Balkans : la Turquie d’Erdogan omniprésente

Erdogan fête l’échec du coup d’État de 2016… dans les Balkans

A Travnik (Bosnie-Herzégovine) : un graffiti lourd de sens dans tous les Balkans... Foto: Dans/Wikimédia Commons/CC-BY-SA 4.0Int

(Marc Chaudeur) – A quel point la Turquie est présente dans les Balkans, dont plusieurs pays font partie de l’Union Européenne, on peut s’en apercevoir cet été : au moment où le régime islamo-populiste turc festoie dans ce qui dans une certaine mesure, est devenu et redevenu sa banlieue. En Bosnie, au Kosovo, mais aussi en Macédoine du Nord, en Roumanie, en Croatie et en Serbie.

Les 8 et 9 juillet derniers s’est tenu à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine) le sommet annuel du SEECP (Processus de Coopération de l’Europe du Sud-Est).Cet organisme, très méconnu à l’Ouest excepté par les diplomates et les services de renseignement, a été créé en 1996, sur proposition de la Bulgarie. L’un des buts de la SEECP est de faciliter l’intégration des pays de la région dans l’Union Européenne, grâce à d’intenses débats entre pays du Sud Est européen, sur leurs intérêts communs et pour acquérir une plus grande puissance de proposition et de décision. On imagine bien quel rôle moteur la Turquie, l’un des membres fondateurs, joue désormais, grâce à son poids politique et économique – et à sa place clé dans l’OTAN.

Cette année, une petite bouderie lors du Sommet annuel : le ministre de l’Intérieur du Kosovo refuse d’y participer, na. La raison à cela : c’est que le gouvernement de Bosnie a refusé de le recevoir comme le ministre d’un Etat indépendant, et l’a accueilli seulement comme l’un des dirigeants d’une « entité neutre ». C’est qu’au gouvernement bosnien participent les membres de la communauté serbe, de la Republika Srpska ; et les Serbes, après les massacres et tribulations des années 1990, ne sont pas près de reconnaître l’existence d’un Etat kosovar. Ils ne sont d’ailleurs pas les seuls, bien que les raisons de ce refus diffèrent.

Qu’à cela ne tienne : le gouvernement turc , omniprésent dans ces pays, que ce soit sous forme d’un fourmillement d’agents, du ministre de l’Intérieur ou d’un ectoplasme s’insinuant dans tous les débats politico-idéologiques, saura bien trouver une solution ou du moins, un mode de conciliation…

Omniprésente, la Turquie ? Oui. Erdogan himself s’est rendu à Sarajevo et à Srebrenica pour visiter les lieux du massacre de 1995 – mais aussi pour influencer les élections en soutenant le parti SDA, très proche de sa vision du monde. Le parti du premier Président en 1990, Alija Izetbegovic. Mais il y a mieux : la Turquie célèbre l’échec du fameux coup d’État de 2016 dans tous les pays des Balkans ! Qu’on en juge.

Lundi le 15 juillet, des expos de photos, des cérémonies religieuses, des manifestations sportives organisées par les ambassades turques et des organisations-relais ont eu lieu en Bosnie, en Croatie, en Nord-Macédoine et au Kosovo. A Sarajevo, capitale de la Bosnie, l’agit’ prop’ festive a commencé dès le 10 juillet, avec la projection de docus à la sauce Erdogan sur les merveilles de la répression du Coup d’État, il y a 3 ans. Et Erdogan venait de demander, comme il le fait depuis plusieurs mois, l’extradition d‘opposants suspectés d’être des sympathisants de sa bête noire, l’opposant Fetullah Gülen, exilé aux Etats-Unis. Un puissant lobby, l’Union des Démocrates Internationaux, a plus qu’aidé à l’organisation de tout ce kit propagande-pression sur les gouvernements.

Le 13 juillet, après une conférence islamo-pop’, la visite d’une expo photo et un match de foot entre vétérans bosniaques et soldats turcs actifs en Bosnie dans les années 1990, Dzaferovic, membre bosniaque de la présidence collégiale, a déclaré : « Le 15 juillet 2016, la Turquie a donné un bel exemple de démocratie »

Deux yeux sur le visage de la Bosnie-Herzégovine : celui de l’Arabie saoudite, qui finance les mosquées et achète le pays. L’autre, c’est la Turquie. A quel moment la Bosnie sera-t-elle atteinte de
strabisme convergent ? Et plus largement, que peut faire et que fait l’Union Européenne face à cette lourde présence turco-populiste  dans l’ensemble des Balkans ?

 

A consulter : https://balkaninsight.com/

 

 

 

 

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