Pour ceux qui se rendent à Paris…
Toujours en mission pour Eurojournalist(e), j’ai décidé d’aller visiter l’exposition Kimono qui se tient au Musée du Quai Branly en ce moment et jusqu’au 28 mai 2023.
(Valérie Zorn) – Cette exposition n’est pas à proprement parler organisée par les services de conservation du musée des arts premiers, mais par Anna Jackson et Joséphine Roult des services de conservation du département Asie du magnifique Victoria and Albert Muséum de Londres. Si prochainement, vous vous rendez à Paris, voilà une exposition à visiter !
J’ai donc visité cette exposition le 22 décembre, un très bon moment pendant que les Parisiens sont focalisés sur la chasse au cadeau de Noël. Aux alentours du musée, on peut se balader un peu le long des quais et profiter non seulement d’une vue proche et magnifique sur la tour Eiffel, mais en plus, à ce moment on pouvait y admirer les jolies illuminations de Noël.
Je suis allée prendre un déjeuner dans le resto, car j’avais faim et surtout parce que je suis d’un naturel optimiste, puisque chaque fois j’espère que la qualité des plats s’est améliorée. Mais en fait, non. Toujours le même croque-monsieur insipide scandaleusement facturé dix-huit euros, dont l’unique originalité est d’être un carré coupé en quatre dans une assiette rectangulaire. Ne soyez pas optimistes comme moi, allez plutôt déjeuner ailleurs.
L’accueil dans ce magnifique musée est excellent, rapide et souriant. Les petits organes de presse y sont très bien accueillis par des gens curieux et ravis de recevoir des visiteurs. Même pour les étourdies désorientées comme moi qui confondent billetterie et service administratif du musée et qui finissent égarées à la librairie en essayant de pousser une baie vitrée pour entrer et en maudissant Google Maps.
L’exposition Kimono a lieu dans une des mezzanines destinées aux expos temporaires située au dessus des collections permanentes. Contrairement à ce que je pensais, il y avait beaucoup de monde, beaucoup d’enfants puisque le musée organise aussi des ateliers jeune public. Le niveau sonore du musée est un peu élevé et certains passages entre les vitrines de présentation au début du parcours de l’expo sont un peu exigus. Cette magnifique expo Kimono semble un peu victime de son succès et il fallait s’y attendre, parce que ce qu’on nous montre est vraiment très beau.
C’est un vrai bonheur de découvrir l’univers du kimono, ses formes, ses couleurs et aussi son histoire et ses codes sociaux.
Parce que, non, un kimono n’est pas uniquement un vêtement destiné à faire du judo et c’est une belle idée de mettre en lumière ce vêtement dont on entend tellement parler mais que l’on connaît finalement si peu. En outre et au delà de cette exposition, je suis ravie que les grands musées parisiens prennent en considération l’importance sociale de la manière de s’habiller en y consacrant des expos.
Dès les premiers kimonos, on comprend tout de suite que ce vêtement est l’exact opposé de la « fast fashion ». Un vêtement dont la mondialisation a transcendé les lieux et les époques, bien avant les jeans ou les baskets.
Le kimono est le costume traditionnel japonais, inspiré du costume traditionnel chinois des Tang (618-907). Un vêtement fait de bandes de tissus emboîtées, et fermé sur le devant par une large ceinture dont la préciosité indique le rang et le statut social. Manches larges ou serrées, fermeture à gauche ou à droite, un peu comme un code de bonnes manières.
Il s’agit d’un vêtement identitaire et social. Il dit qui on est, d’où l’on vient, ce que l’on fait. Si on est en deuil, ou marié, riche ou pauvre, le kimono est une véritable carte de visite à lui tout seul.
Le développement important du kimono a été favorisé par la stabilité et l’opulence économique de l’époque de l’ère Edo (1603-1868). Une saisonnalité a été introduite dès cette époque dans la mode des kimonos, alors que l’on pense souvent que l’apparition des saisons dans la mode date de la cour de Louis XIV.
Pendant l’ère Edo, les frontières commerciales du Japon était hermétiques, excepté pour les comptoirs hollandais. Ce sont donc ces derniers qui, comprenant l’importance de ce vêtement, beau et pratique, se sont emparés du marché en initiant cette mode en Europe. Les bourgeois hollandais se faisaient portraiturer vêtus d’un kimono, comme un moyen élégant de se distinguer en portant un vêtement immuable qui leur permettait de briller et de paraître.
Le kimono se répand par la suite en France et en Angleterre, dans les salons et boudoirs élégants. Il entre par la suite dans la garde-robe de femmes des années 20, indépendantes et libres, un vêtement perçu comme souple et libérateur, à l’instar du corset. Dans ces années 20, il est le vêtement star de la vague du japonisme qui atteint l’Europe entière. L’expo nous montre des créations de couturiers comme Poiray, Dior, Saint-Laurent, Kenzo, ou Mac Queen, qui copient ou interprètent le vêtement.
Au fil du temps, le kimono devient une icône pop, porté par David Bowie, Madonna, Freddy Mercury, ou les chevaliers Jedi de Star Wars.
Il est intéressant de noter qu’à une certaine époque, les hommes japonais eux-mêmes avaient abandonné le port du kimono, afin, pensaient-ils, de traiter commercialement d’égal à égal avec les hommes occidentaux (les femmes préservant la coutume.)
On ne peut qu’admirer ces costumes, fait de matières différentes, de tissus magnifiques, certains en soie brodée d’or, d’autres en raphia, satin, cotonnade ou encore en fibre de mûrier. On voit des dessins figuratifs ou abstraits, absolument superbes et très bien exposés, à la lumière douce pour préserver ces tissus.
On peut aussi apprécier tout au long de l’exposition, des tissus katazome extrêmement délicats, composés par technique de réserve de blanc. C’est à dire que les motifs sont dessinés à la colle de riz, puis plongés dans un bain de teinture, et enfin, la colle est retirée pour laisser apparaître le blanc initial. Parfois, il y a des successions de travail de réserve de colle et de bains de couleur. Puis, dans certains cas, de la couleur est appliquée et les tissus sont des peintures, pour des résultats d’une créativité inouïe. J’ai été subjuguée par des tons indigos merveilleux extrêmement bien conservés.
Donc, voilà de très bonnes raisons de courir au Musée du Quai Branly à pied, à cheval, ou en voiture, pour aller admirer cette magnifique expo que bien évidemment, je recommande.
Une petite déception néanmoins en boutique, puisque je n’ai trouvé que deux publications. Le catalogue de l’expo et un numéro spécial de Connaissance des Arts. J’aurais aimé plus de choix, niveau prix et contenu. L’exposition méritait plus et le public aussi.
Exposition KIMONO
Musée du Quai Branly – Jacques Chirac
Jusqu’au 28 Mai 2023
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