Europe centrale : espoirs et branchitude

L’alliance anti-beauf des capitales « V4 »

les hauts de Budapest Foto: Godot13/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/ 4.0Int

(Marc Chaudeur) – Sans doute le fait ne saute-t-il pas aux yeux atteints de conjonctivite des Européens occidentaux, mais force est de le constater : les quatre capitales des pays du « Groupe de Visegrád » (ou VA), en Europe centrale, sont régies pour plusieurs années au moins par des maires opposants aux partis conservateurs-populistes qui eux, gouvernent les États. C’est pourquoi tous les quatre se sont rencontrés à Budapest fin décembre pour envisager un avenir moins déprimant. A l’Université d’Europe Centrale fondée par George Soros, qui plus est.

Que faire, ensemble plutôt que séparément ? Les quatre maires de Prague, Bratislava, Varsovie et Budapest ont conclu un «Pacte des villes libres ». Double bind centre européen ? Si en effet, les gouvernements des pays « de Visegrád » veulent écarter toujours davantage leurs pays de l’Union européenne, leurs capitales, au contraire, veulent les rattacher solidement à l’Europe occidentale et à ses valeurs proclamées d’ « ouverture, de tolérance, de progressisme », comme l’a dit Rafał Trzaskowski, le maire de Varsovie, opposant au PiS qui a par ailleurs subi de nombreuses manifestations de protestation contre sa réforme de la Justice qui voudrait mettre le législatif aux pieds du parti. Et par conséquent, les quatre édiles se sont prononcés ardemment en faveur de la démocratie, de la liberté, de l’égalité et de l’État de droit » conformes aux traités de l’Union européenne à laquelle ces pays appartiennent.

Eh bien oui, mais que faire ? S’il est encore trop tôt pour dresser des constats, les sujets ne manquent pas, qui s’imposent et nécessitent une vraie collaboration entre les quatre capitales – qui représentent 5 millions de personnes, rappelons-le : le climat, la justice sociale, la qualité de la vie à la ville et à la campagne, etc.

La campagne ? C’est là que le bât blesse, d’une certaine manière. Car ces maires, écolos, progressistes, branchés, illustrent assez bien une certaine couche de la population et l’extraction sociologique de son électorat. Cela posera problème ces prochaines années : car se poser comme rempart de la reconquête démocratique accentue le fossé qui sépare dans les 4 pays, bien qu’à des degrés divers, la population largement conservatrice de la campagne et des petites villes de elle des milieux culturellement et socialement actifs des métropoles…

Rafał Trzaskowski (Varsovie, 47 ans ), Matúš Vallo (Slovaquie, artiste et architecte, élu après l’assassinat du journaliste Ján Kuciak), l’écologiste Gergely Karácsony (Hongrie) et Zdeněk Hřib (Prague, un militant du Parti pirate, médecin de profession…), tous élus entre fin 2018 et fin 2019, se sont en tout cas entendus sur l’essentiel : énoncer des propositions positives pour renverser le mouvement d’éloignement des institutions et des valeurs européennes ; installer des échanges intensifs et fréquents entre les quatre villes.

Le premier enjeu clairement énoncé est de taille ; il est objectivement important. Pourra-t-il se réaliser ? Il permettrait certainement d’avancer à pas de géant dans la résolution du « problème Visegrád ». Il s’agit pour les quatre maires de constituer un lobby auprès des institutions européennes pour instaurer un accès direct de leurs capitales aux fonds européens. Cela permettrait bien évidemment de court-circuiter le relais actuel par les gouvernements, et par conséquent, le contrôle de ceux-ci et la mise en acte des menaces explicites qu’ils ont proféré à plusieurs reprises : ainsi, le gouvernement hongrois de Viktor Orbán avait annoncé qu’il couperait les subventions si l’opposition emportait la forteresse de Budapest… Et comme on sait, de nombreuses affaire oint montré à quoi des fonds très importants ont été utilisés : à la corruption et à l’enrichissement de quelques-uns.

Reste ce difficile problème du fossé entre les populations rurales, soumises sans cesse à un clientélisme intensif et à une propagande conservatrice qui les caresses dans le sens du poil. Ces populations ne se sentent guère attirées par le genre de vie citadin et les séductions et turpitudes des grandes villes…

Comme réduire ces divisions, ces dichotomies à l’intérieur des populations ? Le remède n’a pas encore été inventé.

 

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