AfD et antisémitisme

J’dis ça j’dis rien, grinça Brandner

Udo Lindenberg. Sculpture de Dieter Portugell, sur le Timmendorfer Strand - un endroit cher à Thomas Mann Foto: Ilikepfannkuchen/Wikimédia Commons/CC-BY-SA/3.0Unp

(Marc Chaudeur) – « Le salaire de Judas » à propos de la réception de l’Ordre du Mérite fédéral par le chanteur Udo Lindenberg : l’AfD s’est encore illustrée par des propos antisémites, avec des « stratagèmes », des métonymies à la Le Pen. Mais c’est particulièrement grave lorsque, comme Stephan Brandner, on occupe un poste important au Bundestag, le Parlement fédéral.

Ni la droite CDU – et même, avec elle, la CSU bavaroise ! – ni le SPD social-démocrate ne s’y trompent, emmenant dans leur sillage Grünen et Libéraux du FDP. Tous s’entendent pour réclamer le départ de Brandner, qui occupe le poste de Président de la Commission Droit au Bundestag. Et s’il refuse de partir ?

Début octobre, Udo Lindenberg, chanteur allemand très célèbre, né en 1946, une sorte de Jacques Higelin aussi assoiffé que son pendant français, mais bien moins jovial, a reçu l’Ordre du Mérite fédéral. Et quelques semaines auparavant, il s’était permis (cela existe encore, pour quelque temps encore) de critiquer l’AfD. Réaction de Brandner, dûment notée dans un tweet : « Pourquoi celui-là se sent obligé de dégoiser contre nous, c’est clair » (sous-entendu : parce qu’il est d’origine juive). ( ” Klar, warum der gegen uns sabbert/sabbern muss “). Et en-dessous : « Judaslohn ».

Décryptons en quelques mots : « salaire de Judas » s’applique éventuellement dans le cas d’une trahison ; mais dans le cas d’Udo Lindenberg, il n’y a nulle trahison. Lindenberg dit ce qu’il pense – très justement – de l’AfD, à savoir que c’est un parti de fascistes, et puis il reçoit sa jolie médaille. Où est Judas ? Dans le cerveau crypto-bestial de cet AfD,  contraint au XXIe siècle encore de marquer son territoire avec sa vessie, il s’agit en quelque sorte de ranger Lindenberg dans le camp des juifs, c’est-à-dire, pourrait-on préciser, des non-antisémites ! Exactement comme le faisaient naguère les nazis, qui parfois rangeaient Marlene Dietrich, mais aussi René Schickele ou Thomas Mann, parmi les juifs. Les meilleurs de ces personnages considéraient cette étiquette comme une distinction honorifique.

Cette prose d’une intense élégance poétique a été précédée, en octobre, d’une autre performance de ce genre : après l’attentat de Halle contre une synagogue, qui a coûté la vie à deux êtres humains, Brandner a reproduit complaisamment un tweet posté par un inconnu, qui disait : « Pourquoi les politiciens traînent-ils donc avec des bougies dans les mosquées et les synagogues ? » (« Warum lungern Politiker mit Kerzen in Moscheen und Synagogen rum ? »). Ce pourquoi il s’est excusé ; mais rebelote 4 semaines plus tard avec cette insulte lâchement indirecte, à la Le Pen.

Maintenant, que faire de Stephan Brandner, membre de l’AfD et Président de la Commission juridique du Bundestag ? On peut seulement lui demander de se retirer, tant son indignité est manifeste. Car malheureusement, il n’existe aucune procédure qui permettrait d’expulser le quidam en question.

Eh bien, si nous étions complètement allemand, nous ferions complètement circuler une Pétition pour demander à Stefan Brandner de bien vouloir accepter de partir et d’aller retrouver sa collection de disques des années 1933-1945, avec pour fleuron … Erika.

 

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