L’auto-critique d’Angela Merkel

« Je suis réaliste », disait Angela Merkel en critiquant la fermeture de la « route des Balkans » aux réfugiés. Pourtant, c’était elle qui l’avait forcé au mois de Mars 2016…

Traiter des réfugiés comme des criminels est honteux. Il nous faut une politique européenne en matière d'accueil. Foto: Bundesministerium für Europa, Integration und Äusseres / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(KL) – Au mois de mars 2016, lorsque la « route des Balkans » avait été fermée pour les réfugiés, l’Europe institutionnelle s’autocélébrait pour cette mesure qui visait à stopper l’afflux de réfugiés depuis la Syrie, l’Iraq ou de l’Afghanistan. Pourtant, tous les observateurs et acteurs d’ONG étaient formels – cette fermeture allait condamner de milliers de personnes à périr lors de la traversée dangereuse de la Méditerranée. Et ce qui devait arriver, est arrivé. Depuis le mois de mars, de milliers de réfugiés ont du être secourus en haute mer, de milliers de réfugiés ont trouvé la mort. Mais si Angela Merkel estime que cette fermeture de la « route des Balkans » était une erreur, sa conclusion est pour le moins surprenant. Elle continue à miser sur la Turquie de Recep Tayyip Erdogan.

Angela Merkel s’essaye toujours à la quadrature du cercle. En même temps, elle ne veut pas fermer hermétiquement les frontières européennes, considérant que l’Europe a le devoir d’accueillir des victimes des différentes guerres au Proche et Moyen Orient et en Afrique, elle estime que la fermeture de la « route des Balkans » était une erreur et en même temps, elle prône la « solution » avec la Turquie. Comprendre : on se dédouane à coups de milliards d’euros dans l’espoir que le « président-dictateur » de la Turquie ait la gentillesse de traiter les réfugiés correctement. Comme par exemple dans les différents camps en Turquie où sont concentrés de nombreux réfugiés syriens à qui on propose un choix cornélien – soit, vous restez internés, soit vous acceptez à ce qu’on vous renvoie en Syrie. L’humanisme version Erdogan.

Pourtant, la chancelière est lucide en concédant que la fermeture de cette route n’a pas pu stopper l’afflux de réfugiés. Qui eux, ne sont pas arrivés en Allemagne, mais en Grèce et en Italie. Donc, dans l’Union Européenne. Alors, il convient de faire quoi ? Essayer encore une fois de convaincre des pays comme la Hongrie, la Slovaquie, la République Tchèque ou la Pologne d’accepter des réfugiés pour alléger la charge de la Grèce et de l’Italie ? Rouvrir la « route des Balkans » ? Non, Angela Merkel continue à miser sur cette étrange coopération avec la Turquie qui finalement, n’apporte pas grande chose. Car cet accord permet seulement de « troquer » un réfugié « illégal » contre un réfugié dûment enregistré en Turquie. Sans que l’on sache exactement ce qui arrive aux réfugiés que l’UE renvoie vers la Turquie. Pas très élégant…

En même temps, la chancelière a défendu dans une interview accordée à DIE ZEIT sa politique d’accueil. Tout en blâmant l’Europe et sa politique en matière d’accueil pour les erreurs commises lors de la grande vague d’arrivée de réfugiés en Août/Septembre 2015. Mais concrètement, cela veut dire quoi ?

Concrètement, la chancelière veut intensifier la coopération avec les états de l’est africain. Donc, soutenir des régimes qui comptent parmi ceux où les ONG enregistrent le plus grand nombre de violations des Droits de l’Homme pour que ces pays filtrent déjà en amont les flux de réfugiés – mais la coopération avec ces régimes ne fait que créer de nouveaux réfugiés – les personnes qui sont poursuivis par ces régimes qu’Angela Merkel veut soutenir.

La question des réfugiés risque de fractionner l’Europe pour de bon et on n’arrivera pas à apaiser le monde en renforçant des régimes comme ceux en Afrique de l’Est. Au contraire – toute coopération avec ce genre de régime ne contribue qu’à la déstabilisation des pays dans ces régions. Les exemples de l’Iraq, de la Libye ou de la Syrie devraient servir comme leçon.

A quand une politique européenne qui vise autre chose que de fermer nos portes à ceux qui fuient les guerres et guerres civiles ? Avons-nous réellement oublié le siècle dernier et les drames de ceux qui se sont vus renvoyés en Allemagne nazie ? Il faut établir dès maintenant des corridors sûrs et revoir toute la politique d’accueil européenne. Si nécessaire, en attachant le paiement des subventions européennes à l’obligation d’accueillir le nombre de réfugiés défini par la clé décidée au mois de septembre 2015. Même si c’est triste qu’il faille faire des chantages à des états européens pour que ceux-ci se souviennent des valeurs européennes…

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