Fanatisme : Quand le port de la Kippa devient dangereux

Tous les voyants d’alarme devraient virer au rouge. Le Président du Conseil Central de la communauté juive en Allemagne a mis en garde les Juifs allemands de porter la Kippa.

Lorsque le port de la Kippa devient dangereux, c'est que des évolutions de la société sont allés beaucoup trop loin. Foto: John MacDonald / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 2.0

(KL) – Le Président du Conseil Central de la communauté juive en Allemagne Joseph Schuster et le Président du Conseil Central de la communauté musulmane en Allemagne, Aiman Mayzek, sont d’accord – dans certaines villes et dans certains quartiers en Allemagne, il est déconseillé aux Juifs de porter la Kippa, le couvre-chef traditionnel des Juifs. Force est de constater que le climat dans les sociétés en Europe est en train de céder à la violence et à la haine. Le courage civique est désormais de mise – nous n’avons pas le droit de nous incliner devant ceux qui sont en train d’installer la peur et la violence.
«Le port de la Kippa peut causer des problèmes en Allemagne», a déclaré Joseph Schuster, «dans des quartiers aux fort pourcentage d‘une population musulmane, les Juifs doivent se poser la question si c‘est bien raisonnable de s‘identifier par le couvre-chef religieux». Son homologue musulman, Aiman Mayzek, a confirmé cette vue sur les choses. «Ces craintes sont justifiées», a-t-il commenté, tout en soulignant qu‘il condamne, «au nom du Conseil Central des Musulmans», toute attaque sur des concitoyens de croyance juive.

Comme en France, ces derniers temps, les attaques antisémites se sont multipliées en Allemagne. Dans certains quartiers, surtout à Berlin, des juifs avaient été victimes d‘attaques violentes. Ce problème concerne autant le Conseil Central des Juifs que celui des Musulmans et Aiman Mayzek s‘est dépêché de souligner qu‘il ne fallait pas faire l‘amalgame entre les «quartiers dits à problème» et «l‘islamisme». A une époque où un mouvement comme la «Pegida» a pu voir le jour, la communauté musulmane a intérêt à éviter tout ce qui pourrait ressembler même de loin à une «islamisation de l‘Occident».

Toutefois, il faut rester réaliste. L‘antisémitisme connait une renaissance en Europe, un indicateur que les temps sont durs. Depuis des millénaires, les sociétés se cherchent des boucs-émissaires par temps de crise et depuis toujours, les Juifs se trouvent en ligne de mire. Mais qu‘est-ce que deviennent nos sociétés aujourd‘hui, si cette haine de l‘Autre se fraye à nouveau un chemin dans la rue ? A quel niveau est-ce que la société est en défaillance ? Dans les écoles ? Dans les familles ? Dans les perspectives qui manquent aux jeunes ?

Les religions jouent un rôle beaucoup trop important aujourd‘hui. Les conflits religieux n‘ont pas de place en Europe. Mais les réalités, que ce soit en France ou en Allemagne, parlent une autre langue. Il s’agit d’un problème qui concerne tout le monde – il serait trop facile de pointer les écoles du doigt, pendant que les familles continuent à cultiver cette haine. Si, après les attentats de Paris, des gamins de 8 ans ont refusé de participer à la minute de silence en hommage aux victimes, en déclarant «qu‘ils aient eu ce qu‘ils méritent», on peut partir du principe que ces gamins n’aient pas trouvé cela tout seul – ils ont déjà été endoctrinés par les familles. Ce qui est autant valable pour les familles musulmanes que chrétiennes. La première mesure, facile à prendre par tout un chacun, est l’abolition d’un vocabulaire discriminatoire et ce, autant pour nos concitoyens juifs que musulmans. Lorsque les enfants entendent parler de «sales bougnouls» ou de «sales juifs» à la maison, il est peu étonnant qu’ils grandissent avec cette pensée que «les autres» valent moins qu’eux-mêmes.

Il faut que nous assignons sa juste place aux croyances religieuses dans nos sociétés. Si tout un chacun est libre de croire en ce qu’il veut, il faut que cette croyance religieuse redevienne une affaire personnelle et privée et non pas une affaire politique. Le laïcisme est une des conditions de base pour ne pas surévaluer cette spiritualité. Mais force est de constater que nous sommes déjà allés beaucoup trop loin. Donc, il faut non seulement lancer un travail éducatif, mais aussi une réflexion quant à la réaction des autorités face à la montée de la violence religieuse.

Si aujourd’hui, les responsables des communautés religieuses estiment qu’il est dangereux de porter la Kippa, c’est que nous avons déjà dépassé les bornes et ce, de très loin. Réveillons-nous et ne détournons pas le regard lorsque nous sommes témoins d’insultes racistes, de provocations, d’agression sur autrui. On ne peut plus fermer les yeux devant de tels phénomènes. L’extrémisme, qu’il s’agit d’extrémisme musulman, juif, chrétien ou autre, doit être combattu par toutes les forces de la société. Maintenant.

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