Micro européen – et quid des arts ?

A l’occasion de la Foire Internationale de l’Art de Maastricht, les courants artistiques ont-ils disparu au XXIe siècle ? Un éclairage de Christophe de Quénetain, historien de l'art et antiquaire français.

La TAFAF à Masstricht montre du beau, du rare et souvent, du cher... Foto: StagiaireMGIMO / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(Par José-Manuel Lamarque / France Info) – Focus sur l’Art en Europe avec Christophe de Quénetain, expert en art, historien et antiquaire, à l’occasion de la FAF, la Foire Internationale de l’Art à Maastricht, aux Pays-Bas, pour sa 37e édition du 9 au 14 mars.

Ce grand rendez-vous avec 270 galeristes qui viennent de 22 pays, c’est l’occasion pour nous d’évoquer les courants artistiques. Si on en choisit quelques-uns : le néo-impressionnisme, le pointillisme, le symbolisme, le fauvisme, l’art déco, le cubisme, tout cela dans le désordre. Il n’y a plus de courant d’art aujourd’hui ?

Christophe de Quénetain : Effectivement, la notion de « courant d’art » en tant que tel, c’est-à-dire un mouvement dans lequel sont réunis des théoriciens, des artistes, des grands clients, des grands marchands, ça n’existe pas en l’état actuel. Ça n’empêche pas qu’il y ait une très grande création artistique, qui crée des émotions chez le spectateur, mais effectivement, la notion de grands courants artistiques, le dernier en France, c’était celui des Nouveaux Réalistes pour moi…

Mais aujourd’hui, le XXIe siècle ?

CDQ : Le XXIe siècle est une succession d’individualités. Mais dans l’histoire de l’art, ça a toujours été ça, ça a toujours été une succession d’artistes qui faisaient partie de grands mouvements et aussi de successions d’individualités. Niki de Saint Phalle par exemple avec Tinguely, avec tous les nouveaux réalistes, le bleu de Klein. Tout ça, c’est à peu près la même époque. Ce sont les années 60…

Ce qui allait de pair avec les Beatles…

CDQ : Il y avait un côté « swinging », les gens avaient envie de se mélanger. Il ne faut pas oublier qu’à l’époque, on avait 5% de croissance. Vous pouviez avoir un artiste peintre qui était le meilleur ami d’un grand cinéaste, qui lui-même était le grand copain de Pierre Restany, qui avait théorisé le Nouveau Réalisme. Mais c’est vrai qu’en l’état actuel, on ne peut pas dire qu’il y ait eu de grands mouvements qui fédèrent les artistes dans différents domaines.

C’est le creux de la vague ?

CDQ : Je pense. Mais qui dit creux, dit vague…

On parle d’individualisme, mais n’est-ce pas aujourd’hui le fait qu’un artiste qui émerge est pris par l’industrie du luxe ? Il a des commandes et ils n’ont pas le temps de se rencontrer…

CDQ : Effectivement, ils sont totalement accaparés par cette industrie du luxe qui est très exigeante, qui est une industrie qui exige des résultats économiques. Ça devient, pour certains, une forme de business, et c’est pour ça qu’on les retrouve sur des sacs à main, sur des vitrines, est-ce que c’est le but premier, la finalité d’un artiste ? Pour moi, non…

Il n’y a plus l’échange des artistes qui se rencontraient avec des écrivains, des cinéastes, voire des hommes politiques au début de l’autre siècle, je pense à Clémenceau. On échange plus, on ne partage plus ?

CDQ : C’est sûr que des hommes politiques comme Malraux, et Michel Guy qui vivent avec leurs artistes et qui aiment leurs artistes, il y en a de moins en moins. Ça disparaît petit à petit, et j’ai l’impression que l’on devient un produit. Malheureusement, nous devenons tous des produits, mais ce que l’on attend des artistes, effectivement, c’est de nous réveiller, et que nous ne soyons pas tous des choses manufacturées.

La TEFAF par exemple, c’est 7000 ans d’histoire de l’art, c’est le lieu exceptionnel, une fois par an dans le monde, où les artistes, les experts, les conservateurs, les collectionneurs vont se retrouver. Est-ce que quelque part, quand on cherche ces nouveaux courants, ne vont-ils pas naître à l’occasion de ces grands rendez-vous ?

CDQ : Effectivement, ces grands courants sont nés de rencontres et de nos jours, le seul endroit où se rencontrent les historiens, les collectionneurs, les grands artistes, les conservateurs de musée, bien sûr, ce sont sur les foires et particulièrement la TEFAF.

Moi, tous les ans, je vois des artistes comme Jean-Michel Othoniel, ou le sculpteur belge Johan Creten qui restent plusieurs jours à déambuler dans les galeries, à échanger. Et toutes ces choses-là stimulent, intellectuellement les artistes, les historiens de l’art et les marchands.

Parce qu’on déambule…

CDQ : Parce qu’on déambule, on est loin du luxe, et puis on est entouré de beau, on est entouré de choses qui vous surprennent, donc ça exerce obligatoirement une influence sur le futur de toutes les personnes qui font partie de cette aventure.

Et là, je demande l’avis de l’expert Christophe de Quénetain, qu’aimez-vous comme mouvement ?

CDQ : Alors moi, j’aime la modernité. C’est ce que cherche, la modernité à travers les âges, quels qu’ils soient. Donc je peux aimer du XVIIe au XIXe, tous types de pièces, sur tous types de supports. Et par exemple, cette année, je vais rendre hommage au grand décorateur français, Georges Geffroy, dans un stand que nous allons créer et on verra que ce décorateur arrive à réinterpréter son époque préférée, le XVIIIe siècle.

Pour écouter cette émission du « Micro européen » qui est passé comme toujours sur les ondes de France Info, il suffit de cliquer ici ! 

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