Bélarus : Maria-le-Coeur a été enlevée !

Où se trouve Maria Kalesnikava ?

Maria Kalesnikava à Minsk Foto; Unkn./CC-BY-SA/4.0Int

(Marc Chaudeur) – Ces derniers jours, elle concentrait ses efforts sur la création et l’enregistrement d’un parti d’opposition qu’elle et d’autres ont baptisé “ENSEMBLE “, avec cette volonté, non de diviser, mais d’unir. L’une des trois Grâces de la « Révolution » en Belarus a été enlevée par des inconnus cagoulés en plein centre de Minsk, hier matin. Dans la capitale bélarusse, on n’a pas dormi beaucoup, cette nuit. Ce nouvel acte de répression policière met aussi l’accent sur l’insigne fragilité du mouvement.

Sur les affiches de l’été, Maria (Macha) avait pour symbole  et emblème le Cœur ; pour les deux autres membres du triumvirat, c’étaient un Poing levé et un V en signe de Victoire. Hier matin, à 10 h 10 (heure locale), nous apprenions que Maria Kalesnikava, l’une des trois femmes que les élections du 9 août ont placées au premier plan de la contestation, avait été enlevée.

Elle se rendait à la poste pour y chercher une lettre de la « Justice » à propos de sa participation à une marche interdite, le 30 août. Entre le Musée National d’Art et l’Avenue de l’Indépendance, une jeune fille l’a reconnue. Maria marchait devant elle ; elle a voulu lui parler et la remercier de tout ce qu’elle avait déjà fait, si courageusement, depuis le 09 août – et auparavant déjà. Mais elle s’est ravisée, par discrétion.

Près du Musée, Anastasia a vu un minibus de couleur noire et de marque Sobol, portant un panneau « Communication ». Elle entend une sonnerie de portable et se retourne : elle voit des individus masqués qui poussent Maria Kalesnikava à l’intérieur du véhicule. Puis elle aperçoit un portable tomber sur la chaussée ; un individu descend du bus, le ramasse et remonte, puis la voiture démarre. A l’évidence, un portable comme celui de Maria doit être une source inestimable de renseignements pour des museaux renifleurs… Hier soir tard, on ne savait toujours pas où ils avaient disparu. Un autre membre très en vue du Conseil de Coordination, Anton Radnyankou, a disparu lui aussi, en cherchant la piste de Maria.

Maria Kalesnikava, 38 ans, est une flûtiste de stature et de renommée internationales, qui d’ailleurs a effectué une partie de ses études à Stuttgart. C’est une femme entreprenante, déterminée et dynamique. Cet enlèvement par on ne sait quel Rattenkönig de flicaillons de l’ombre jette une lumière aveuglante sur la fragilité du mouvement de protestation bélarusse : que fera-t-on une fois que la dizaine de personnes dirigeant plus ou moins le Conseil de Coordination (qui compte en tout quelques 70 membres) auront disparu, auront été enlevées, intimidées, maltraitées ou emprisonnées après quelque procès ou non ?

On observe dans ce mouvement une sorte de gentillesse, de fraîcheur qu’on ne saurait qualifier de naïveté – la pertinence et le discernement avec lesquels il a été conduit jusqu’à présent le démentent. Mais il faut prendre garde ; d’autant plus que les défilés du week end dernier (100 000 manifestants à Minsk !) ont laissé voir une nouvelle brutalité des forces de maintien de l’ ” ordre ” loukatchenkien dans plusieurs villes : à Minsk, mais aussi à Vitebsk, à Homiel, à Brest, à Hrodna (où la propagande accentue avec lourdeur sans cesse fait que e nombreux Polonais habitent la ville et ses alentours). De nombreux manifestants ont été arrêtées, bien davantage semble-t-il que lors du week end précédent.

Hier soir, des personnes faisant partie du Conseil sont allées porter plainte à la police de Minsk ; plainte acceptée. Et les policiers ont affirmé devant ces militants que la police de Minsk n’avait pas enlevé Maria Kalesnikava. Sans doute disaient-ils vrai : c’est probablement un autre corps de la police loukatchenkiste qui s’est emparé du Cœur Maria. Faut-il s’en réjouir ? Certainement pas.

Nous rendrons compte de tout ce que nous apprendrons ces prochains jours au sujet de la championne des Droits en Bélarus. Rendez leur, rendez nous Maria Kalesnikava.

 

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