Italie – « il sistema » est partout

Après notre série « De l'argent européen pour la Mafia ? » parue en 2023 sur Eurojournalist(e), les résultats de notre enquête se trouvent confirmés par un autre scandale du même type.

"Il sistema", "Un état parallèle" - il est temps que l'Italie mette un terme à la corruption institutionalisée. Foto: Eurojournalist(e) / CC-BY 2.0

(KL) – Comment est-ce que l’Italie pourra sortir de la main-mise sur le pays par « il sistema », cette coopération clandestine mélangeant le crime organisé, la politique, le système judiciaire et la franc-maçonnerie du style « P5 » (qui n’a rien à voir avec d’autres obédiences maçonniques) ? Dans notre série « De l’argent européen pour la mafia », nous avions décrit le fonctionnement de « il sistema » dans le contexte de la construction de gazoducs en Italie, mais le même système fonctionne parfaitement aussi dans d’autres domaines, comme celui de l’agriculture, comme le révèle un article paru dans le média en ligne « Factuel.media ». Là, il s’agit de milliards européens dans le cadre de la PAC (Politique Agricole Commune) et sur lesquels « il sistema » porte son intérêt.

En ce qui concerne les aides agricoles, les sommes en jeu sont encore largement supérieures à celle impliquées dans la construction des gazoducs en Italie. Les 200 milliards d’euros que l’Italie touche d’ici 2026, suscitent un intérêt tout particulier chez les acteurs de « il sistema ». Dans un contexte paysan, « il sistema » fonctionne à la perfection. Dans les petites communes, des membres du crime organisé se font élire maire, peuvent mettre les agriculteurs sous pression et encaisser des sommes faramineuses. Pour « discipliner » des agriculteurs qui ne veulent pas jouer le jeu de « il sistema », le crime organisé utilise des méthodes « classiques » : menaces ouvertes, granges brûlées, bétail volé – « il sistema » sait faire.

Le phénomène touche toute l’Italie, les mafias se déclinant en la Camorra napolitaine, la N’Drangheta calabraise et la Cosa Nostra sicilienne (avec d’innombrables sous-groupes et clans). Comme déjà décrit dans notre série, ces organisations se spécialisent de plus en plus dans les fonds européens et les réponses que la Commission Européenne nous avait fournies l’année dernière, frôlent le ridicule. Tout sérieusement, la Commission nous avait expliqué qu’elle « fait tout pour protéger l’argent du contribuable européen », mais dans les faits, en toute connaissance de cause, elle ferme les yeux devant les agissements de « il sistema ».

Mais puisque « il sistema » comprend des acteurs au plus haut niveau de l’état, au plus haut niveau du système judiciaire, au plus haut niveau des administrations, comment l’Italie peut sortir de cette impasse qui porte préjudice à toute la population italienne, mais aussi européenne ? Ceux qui pourraient intervenir, font souvent partie eux-mêmes de « il sistema », comme on l’a vu récemment avec la tentative du Garde des Sceaux Carlo Nordio qui voulait faire passer une réforme du système judiciaire qui dans les faits, aurait accordé l’impunité aux acteurs de « il sistema ». Heureusement, la résistance contre cette réforme était telle que Giorgia Meloni n’avait d’autres choix que de geler cette réforme dans un premier temps.

Ce nouveau scandale concernant de fortes sommes d’argent européen qui finit dans les caisses du crime organisé, ne fait que confirmer le contenu de notre série. A notre niveau, nous n’allons pas lâcher le cas de Rosario Leo (une plainte soumise par Eurojournalist(e) auprès du Parquet Européen au Luxembourg est en cours d’instruction) et les institutions européennes doivent maintenant réfléchir avec le gouvernement italien comment éradiquer « il sistema » qui gangrène ce pays merveilleux qui est l’Italie. A suivre.

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