La réaction allemande : «Terrorismus ? Verboten !»

Avec une nouvelle loi, l'Allemagne tente de dissuader des jeunes radicaux de voyager pour rejoindre des groupes terroristes comme l'EI. Un geste qui paraît déspéré.

Voyager pour se faire former dans des camps d'entraînements terroriste (comme ici en Afghanistan) est déjà passible de peines. A quoi servira la nouvelle loi allemande alors ? Foto: US Military / Wikimedia Commons / PD

(KL) – Le gouvernement allemand est en train de finaliser une nouvelle loi qui est censée stopper des jeunes radicaux qui veulent partir faire la guerre. Actuellement, on estime que 600 jeunes citoyens allemands sont partis en Syrie ou en Iraq pour combattre avec l’IS – selon la nouvelle loi, déjà le voyage «à but terroriste» constituerait un délit passible d’une peine. Assortie du retrait du passeport et de la carte d’identité. Mais dans la pratique, cette nouvelle loi sera difficile à appliquer. A moins que le terroristes déclarent vouloir partir pour rejoindre un groupe terroriste. Ce qui est quand même assez peu probable.

On comprend que les états veulent et doivent réagir après des attentats comme ceux commis à Paris. Mais dans la nouvelle proposition de loi allemande (qui sera adoptée dans difficulté en vue de la majorité CDU/SPD au Bundestag) démontre surtout une chose : l’impuissance du législateur face au terrorisme. Car concrètement, cette nouvelle loi risque d’être aussi efficace que des pancartes dans les gares disant «Attentats terroristes interdits». Comment prouver à un jeune qu’il voyage dans un but terroriste, et non pas comme touriste ou pour d’autres affaires ?

Le ministre de la justice Heiko Maas est optimiste, en estimant que les autorités obtiendront les informations nécessaires pour établir si un voyage est effectué dans un but terroriste, «par les familles». S’il est vrai que dans quelques rares cas, des parents inquiéts avaient contacté les autorités craignant que leurs enfants puissent partir en guerre. Un cas de figure concernant surtout des mineurs. Mais quid des autres ? Difficile d’imaginer des jeunes radicaux se présentant au guichet de l’aéroport en tenue de combat, avec un billet aller-simple pour Bagdad. Quid d’un jeune musulman qui veut se rendre en Turquie ? La Turquie étant une station sur la route vers l’Etat Islamique – est ce qu’un voyage d’été sur la côte turque sera déjà interdit ? Pire – est-ce que cette nouvelle loi ne constitue pas déjà une discrimination de tout jeune musulman souhaitant voyager ? L’opposition verte au Bundestag se pose déjà la question si cette nouvelle loi puisse être conforme avec la constitution allemande.

Autre question – puisque les autorités veulent «obtenir des informations sur la nature des voyages par le biais des familles» – qui sera en charge de ces enquêtes ? Et comment se dérouleraient-ils ? Avec quel personnel ? Avec quels moyens et méthodes ?

Pourtant, la loi allemande punit déjà depuis 2009 «la préparation d’actes violents mettant en péril d’état», interdisant autant la publication de mode d’emplois pour la construction de bombes ou la visite de camps d’entraînement terroristes. Mais déjà cette loi est difficile à appliquer dans la pratique. Une extension de cette loi, comme maintenant prévu, ne facilitera pas vraiment le travail des autorités, mais place l’ensemble de la population issue de l’immigration sous une suspicion générale. Ce qui n’est pas vraiment de nature à dissuader les jeunes de la radicalisation.

Pourtant – on voit actuellement que d’autres approches sont possible. Comme l’initiative «Ouvrons-la !» de la ville de Strasbourg qui se penche sur les racines du malaise dans la société et qui tente d’associer les différentes communautés à une démarche commune. Ce qui est largement plus constructif que cette réaction allemande. Qui ne risque pas de dissuader des jeunes qui sont déjà passés par une phase de radicalisation, de partir faire la guerre.

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