jubilé oblige (!) ; d’une part sur le coût réel de la réunification et d’autre part, sur le sort qui sera réservé, après 2019 dernière année (en principe !) de sa perception du «Soli», l’impôt spécial perçu auprès de tous les contribuables pour financer les investissements de «rattrapage» en faveur des Länder de l’ex-DDR. Certains voudraient prolonger l’alimentation de ce fonds et l’utiliser soit à alimenter le budget pour la diminution des impôts, soit au financement des «Länder» en déficit. Rares sont ceux qui prônent sa… disparition pure et simple !

Otto de Habsbourg organise un «pique-nique» pour la liberté ! – En attendant, les médias autrichiens ont «inauguré» la série des articles commémoratifs du «jubilé» en rappelant que le19 Août 1989 a eu lieu, dans le Burgenland, à la frontière austro-hongroise, le «pique nique paneuropéen» organisé à l’initiative de Otto de Habsbourg, alors président du «Mouvement Pan-Européen», avec la complicité des autorités hongroises. Celles-ci permirent à plus de 500 citoyens de la DDR de franchir la frontière autrichienne pour assister au «pique-nique» et, du coup, choisir la liberté : ils abandonneront leur voiture, côté hongrois, près de Sopron, dans ce qu’on appellera le… «cimetière des Trabis» ! Ils seront acheminés à Vienne où la République Fédérale d’Allemagne leur donnera papiers et argent avant de les transporter, par train, à Berlin.

Petit avant-gout de ce qui se passera plus tard mais qui n’empêchera pas, deux jours après cette ouverture de trois heures de la frontière, qu’un jeune garde-frontière de 19 ans abattra un allemand de l’Est de 36 ans qui voulait passer en Autriche. Il faudra des années de traitement psychologique pour que le jeune garde se remette de ce qu’il a pourtant toujours considéré comme ayant été un accident. Quelques jours après -le 11 Septembre- la frontière entre la Hongrie et l’Autriche était ouverte et en un mois, 25.000 citoyens de la DDR empruntaient cette voie pour passer librement à l’Ouest… Le 9 Novembre 1989, le «Mur» tombait !

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