Impressions Cannes 2022 : compétition & hors compétition

Notre envoyée spéciale Esther Heboyan tire un bilan de la 75e édition du Festival de Cannes et donne ses favoris pour les Palmes qui seront décernées ce soir !

Suspense jusqu'à la dernière seconde - qui remportera les Palmes à Cannes ? Foto: Eliott Charlier / Festival de Cannes

EJ CANNES 2022 klein(Esther Heboyan) – Sur les 21 films en compétition et les 5 hors compétition dans la sélection officielle, je n’ai évidemment pas pu tout voir.

Faute de temps.

Combien de films peut-on inscrire sur son agenda ? Combien d’heures le cerveau peut-il se concentrer sans défaillir ? Combien de critiques peut-on produire sans répéter le contenu du « dossier promotion » ou sans s’inspirer d’articles déjà rédigés, parfois rédigés à la hâte et avec des erreurs. Les Dardenne accuseront les journalistes d’avoir fait du Bénin le pays d’origine de leurs deux protagonistes. Correction apportée pendant la conférence de presse : le jeune garçon est censé venir du Bénin, mais l’adolescente du Cameroun.

Faute de connexion.

Car le site de la billetterie en ligne, accessible à 7h00 quotidiennement, est déjà saturé à 7h01. On a beau insister, s’énerver à cliquer sur les différentes étapes de la réservation, l’écran de l’ordinateur ou du téléphone portable ne veut rien dévoiler. À vos imaginations ! Le récit sera abstrait.

Et faute de vouloir faire le pied de grue au bas des marches.

Faute de ne pas brandir l’affichette de la dernière chance : « Elvis, svp », « Une place pour Elvis », « Elvis ». Ici et là aux alentours du Palais des Festivals, le désespoir de ne pouvoir visionner le dernier film de l’Australien Baz Luhrmann, sélectionné hors compétition, qui ne sera projeté que deux fois, en grande pompe et en présence de l’équipe à 18h45 le mercredi 25 mai au Grand Théâtre Lumière et le lendemain à 8h30 dans la grande salle Agnès Varda derrière le Palais. Question de droits sans doute, de contrats et de profits. Alors que Coupez ! du Français Michel Hazanavicius, film de la cérémonie d’ouverture, également dans la catégorie hors compétition, a eu droit à une diffusion multiple, non que Coupez ! soit plus galvanisant pour les festivaliers ni plus artistiquement réussi que Elvis. Pour les coulisses du showbiz, allez donc regarder… derrière l’écran.

En ce qui concerne la réception des films, les avis sont partagés. Peut-il en être autrement ?

Les uns distribuent des éloges et des étoiles, d’autres des commentaires, quelques spectateurs quittent la salle lors de la projection (Les crimes du futur, Stars at Noon…). On a dit beaucoup de bien de R.M.N. et de Hi-han que je n’ai pas vus.

Sur la terrasse des journalistes au premier étage du palais, un journaliste italien s’est filmé au moins 25 fois sur son téléphone portable pour informer son public que Christian Mungiu méritait la Palme d’or pour R.M.N. Le titre du film, le nom du réalisateur et les mots « Palme d’or » ont été allègrement martelés. Pas besoin d’être licencié ès italien.

Au balcon du Grand Théâtre Lumière, juste après la projection de Tori et Lokita des frères Dardenne, un jeune homme a exprimé son enthousiasme à son ami : « Là, c’est la Palme d’or ! ». Mais sa parole s’est perdue au milieu des applaudissements. En contrebas dans l’orchestre, les Dardenne et leurs acteurs étaient déjà sur un nuage. La très jeune actrice Joely Mbundu émue jusqu’aux larmes.

La sélection officielle a aussi ses ratés. Financement et promotion n’y changent rien. À l’arrivée, les films sont moyennement regardables ou pas regardables jusqu’au bout. Lorsqu’on est déçu par un film en compétition, on ne conçoit pas qu’un Festival aussi prestigieux que celui de Cannes puisse lui attribuer la récompense suprême – cette Palme d’or qui fera ou ne fera pas le destin du film, qui procurera ou non gloire et fortune. Ne l’oublions pas, le 7ème art est une industrie qui doit générer de l’argent. La beauté de l’art, c’est du bla-bla.

Par exemple, le film iranien Leila et ses frères ou le film belge Les huit montagnes ont certes quelque chose à offrir, à dire, mais ils ne mobilisent pas complètement les spectateurs. Et si je m’autorisais à penser que le jury présidé par Vincent Lindon va retenir mes coups de cœur, Armageddon Time de l’Américain James Gray ou Les bonnes étoiles du Japonais Hirokazu Kore-Eda – des œuvres d’une profonde humanité et esthétiquement d’une intéressante maturité. Et si à ma sélection, j’ajoutais Tori et Lokita de Luc et Jean-Pierre Dardenne déjà primés à Cannes (ce qui peut jouer contre eux), et peut-être, peut-être Les Amandiers de Valeria Bruni Tedeschi ? Le prix du scénario pour Decision to Leave du Coréen Park Chan-wook ? Le Prix du jury pour Showing Up de l’Américaine Kelly Reichardt ?

Côté interprétation. Chez les actrices se distinguent Nadia Tereszkiewicz dans Les Amandiers, Alyona Mikhailova dans La femme de Tchaikovsky, Tang Wei dans Decision to Leave. Chez les hommes, Song Kang-ho dans Les bonnes étoiles, Saeed Poursamimi dans Leila et ses frères, Sofiane Bennacer dans Les Amandiers. Il faudrait peut-être inventer un prix d’interprétation Jeunesse pour Banks Repeta et Jaylin Webb, tous deux fabuleux dans Armageddon Time.

Le Jury de la 75ème édition fera connaître ses choix ce soir, samedi 28 mai.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste