Economie : deux secteurs dont on parle souvent, mais qu’on analyse rarement

L'agro-alimentaire et l'agriculture comptent parmi les secteurs qui se portent bien en Alsace. Grâce aussi à un travail intense fourni par les professionels.

L'agriculture et l'agro-alimentaire font partie des secteurs qui se portent le mieux en Alsace. Foto: Cec-clp / Wikimedia Commons / CC0

(Par Alain Howiller) – Malgré ces fameux «clignotants au vert» qu’on évoque souvent, ces dernières semaines, pour souligner (voire… provoquer ou conforter ?) une reprise économique en France, les études de conjoncture auxquelles se livre la Banque de France dans sa direction régionale de Strasbourg, ne cessent de constater que c’est la stabilité à un faible niveau qui l’emporte depuis des mois en Alsace. Même si selon la dernière enquête mensuelle publiée : «on attend une hausse de la production industrielle à court terme» et que les «prévisions dans les services tablent sur une légère amélioration d’ici à l’été» ! Bref, pour reprendre le propos que Charles Perrault met dans la bouche de son héroïque épouse de Barbe Bleue, «sœur Anne ne voit rien venir», du moins dans l’immédiat !

Pourtant, deux événements ont attiré l’attention, ces derniers jours, sur deux secteurs dont on parle souvent, mais qu’on analyse très rarement ! Il s’agit d’une part de la publication par «l’Observatoire agroalimentaire Alsace» (1) de l’édition 2015 de son étude sur «Une industrie innovante et ouverte sur le Monde», et, d’autre part, de la signature, dans une ferme (cela s’imposait !) d’un document sur les «orientations stratégiques 2015/2020 pour une agriculture alsacienne compétitive». Le document, signé par le Président et le Préfet de la Région Alsace ainsi que par le Président de la Chambre Régionale d’Agriculture, fixe les stratégies et les dispositifs d’accompagnement concernant les filières végétales, animales ainsi que l’Agriculture de Montagne : il veut notamment dégager des moyens régionaux pour développer l’agriculture biologique (objectif 10% des terres, pour assurer 20% de produits «bios» dans les restaurants des écoles et des administrations), augmenter les surfaces agricoles et favoriser l’installation de jeunes agriculteurs !

Ne pas diluer les spécificités alsaciennes ! – Comme pour souligner les inévitables, et indispensables liens entre les industries agro-alimentaires et le monde agricole, les deux évènements coïncident avec la création de la dénomination «Savourez l’Alsace – Produit du Terroir». L’appellation veut «labelliser», dans la cadre de la «Marque» régionale créée à l’instigation de la «Région Alsace», les produits intégrant un pourcentage minimum «d’ingrédients locaux et de productions agricoles de la région». Si on peut voir dans cet ensemble d’éléments la volonté affirmée de ne pas diluer les spécificités alsaciennes dans l’agrégat qui naîtra, le premier Janvier, du fait de la fusion entre la Lorraine, l’Alsace et Champagne-Ardenne, on peut y voir aussi, l’accent mis sur l’importance de deux secteurs économiques.

Pour ce qui est de l’agro-alimentaire (y compris boissons), la note de conjoncture de la Banque de France relève : «Production et livraisons stables en Avril. Augmentation des commandes sur le marché intérieur alors que l’export ralentit. Les carnets restent proches de la normale. Hausse de la production prévue en Mai… La demande progresse d’un mois sur l’autre, mais reste contrainte par une consommation des ménages peu dynamique, dépendante de la météo… Les effectifs sont stables. L’utilisation des capacités de production devrait légèrement progresser à court terme. Les chefs d’entreprise, encore prudents, font néanmoins état de perspectives encourageantes.»

Un secteur dynamique, des firmes mondiales ! – Pour situer ces prévisions dans leur contexte, rappelons que si l’industrie alsacienne emploie un peu moins de 130.000 personnes dans un peu plus de 5.400 entreprises, l’agro-alimentaire, avec 139 établissements et plus de 15.000 salariés, est le troisième employeur industriel de la région : 33% des entreprises emploient plus de 30 salariés et le secteur compte quelques-unes des enseignes les plus prestigieuses de la branche avec Herta (Nestlé), Mars (avec notamment Wrigley, Pet-Food et Mars Chocolat), Heineken, Tereos Syral, Suchard-Mondelez International, Kronenbourg (Carlsberg), Knorr ainsi qu’un certain nombre d’entreprises «régionales» (6 sur 18) dont les effectifs évoluent entre 200 et 500 salariés. C’est un secteur fortement innovant dont les entreprises, nous apprend l’étude de l’Observatoire agro-alimentaire, investissent en moyenne 8% du chiffre d’affaires annuel : du coup, 84% des établissements ont créé de nouveaux produits ou services en 2014, 61% d’entre eux exportent tandis que leur insertion dans le tissu régional s’exprime, notamment, par le fait que 77% font appel à «des entreprises de proximité pour la fourniture des matières premières» !

9 entreprises sur 10 ont développé des actions de protection de l’environnement depuis 2012 optimisant la consommation d’énergie, valorisant ou limitant les déchets, faisant des économies de consommation d’eau. Le secteur s’appuie sur des actions collectives (présence dans les foires et salons, programmes de formation, évaluations, promotion de l’innovation), accompagnement de projets), soutenues par une organisation efficace de la filière à travers «l’Association Régionale des Industries Alimentaires-Alsace (ARIA)».

Quand l’agriculture pense à son avenir au-delà de… 2016 ! – Ce tissu d’industries agro-alimentaires est une force pour une agriculture régionale qui, avec 6.700 exploitants, emploie près de 4.200 salariés. Le secteur pratique une politique de qualité de produits qui porte ses fruits : plus de 18.200 hectares sont déjà engagés dans l’agriculture biologique, 25% des exploitants agricoles pratiquent la vente directe de leurs produits dont plus de 20 bénéficient de la protection d’un label. Les orientations définies dans le document signé pour la période 2015-2020 dégage des crédits annuels (près de 4 millions plus 10 millions de crédits de l’Union Européenne) pour encourager l’installation de jeunes agriculteurs et favoriser la transmission des exploitations, pour aider à la modernisation des exploitations (bâtiments, unités de transformation et de vente), pour moderniser les outils et maîtriser les coûts de production, pour encourager l’innovation nouvelles variétés), favoriser le développement de structures collectives (mécanisation agricole partagée notamment), pour accompagner des démarches collectives de promotion des produits et particulièrement les produits de qualité associés à la protection de l’environnement.

Alors que se profile une fusion régionale imposée, à laquelle il sera peut-être difficile de mettre un terme, même en cas d’alternance (si, bien sûr, alternance il y aura), en 2017, les responsables régionaux essayent de prendre de l’avance dans la mise en ordre des «affaires d’Alsace», pour s’engager dans la réforme territoriale dans les meilleures conditions possibles. Il reste du travail à faire d’ici à la fin de l’année et d’ici au terme de la structure régionale actuelle ! L’agriculture et l’industrie agro-alimentaire ont engagé plus que leur «introspection» avant l’échéance de 2016 !

(1) L’Observatoire Régional de l’Industrie Agroalimentaire a été créé afin de fournir aux décideurs économiques, aux organismes professionnels et au public, une information régionale et nationale aussi complètes que possible (www.alsaeco.com).

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