Les dessous d’un magazine, avec Or Norme

Or Norme a fêté ses 10 ans, avec son 40ème numéro, le 21 avril. Et, avant d’arriver entre les mains de ses lecteurs, il lui faut traverser des étapes clefs d’une vie de rédaction. Bienvenue en coulisses !

Jean-Luc Fournier, fondateur et chef de rédaction d'Or Norme. Foto: Eurojournalist(e) / CC-BY-SA 4.0int

(Marine Dumény) – Sur la table du salon trône le dernier numéro d’Or Norme. Ouvert et refermé une dizaine de fois. Feuilleté au petit bonheur la chance ou, au contraire, en recherche d’un article précis. Les pages s’assouplissent doucement avec les jours, et la couverture devient un objet de fascination, tant elle est agréable sous les doigts. Pour produire cet élégant dos carré, alliance de travail journalistique et d’un bel objet, le labeur en amont est celui de toute une équipe. Jean-Luc Fournier, directeur de la rédaction, propose, à l’occasion de l’anniversaire du magazine, une immersion dans les dessous d’Or Norme.

Pour un dos carré, la nécessité d’un bon socle – Or Norme a 10 ans. Il est le projet né de plusieurs années d’études et de réflexions. Quand il est lancé en 2010, malgré la crise économique encore omniprésente, le magazine est déjà prêt à prendre son envol. Son public est choisi. Son modèle économique défini. Il trouve le chemin des boîtes aux lettres de particuliers pour être, par la suite, plébiscité et largement distribué. Strasbourg, ville culturelle par essence, a un public tout trouvé pour un trimestriel traitant du sujet. Quant au modèle économique, hors de question pour Jean-Luc Fournier de produire un objet de presse payant : « nous avons choisi l’option qui permet à la fois un respect du lecteur, et de ne pas avoir un produit hors de prix ». Le respect du lecteur, le journaliste, aujourd’hui directeur de la rédaction d’Or Norme, le conçoit simplement : « ne pas proposer quelques articles noyés dans la publicité sous prétexte qu’il s’agisse d’un gratuit ». Un essentiel qui va de pair, dans sa formule, avec un journalisme de qualité. Le lectorat adhère, le dos carré gratuit axé culture de Strasbourg, se positionne et dégage ses premiers gains au bout de 2 ans.

Caresser une toile demande vision et organisation – Les premiers émois des pages du magazine se fondent dans les réunions de rédaction. C’est la première étape pour en arriver à la tenir entre les mains. Le directeur de la publication, le directeur de la rédaction, les journalistes, les photographes… toute l’équipe de rédaction se retrouve une fois par trimestre pour prendre la décision qui permet de jalonner les semaines à venir. « Nous nous retrouvons en général 8 à 10 jours après la sortie du numéro précédent pour en faire le débrief », explique Jean-Luc Fournier. « Ensuite, il s’agit de donner la thématique du prochain numéro. C’est mon travail de la choisir. » Autour de cette base, les journalistes proposent et discutent leurs idées de sujets, ils les défendent. Chez Or Norme, « les numéros de septembre et décembre ont des thématiques générales fixes : le premier marque la rentrée culturelle et le second traite des expos du bassin rhénan (plus largement de Bâle à Metz), il contient également un dossier ‘expo-TGV’ spécifique, puisque les strasbourgeois prennent le train pour voir les expositions parisiennes sur la période de Noël », détaille Jean-Luc Fournier. Les deux autres numéros trimestriels ne s’assortent pas de thématique précise. Le directeur de la rédaction enchaîne : « je tranche ensuite et passe mes commandes selon ce qui cadre au mieux avec l’actualité et le sujet. Le rendu des travaux de chacun est un peu plus de 3 semaines avant la date de livraison. » Les mails arrivent. Les photographies et articles trouvent leurs derniers réglages et corrections. Puis deux agences, Le Cercle et Isaac, prennent le relai pour la maquette et la mise en page. Direction l’imprimerie pour ce travail graphique. Les 188 pages d’Or Norme sortent, en 18.000 exemplaires, pour le plaisir de la couverture toilée du 40ème numéro.

Prendre de la hauteur, et savoir – La recette du succès, c’est aussi savoir ce que l’on fait. Jean-Luc Fournier a fait en 2010 le choix d’un magazine trimestriel gratuit plutôt qu’un journal. « Tout d’abord pour des raisons de moyens financiers. A l’époque, au lancement, pour 64 pages en dos carré à 20 milles exemplaires en kiosques, il fallait débourser 7400 euros (ce prix ne comprend pas les ventes puisqu’il faut ensuite distribuer, payer le kiosquier, la gestion des retours…). Il reste alors 32% du prix de vente, qui ne sont récupérés que 3 mois plus tard seulement, après avoir tout réglé. Seul un gros éditeur pouvait se lancer dans ces conditions dans un format payant ». Quant à choisir un trimestriel, il le justifie de la sorte : « le format quotidien est voué à disparaître ? Et il y a une prise de hauteur et une mise en perspective possible dans un mensuel ou un trimestriel qui ne l’est absolument pas dans un journal ». Aujourd’hui, tout compris, un numéro d’Or Norme demande d’engager 30.000 euros. Les 41 partenaires du magazine règlent à l’année, et en avance, leur contrat publicitaire. Les exemplaires en sont distribués dans 350 points de vente.

Or Norme, ce n’est pas qu’un magazine papier gratuit, mais bien un projet complet. Une édition numérique et l’organisation d’évènements, comme les « Bibliothèques idéales » en septembre, viennent compléter le tableau. Une polyvalence qui permet au titre de s’assurer des appuis solides sur la scène strasbourgeoise. Unique en France par son contenu et ses choix de format, le magazine a encore de belles éditions devant lui. Il ne reste plus, ces informations en tête, qu’à effleurer une dernière fois sa toile pour attendre le suivant.

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