Claus Weselsky – le «Robin des Bois» des travailleurs allemands
Le patron du petit syndicat des conducteurs de trains GDL doit faire face à l’intox de la Deutsche Bahn - mais la nouvelle grève est vécue avec beaucoup de solidarité dans la population.
(KL) – La BILD-Zeitung a beau titrer «Et maintenant, il va nous pourrir le week-end de la Pentecôte», mais cette intox ne fonctionne plus très bien auprès des Allemands. Dans un conflit social qui oppose depuis six mois le syndicat GDL au géant Deutsche Bahn, le gouvernement et la grande entreprise d’état ont tout simplement trop menti – les gens commencent à s’en rendre compte. Même si les perturbations causées par cette nouvelle grève, la 9e en 6 mois, sont difficiles à porter.
Le GDL vient de lancer cette nouvelle grève à un moment peu opportun pour les voyageurs – vacances de Pentecôte, dernière journée en Bundesliga, et une grève qui sera encore plus longue que celle qui s’est terminée le 10 mai dernier et qui avait duré une semaine entière. Mais le GDL n’a pas le choix et il n’a aucune raison d’avaler les leurres que la Deutsche Bahn ne cesse de lui proposer de manière très médiatisée. Au contraire – le GDL est le dernier rempart face à une étonnante coalition entre le grand capital et une ministre du travail social-démocrate, Angela Nahles, qui fera voter ce vendredi au Bundestag, une nouvelle loi qui dans les faits, met un terme à 150 ans d’histoire du mouvement syndicaliste en Allemagne.
Cette nouvelle loi, tant attendue par la Deutsche Bahn, stipule qu’un seul syndicat négociera désormais les conventions sociales dans les entreprises – celle qui présente le plus grand nombre d’adhérents. Dans le cas de la Deutsche Bahn, il s’agit du EVG et non pas du GDL, ce qui veut dire qu’une adhésion au GDL (ou n’importe quel autre petit syndicat) sera désormais purement symbolique – les petits syndicats n’ayant plus le droit de négocier avec le patronat, ils perdent leur raison d’être.
Depuis le début des négociations, la Deutsche Bahn se limite à mener une bataille de communication, mobilisant un énorme service au QG Potsdamer Platz à Berlin, pour faire croire aux Allemands qu’elle est de bonne foi. Faux – les «propositions» qu’elle prétend avoir faites au GDL relèvent de la fausse information, les chiffres ne sont pas corrects, les sujets mis sur la table par le GDL ne sont même pas abordés. Ce qui n’empêche pas la Deutsche Bahn de communiquer à tort et à travers, désignant le GDL et son patron Claus Weselsky comme les responsables de cette nouvelle grève.
Mais force est de constater que cette grève se situe dans la légalité la plus absolue, comme les tribunaux l’ont déjà confirmé – après avoir perdu dans toutes les instances, la Deutsche Bahn a préféré se passer d’un appel auprès de la Cour Fédérale du Travail, sachant qu’elle n’a aucune chance d’y obtenir gain de cause.
Heureusement pour la Deutsche Bahn, elle a trouvé une alliée de taille en la personne de la ministre du travail Andrea Nahles (SPD). Après la vague de grèves du mois de novembre, la dernière a introduit cette proposition de loi qui tue l’ensemble des petits syndicats – une démarche lamentable pour un parti qui pendant des décennies a été le partenaire «naturel» du mouvement syndicaliste. Cette attaque sur le mouvement syndicaliste, risque de coûter cher au SPD aux prochaines élections…
Et puisque la Deutsche Bahn espère que cette loi soit votée ce vendredi, elle joue la montre en faisant semblant de multiplier ses propositions. Mais même sa proposition d’une médiation est malhonnête. Car la loi allemande stipule que lors d’une médiation, une grève doit être suspendue et on comprend Claus Weselsky qui dit «pourquoi devrais-je accepter une médiation ? Notre action est parfaitement légale – je ne vois pas ce qu‘une médiation sur des droits inscrits dans la Constitution pourrait nous apporter».
L’ambiance en Allemagne est en train de changer. Si, pendant les dernières grèves, l’intox de la Bahn avait prise, les gens se rendent comptent des vraies responsabilités de cette grève. Et au lieu de se mettre à détester Claus Weselsky, ils comprennent que c’est lui le dernier qui a le courage de se battre pour les droits de travailleurs.
Mais la Deutsche Bahn pourrait se tromper – la nouvelle loi n’entrera en vigueur qu’à condition de passer le cap de la Cour Constitutionnelle à Karlsruhe – non seulement, une procédure devant cette Cour pourrait durer très longtemps, mais de plus, de nombreux experts estiment que la Cour invalidera cette loi. Le Cour Fédérale du Travail avait déjà rendu un verdict en 2013, confirmant le droit de tout syndicat de négocier avec le patronat. Il est improbable que la Cour Constitutionnelle revienne sur ce verdict. En attendant, les Allemands s’arment de patience et choisissent des moyens de transport alternatifs. Car en vue du comportement de la Deutsche Bahn, il y a de fortes chances à ce que les Allemands ne prendront plus le train pendant une période assez longue…
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