« Non ! » à Erdogan en Allemagne

En amont du sommet G20 le week-end du 7 et 8 Juillet, le président turc Recep Tayyip Erdogan veut organiser un meeting en Allemagne.

Tous les dictateurs du monde aiment se montrer comme ça. Foto: Ex13 / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 4.0int

(KL) – Environ 20000 policiers allemands sont mobilisés pour assurer la sécurité du sommet G20 le week-end du 7 et 8 Juillet à Hambourg, une des manifestations les plus onéreuses jamais organisées en Allemagne. Si ces 20000 policiers sont mobilisés pour protéger les puissants du monde d’une attaque terroriste et des milliers de manifestants qui sont attendus dans la ville portuaire au nord de l’Allemagne, une autre menace flotte au-dessus de ce sommet – le président turc Recep Tayyip Erdogan qui souhaite intervenir lors d’un meeting qui serait organisé dans une ville allemande.

C’est le porte-parole du président, Ibrahim Kalin, qui a déclaré que son président souhaitait s’adresser à ses compatriotes en amont du sommet. « Nous comprenons qu’un tel meeting ne peut pas avoir lieu à Hambourg, mais un tel meeting peut aussi s’organiser dans une autre ville ». Et maintenant, toute l’Allemagne et certainement aussi l’Europe, s’attendent à un « Non ! » net et clair de la part du gouvernement Merkel et ce, non seulement en invoquant des prétextes techniques. Il est temps pour une prise de position politique.

Comme l’a indiqué le candidat SPD aux élections législatives du 23 Septembre et ancien président du Parlement Européen, Martin Schulz, il est inconcevable qu’Erdogan « qui emprisonne des opposants et journalistes en Turquie, puisse organiser une manifestation en Allemagne ». Depuis plus de 100 jours, le journaliste germano-turc Deniz Yücel est incarcéré en Turquie sous des chefs d’accusation tels que « soutien d’organisation terroriste » ou « espionnage », après avoir enquêté dans la région kurde. Yücel est l’un des plusieurs dizaines de milliers de journalistes, artistes ou opposants incarcérés en Turquie qui suivent avec angoisse le processus de la réintroduction de la peine de mort voulu par Erdogan.

Le président turc, qui avait encore noirci les relations entre la Turquie et l’Allemagne en interdisant à des élus allemands de se rendre sur la base de l’OTAN opérée par des soldats allemands à Incirlik qui, suite à cet incident (qui n’était pas le premier dans son genre), sera fermée et délocalisée en Jordanie, ne doit pas être autorisé à radicaliser davantage les millions de ses compatriotes vivant en Allemagne et ayant largement contribué (plus de 60% des Turcs vivant en Allemagne avaient voté en faveur d’Erdogan lors de ce référendum) à la victoire d’Erdogan lors de son récent référendum qui lui offrait le plein pouvoir sur le pays.

Bien entendu, il n’existe aucun moyen pour obliger Erdogan de changer sa politique en Turquie qui consiste à ramener le pays laïque de Kemal Atatürk vers le Moyen Age, avec une forte composante islamique. Mais pourquoi devrait un état européen accepter d’offrir une plateforme de propagande et de radicalisation à Erdogan. Déjà maintenant, les tensions au sein de la communauté turque en Allemagne sont grandes. Les supporteurs de l’AKP, le parti d’Erdogan, affichent un nouveau nationalisme turc, même si la plupart, issus de la 2e et 3e génération d’immigrés, sont nés en Allemagne et ont soit la nationalité allemande, soit la double nationalité. Une preuve, s’il en fallait, que les efforts d’intégration de l’ensemble des acteurs concernés, étaient insuffisants. De l’autre côté, il y a de nombreux Turcs modérés et mieux intégrés en Allemagne et un nombre important de réfugiés kurdes – un baril de poudre si le président turc devrait intervenir publiquement en Allemagne.

Aucun état européen ne doit offrir une plateforme à des leaders de systèmes totalitaires. Si les règles de la diplomatie veulent qu’Erdogan puisse venir à Hambourg en sa qualité de convié du sommet G20, il est inconcevable que l’Allemagne (ou un autre pays européen) lui permette d’intervenir publiquement pour stimuler la chasse aux sympathisants du mouvement Gülen désigné par Erdogan comme responsable pour le « putsch » de l’année dernière.

Hormis les raisons politiques qui sont amplement suffisants pour interdire une intervention publique à Erdogan, même techniquement, un meeting ne serait pas envisageable, la totalité des forces de l’ordre formées pour ce type d’intervention pour y assurer la sécurité des participants du sommet G20. Dont Recep Tayyip Erdogan. Mais ces considérations « techniques » ne devraient pas faire la différence. L’Allemagne doit maintenant agir au nom de l’Union Européenne et refuser toute propagande d’un leader qui prône la peine de mort, qui bafoue quotidiennement les Droits de l’Homme et qui s’en prend autant aux ressortissants turcs qu’ètrangers. Une seule réponse pour Recep Tayyip Erdogan : « Non ! »

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste