Budget européen : vite !

L’Union Européenne exige des fondements plus solides. Cela passe sans aucun doute par la création d’un budget européen.

Corne d'abondance portée par un ange anonyme, Alsace, 18e s. Foto : Ji-Elle / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0

(MC) – L’un des points de discussion les plus chauds entre Merkel et Macron porte sur la constitution d’un budget européen. Mais pourquoi toutes ces hésitations, surtout du côté allemand ? Les avantages pour l’Europe à disposer d’un budget paraissent pourtant évidents !

Il est déjà tard. Il faut sauver le soldat Europe, avant qu’il ne troque son costume d’officier d’opérette (Salvini, Orban et leurs jumeaux) contre une tenue de campagne et des tanks. Sans doute un grand drame politique et historique se prépare-t-il, et non pas seulement pour les pays les moins favorisés de l’Union Européenne… Il faut agir.

Un budget pour 2021 ? Pour dans 3 ans ? Eh bien quoi ?

Quel remue-ménage ridicule lors des débats sur ce budget… En particulier en Allemagne. Ce qui remue et dérange pour l’essentiel les Allemands, c’est sans aucun doute qu’ils estiment que ce sera encore à eux de payer ; et que par ailleurs, ils n’auront jamais besoin d’un budget extérieur au budget national pour les aider. Erreur, sans aucun doute. Insouciance coupable, en tout cas. C’est là un compte d’apothicaire (pardon pour cette profession relativement honorable, quoique trop souvent poujadiste) : ces Allemands semblent, par souci immédiat d’économie, oublier qu’Alea jacta est et que Sic transit gloria mundi. Il y a là manque de prudence et de clairvoyance.

Il est très frappant que les héros populistes bigarrés et claironnants de certaines nations soient élus partout où se sont produites ces dernières décennies des coupures brutales : l’Europe centrale, l’Est de l’Allemagne, la Bavière (la Haute-Bavière connaît des difficultés structurelles). En Grande-Bretagne, on a introduit un « assouplissement »  plutôt drastique des règles du marché qui, fatalement, a conduit la population à une grande insécurité économique et à une perte de contrôle des gens sur leur propre existence. Conjointement, les inégalités sociales ont beaucoup crû : coupes dans ce qu’il reste de prestations sociales, tandis que l’argent d’ autres se vautre confortablement sur des coussins panaméens et même, s’y reproduit comme un axolotl lubrique. Phénomène analogue aux Etats-Unis, d’ailleurs  : la dégringolade de l’industrie automobile dans cette zone qu’on appelle maintenant Rust Belt a produit les plus bouillonnants partisans de Donald Trump.

En Allemagne même, moteur jusqu’à une date récente au moins de la construction européenne et de sa pérennité, pays champion de l’exportation, à l’économie florissante malgré certains clignotants, un sondage tout récent (mené par l’agence Bertelsmann) nous indique que plus de 50 % des interrogés ne se sentent pas suffisamment protégés des effets collatéraux – réels ou craints – de la globalisation. L’inquiétude monte. Un phénomène qui est loin de n’être que subjectif (il ne l’est d’ailleurs jamais entièrement) ; car rappelons que le taux de pauvreté est important dans ce pays, que le chômage n’y est pas nul, que de redoutables concurrents (Chine…) sont à l’oeuvre, etc etc.

Pour consolider l’Union Européenne, il ne suffit évidemment pas d’y apporter des corrections de détail, même si certains pays sont moins exposés dans l’immédiat que d’autres. Et il ne faut pas se tromper de combat, se laisser égarer par des politiciens qui entretiennent des relations avec la Ndrangheta ou avec Marine Le Pen, championne de tir à l’Arc ; ces combats produiraient de nombreux dégâts d’ailleurs largement imprévisibles. Le fond du problème est assurément très inquiétant ; il faut donc s’attaquer vraiment au problème, soulever le tapis pour en balayer les miettes miasmeuses qu’un Orban, qu’un Salvini et autres y ont déposées, et les remplacer par des étais solides.

Pour ce faire, la création d’un Eurobudget reste la meilleure des solutions. Un budget dont tous les Etats de l’Union Européenne seraient contributeurs, et où les pays en difficulté pourraient puiser pour pallier leurs insuffisances. Avec une facilité accrue, puisque les mesures proposées, notamment par Macron, prévoient une transformation de l’ancien Mécanisme Européen de Stabilité en Fonds Monétaire Européen. Ce dernier serait plus apte à intervenir de manière préventive et remplacerait l’ancien Fonds Monétaire International, ce fichu FMI, trop rigoureux et qui s’est avéré longtemps trop rigide dans le règlement de la crise grecque, perdant ainsi un temps précieux. Précieux pour les populations qui elles, vivent la crise tous les jours…

Sans aucun doute faut-il ainsi mettre en oeuvre un programme ambitieux : un programme d’investissement qui marquerait les esprits et l’histoire de l’Europe – et celle du monde. Un véritable Plan (si, si) apte à produire suffisamment de prospérité dans les zones quelque peu délaissées où, sur un fumier malodorant, fleurissent les chardons populistes – suffisamment pour réveiller le sentiment chez ces populations qu’elles ont leur part à l’augmentation du bien-être qui, jusqu’à présent, n’a atteint que les couches sociales de toute façon privilégiées. Et qu’il leur est possible de prendre réellement en main leur destin, dans une mesure bien plus importante qu’actuellement, au lieu de leur donner le sentiment qu’elles paient sans cesse pour les autres.

Angela Merkel a accepté du bout des lèvres l’idée d’un Eurobudget, revoyant cependant considérablement à la baisse le montant proposé par Macron. En tout cas, un tel budget pourrait égaliser les niveaux de vie des Etats membres, et ainsi, diminuer les possibilités de crises majeures en favorisant grandement leur stabilité et leur compétitivité.
Malheureusement, ni les sources, ni le montant de ce budget ne sont encore réellement clairs… Pour 2021, vraiment ? Il subsiste de grandes incertitudes.

Il faut pourtant travailler à la création de ce budget européen. Car quel autre moyen concret pourrait encore assurer l’unité et la paix ? Des gouvernements populistes assez nombreux sont déjà en place, qui se sont posés comme des silures glanes sur un fond boueux. Il est donc plus que temps. Hâtons nous !

 

 

 

 

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