Belarus : une Union de femmes contre le dictateur !

L’espérance monte à Minsk

Minsk et le bâtiment du KGB... Foto: Mikkaia/Wikimédia Comons/CC-BY-SA/PD

(Marc Chaudeur) – Pour la première fois depuis très longtemps, on peut entretenir quelque espoir de changement en Bélarus, à l’occasion des élections présidentielles qui auront lieu le 9 août prochain. Les citoyens ont perdu leur passivité, un vent nouveau souffle autour de Minsk. Et cela grâce à un trio de femmes : les épouses de candidats jetés en prison ou bâillonnés.

Tout au long des premiers mois de cette année, des manifestations d’une ampleur inédite ont donné un peu de vie à la capitale du Bélarus (ou Biélorussie, comme on disait autrefois), ce pays de 10 millions d’habitants sis entre Pologne et Russie. Cette République de glaciation et de somnambulisme civique se réveille. A preuve, les 55 candidats qui se sont présentés au départ contre Alexander Lukachenko, « le dernier dictateur d’Europe », comme le qualifient les médias et les dirigeants américains.Les citoyens bélarusses n’ont plus peur, soulignent les observateurs étrangers. Et les candidats qui se présentent ou se présentaient contre Lukachenko ont signé en masse les documents et pétitions de soutien des candidats opposants.

Trois femmes se sont unies pour essayer de contrer efficacement Lukachenko. Il s’agit des trois épouses de candidats auxquels, sous des prétextes divers, le dirigeant qui fait peser depuis 26 une chape de plomb sur le pays a interdit de se présenter, et/ou qui se trouvent actuellement en prison. Svetlana Tichanovskaia, 37 ans, monte sur l’estrade à la place de son mari, le bloggeur Sergei Tichanovski, en prison. Avec elle, Maria Kolesnikova, la compagne de l’ex-banquier Viktor Babariko, et Veronika Zepkalo, l’épouse de l’entrepreneur Valeri Zepkalo.

Dimanche dernier le 19 juillet, Svetlana Tichanovskaia a annoncé lors de la plus importante manifestation politique depuis très longtemps qu’en cas de victoire, elle ferait libérer tous les prisonniers politiques et organiserait de nouvelles élections. Elle a déclaré aussi qu’elle en appelait à une vie de liberté dans ce pays « où on n’enlèverait pas les gens dans la rue pour les jeter dans des cars de police, où on ne bouclerait pas les gens en prison pour des motifs fallacieux ».

Dans son cas, les  autorités bélarusses ont prétendu que son mari Sergei avait dissimulé 900 000 dollars dans un sofa. Et elle a reçu tout récemment des menaces qui lui expliquaient que si elle persistait à candidater, on lui enlèverait ses enfants ! Le grand banditisme en lieu et place de politique… Svetlana a donc fait exfiltrer ses enfants à l’étranger, en lieu sûr.

Alexander Lukachenko a réagi en déclarant devant les médias à sa botte qu’il respectait certes les femmes, mais que ” la société bélarusse n’était pas mûre pour être dirigée par une femme “. Et aussi que ” la pauvre petite chose (c’est-à-dire Svetlana Tichanovskaia) croulerait sous le poids d’une tâche comme celle de Président ” !

Svetlana se montre pourtant confiante, parce qu’elle est portée par un mouvement populaire qu’elle estime majoritaire. Et dont l’une des amorces est l’indignation ressentie à l’occasion de l’irresponsabilité présidentielle face à la COVID-19 : dans un style assez bolsonarien, le vieux dictateur avait demandé, devant les caméras de la TV présidentielle : ” Où est-il, ce virus ? Vous le voyez, vous ? ” Il avait aussi affirmé que la COVID était soluble dans la vodka, qu’il semble d’ailleurs consommer en grandes quantités. Enfin, il minimise sans cesse et systématiquement les chiffres des personnes contaminées.

Un candidat d’opposition, particulièrement Svetlana Tichanovskaia, pourrait-il avoir quelques chances sérieuses de l’emporter contre le vieux dirigeant, produit du communisme soviétique dont la police, à peine réformée après la Perestroika, s’appelle encore KGB ? Non, sans doute ; pas encore. Mais la conjoncture est inédite, très favorable. Et la troika Tichanovskaia-Zepkalo-Kolesnikova soulève l’enthousiasme, joue adroitement sur les sentiments et bénéficie d’un ressort affectif jamais vu depuis les années 1990, depuis l’accession au pouvoir de Lukachenko.

Mais hélas, rien ne dit que le vieux Président bélarusse n’aura pas recours à une répression violente, celle de sa police et de ses services secrets ; c’est ainsi que se passaient toutes les élections précédentes. Mais cette fois, les réactions de la foule risque d’être différente…

 

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