Wolfgang Schäuble veut retirer des compétences à la Commission Européenne

Dans une interview avec la FAZ, le ministre des finances allemand déclare vouloir retirer des compétences à la Commission Européenne pour la restructurer. Selon ses désirs.

La Commission Européenne à Bruxelles - la prochaine "victime" de Wolfgang Schäuble ? Foto: Dr. Murali Mohan Gurram / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – Wolfgang Schäuble sait qu’il n’est pas aimé en Europe. Depuis la crise en Grèce et son refus catégorique de discuter d’une réduction de la dette grecque, depuis sont refus de discuter le remboursement du «crédit forcé» que les Nazis avaient pris en Grèce pendant la IIe Guerre Mondiale (sans jamais le rembourser), il sait qu’il représente pour l’Europe, l’image de l’allemand qui veut soumettre l’Europe à la façon de fonctionner allemande. Peu étonnant qu’il souhaite maintenant aussi transformer la Commission Européenne de manière à ce que cela arrange sa façon de voir l’Europe et le monde. Pour le président de la Commission Européenne, Jean-Claude Juncker, il s’agit d’une façon «très allemande» de voir l’Europe.

Pour Schäuble, le fait que Juncker et la Commission aient participé aux négociations avec la Grèce, constitue un dépassement des compétences de la commission. Pour lui, la mission de la Commission consiste à surveiller le respect de la législation du marché intérieur et des règles de la concurrence. Point à la ligne. Et puisque la Commission s’est comporté de manière politique dans les différents dossiers d’actualité, il souhaite retirer ces compétences à la Commission, pour les attribuer à de nouvelles administrations, à l’instar de l’Office de la Concurrence allemand («Bundeskartellamt») – sans toutefois préciser quelle compétences il serait disposé à laisser à la Commission.

La fonction traditionnelle de la Commission Européenne, serait celle de la «gardienne des traités européens», une expression assez vague qui de plus, ne cadre pas vraiment avec les réalités européennes. La définition de Jean-Claude Juncker se rapproche déjà plus de ces réalités – il souligne que la Commission est «politique». Bien sûr qu’elle est politique – elle est toujours la seule instance qui peut initier de nouvelles lois européennes (qui sont ensuite votées par le Parlement Européen qui lui, n‘a pas la possibilité d‘introduire de nouveaux textes par son propre chef). Se pose donc la question comment Wolfgang Schäuble veut réorganiser les institutions européennes.

La crainte de Schäuble est que la Commission puisse se comporter de plus en plus comme un «gouvernement européen», sans pour autant en avoir le mandat. Dans le dossier de la Grèce, Schäuble déplore que la Commission ait participé aux négociations qui, selon lui, incombaient uniquement à la Zone Euro. Est-ce qu’il serait en train d’opérer une scission entre cette Zone Euro et l’Union des 28 ?

En clair, Schäuble veut rétrécir la Commission pour créer d’autres administrations européennes, plus spécialisées, aux compétences réduites – mais on est en droit de se demander si l’Europe n’a pas déjà trop d’administrations et s’il est vraiment nécessaire d’en rajouter d’autres. Pour ce plan, il trouvera sans doute le soutien de David Cameron qui lui, juste avant le référendum sur la sortie de la Grande Bretagne de l’Union Européenne, souhaiterait également couper les compétences de la Commission Européenne.

Et on est également en droit de se poser la question avec quel mandat Wolfgang Schäuble, tellement soucieux que personne ne dépasse ses compétences, se comporte maintenant comme une sorte de l’architecte d’une «Europe allemande». Schäuble est ministre des finances allemand, il n’a aucun mandat européen, il n’est pas ministre des affaires européennes allemand, il n’est pas membre de la Commission, il n’est pas élu européen. Il n’a pas été mandaté par Angela Merkel pour «reconstruire» l’Europe – il prend des initiatives concertées avec personne et peut être ce serait une bonne idée que la chancelière allemande lui montre ses limites avant qu’il ne cause davantage de dégâts à la cohésion européenne.

Car cette approche, un fractionnement des administrations européennes, ne peut en aucun cas constituer une voie pour l’Europe. La seule voie, mais pour cette voie, il faudrait une vraie vision européenne, serait un «gouvernement européen», élu démocratiquement par les 500 millions d’européennes et européens, qui siègerait à Strasbourg, avec un Parlement des «Etats-Unis de l‘Europe». Mais cette vision là, ce n’est pas la vision de Wolfgang Schäuble – qui voudrait organiser l’Europe à l’image de l’Allemagne. Sans se poser la question si les 27 autres pays européens aient vraiment envie de vivre dans une «Europe allemande». Et c’est ainsi que l’idée d’une Europe des valeurs, d’une Europe solidaire, d’une Europe vraiment européenne disparait tous les jours un peu plus.

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