Vladimir Poutine active son arme la plus puissante

En stoppant les livraisons de gaz naturel à l‘Ukraine, la Russie poursuit sa politique d’escalade. Mais cette mesure pourrait devenir un boomerang.

Le nouveau pipeline de gaz "Nabucco" contourne la Russie - une alternative. Foto: Nabucco Gas Pipeline

(KL) – La Russie est un pays qui n‘exporte que peu de produits finis, mais qui excelle dans la vente de matières premières. Comme ses exportations de gaz naturel. Après que les négociations entre la Russie et l‘Ukraine au sujet des livraisons de gaz aient échouées, la Russie ferme maintenant ses robinets. Tout en menaçant l‘Ukraine au cas où Kiev aurait envie de stopper, à ce moment-là, le transit du gaz russe, par son territoire, vers les pays européens.

La politique de la Russie est perfide. Car le Kremlin espère que ce soient les pays occidentaux qui mettent l‘Ukraine sous pression ou, encore mieux, qui payent l‘ardoise ukrainienne. Pour souligner ce souhait, la Russie a aussi mis en garde les pays de l‘Ouest quant à une possible pénurie de gaz.

Bon, ce n‘est pas la première fois que la Russie prend l‘Ukraine en otage en coupant ses livraisons de gaz. On a vécu cela en hiver 2006 et en hiver 2009. Mais cette fois, le comportement russe pourrait inciter l‘Europe à changer de fournisseur ou d‘intensifier la mise en œuvre des énergies renouvelables. L‘Allemagne, où les énergies renouvelables représentent déjà environ 23% dans le mix énergétique, prouve que cela est possible. Dans la situation actuelle, il ne serait pas une mauvaise idée de se rendre indépendant d‘un fournisseur-partenaire politiquement aussi peu fiable que la Russie. Se passer du gaz russe diminuerait considérablement les options russes pour mettre l‘Europe sous pression.

Vladimir Poutine aura réussi à instaurer une sorte de «nouvelle guerre». Avec un mélange d‘opérations militaires, mais non revendiquées (plus personne ne croit au soulèvement des pauvres Ukrainiens de souche russe qui auraient subi de mauvais traitement en Crimée… plus personne ne croit que la guerre ayant lieu dans l‘est de l‘Ukraine se déroule sans la participation active de la Russie…), un semblant de négociations et des mesures économiques – ce mélange est nouveau. La guerre version 2014. Et Vladimir Poutine apporte une nouvelle preuve qu‘il cherche tout, sauf une désescalade de la situation en Ukraine. Au contraire – pour assouvir ses rêves d‘une nouvelle Russie aussi puissante que l‘URSS, il est même prêt à se couper lui-même des entrées financières. Maintenant, le dernier des supporteurs du président russe devrait avoir compris que Poutine dit «guerre» lorsqu‘il prononce le mot «paix», qu‘il se fiche de l‘équilibre mondial et qu‘il est prêt à en découdre avec le monde entier. Cet homme représente un vrai danger pour la paix dans le monde.

Bien sûr, la Russie s‘est déjà tournée vers la Chine. Le contrat de livraison de gaz vers la Chine est le plus grand projet industriel entre deux pays de tous les temps, d‘une valeur de 400 milliards de dollars. Dans quelques années, lorsque le nouveau pipeline entre la Russie et la Chine sera construit, la Russie coupera de toute manière les livraisons vers l‘Europe – elle ne pourra pas produire assez de gaz pour honorer le contrat avec la Chine ET pour continuer les livraisons vers l‘Europe.

Cette évolution, l‘Europe ne devrait pas la financer. C‘est maintenant qu‘il faut se rendre indépendant de la Russie et de ses ressources – ce qui sera très compliqué car en matière d‘énergie, l‘Europe est tout simplement incapable de parler avec une seule voix. Pourtant, à l‘exception des pays qui misent déjà maintenant de manière conséquente sur les énergies renouvelables, tous les pays européens souffriront de la même manière dès que la Russie aura définitivement fermé ses robinets.

Pourtant, une réaction forte européenne serait indiquée. Car si l‘Europe se plie une nouvelle fois aux attaques russes, Vladimir Poutine se sentirait encouragé à passer la vitesse supérieure.

Sur l‘échiquier mondial, les choses changent. Il y a la guerre en Ukraine et le conflit en Syrie comporte également une dimension ouest-est. Dans peu d‘années, l‘axe politique se décalera vers l‘Est, vers une coopération sino-russe qui affaiblira autant l‘Europe que les Etats-Unis.

Maintenant, il faut que les pays européens cessent de mener une politique énergétique solitaire. La transition énergétique n‘est pas un projet qui doit se limiter à la seule Allemagne, mais désormais, il faudra penser européen. Changer de fournisseur, réduire la consommation de gaz et investir rapidement dans l‘extension des énergies renouvelables. Si l‘Europe s‘avère incapable d‘organiser une telle approche, alors, il ne faudra plus s‘étonner que les anti-européens aient le vent en poupe…

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