Les objectifs de l’Union Européenne pour les 5 ans à venir

On aurait aimé lire des objectifs ambitieux, concrets – mais les « objectifs stratégiques » de l'Union Européenne pour la période 2019 à 2024 ne font que prouver que l'UE passe à côté d'elle-même.

Au lieu de lancer la refonte de l'Europe, les institutions continuent leur "business as usual" - frustrant. Foto: xinese-v / Wikimedia Commons / PD

(KL) – L’élection européenne 2019 sera décisive pour l’avenir de l’Europe, avaient-ils dit. Nous avons besoin d’un nouveau projet européen, avaient-ils dit. L’Europe sera citoyenne ou elle ne sera pas, avaient-ils dit. Mais les « Objectifs stratégiques de l’Union Européenne » pour la période 2019 à 2024 qui seront débattus la semaine prochaine par les chefs des gouvernements et d’Etat des 28 Etats membres de l’Union Européenne, dont des extraits ont été publiés par l’agence de presse DPA, sont carrément décevants. Une fois l’élection européenne consommée, on continue exactement comme avant.

Le sujet numéro 1 des Européens et Européennes, la lutte contre le changement climatique, ne fait l’objet que d’une déclaration floue, disant que l’UE vise la « neutralité climatique » – tout en « oubliant » de définir une date butoir pour atteindre cet objectif. Même son de cloche en ce qui concerne la question de la migration. « Nous sommes déterminés à trouver une voie en ce qui concerne la politique migratoire interne et d’asile ». Cela fait 4 ans que l’Union Européenne cherche une telle voie, sans succès. Car cette voie est bloquée par les états de Visegrad (Pologne, Hongrie, Slovaquie et République Tchèque) et d’autres comme l’Italie. L’objectif stratégique, traduit en langue claire, veut dire seulement que « nous continuerons à chercher une telle voie, sachant que nous n’obtiendrons jamais l’unanimité sur cette question ».

Pour le reste, l’Union Européenne continue à se considérer comme un agent du grand capital. L’accent politique est mis sur une « politique industrielle ambitieuse, complète et coordonnée », ce qui indique que l’UE continuera comme avant – la sacro-sainte croissance économique continue à passer avant les considérations environnementales. Un changement de cap ? Non, merci. Les lobbies bruxellois préfèrent que rien ne change. Donc, rien ne changera.

Sur seulement 5 pages, l’Union Européenne a défini un programme qui n’est autre que la continuation de la politique menée jusqu’ici. Une politique qui met en avant les intérêts des marchés financiers et des grands groupes économiques, une politique loin des soucis des citoyens, une politique qui ne prévoit en rien une revalorisation de la voix des citoyens dans le processus politique.

Une réforme des institutions européennes qui ont manœuvré dans un patt politique perpétuel ? Rien. Des objectifs sociaux, environnementaux, solidaires ? Rien. Un nouveau projet européen suite au Brexit ? Rien. La modernisation du monde politique ? Rien. La seule modernisation mentionnée dans les « objectifs stratégiques » concerne la numérisation de l’économie – donc, les intérêts du Grand Capital.

Les ambitions de l’Union Européenne se limitent à son propre rôle – les citoyens et citoyennes ne sont qu’accessoires. Evidemment, l’Union souhaite jouer un rôle plus important dans la politique internationale, elle veut être leader en matière de sécurité, elle veut représenter un poids économique – donc, rien de nouveau en Europe.

Difficile de ne pas penser que le monde politique s’est une nouvelle fois moqué des électeurs et électrices. Si l’intégralité du monde politique nous a rabâché ces derniers mois vouloir réformer, repenser, réinventer, refaire l’Union Européenne, un mois plus tard, nous sommes revenus au « business as usual ». Les institutions européennes ne veulent ou ne peuvent pas se réformer depuis l’intérieur, ce qui versera de l’eau au moulin de ceux qui prônent la sortie d’une Union qui n’en est plus une.

L’Union Européenne évite soigneusement une remise en question de son mode de fonctionnement intergouvernemental, donc du format qui nécessite l’unanimité des 28 sur chaque question. Il faut croire que l’UE se plaît dans sa paralysie auto-organisée et refuse de se mettre au niveau des réalités du monde en ce début du 21e siècle.

Avec ce programme qui se situe à des années lumière des préoccupations des citoyens et citoyennes, l’Union Européenne renforce non pas la démocratie européenne, mais tous ceux qui prêchent la fin de l’Europe, les néo-nationalistes et identitaires. Si ce « programme » devait être le dernier mot des responsables européens, il ne faudra pas s’étonner si l’Union explose pendant la mandature à venir. Reste l’amer constat que la politique européenne se comporte exactement comme la politique nationale – elle se moque des citoyens et citoyennes et ne poursuit que les intérêts du Grand Capital.

Le manque d’ambition des institutions européennes est ahurissant. D’ici 5 ans, l’Europe et la plupart des Etats membres de l’Union se trouveront entre les mains d’extrémistes. A ce moment-là, il ne faudra pas se lamenter. Ceux que nous avons élus sont en train de ruiner notre monde et ce, avec notre aval explicite. Si nous sommes stupides au point de voter pour ceux qui agissent ouvertement contre nos intérêts, c’est que nous avons les dirigeants que nous méritons. Là, nous avions le choix. Au lieu de chasser ceux qui ruinent notre continent et le monde, nous les avons reconduits dans leurs fonctions. Regardons alors comment ils prépareront la voie vers les prochaines catastrophes pendant la mandature à venir – visiblement, nous ne méritons pas mieux.

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