Comment Erdogan soutient Annegret Kramp-Karrenbauer

A quelques jours des élections régionales en Sarre, c’est le président-dictateur turc Recep Tayyip Erdogan qui vient soutenir la ministre-présidente de la Sarre. Sans même se déplacer.

Annegret Kramp-Karrenbauer interdit des meeting qui n'avaient pas été prévus... Foto: Jakob Gottfried / Wikimedia Commons / CC-BY-SA 3.0

(KL) – La Sarre est un petit Land. Un peu moins d’un millions d’habitants, la Sarre a été transformée par sa ministre-présidente Annegret Kramp-Karrenbauer en une « porte de France », conformément à la « Stratégie France » que Kramp-Karrenbauer a lancé avec succès. Et malgré son bilan excellent, Annegret Kramp-Karrenbauer doit craindre pour sa réélection le 26 mars prochain. Son parti, la CDU, souffre à la fois de la mauvaise image d’Angela Merkel et de « l’effet Schulz » qui fait que le SPD ait maintenant le vent en poupe. Et puisque les sujets de la politique sarroise ne semblent pas suffire pour que la ministre-présidente sortante puisse envisager ces élections sereinement (les sondages pronostiquent actuellement un résultat assez serré), Annegret Kramp-Karrenbauer entre dans la politique internationale. En interdisant toute intervention publique de responsables politiques turcs en Sarre. Même si aucune intervention de ce type n’a été prévue…

Les réactions européennes quant à l’armada de membres du gouvernement Erdogan qui sillonnent un peu partout en Europe pour convaincre leurs compatriotes de voter « oui » au « Ermächtigungsgesetz » d’Erdogan, sont virulentes, ce qui permet à Erdogan de rassembler son peuple derrière lui dans une lutte contre le présumé « fascisme européen ». Mais la même stratégie fonctionne aussi dans l’autre sens. Ainsi, l’interdiction de toute intervention de politiques turques en Sarre, est vécue en Allemagne, comme un geste politique courageux et important de la part d’Annegret Kramp-Karrenbauer, qui en peu de temps, se positionne pour la deuxième fois à l’opposition de son propre parti, la CDU, affichant ainsi une grande indépendance politique. Les Sarrois apprécieront.

Seulement, aucune intervention d’un responsable politique turc n’était prévue en Sarre. Il s’agit donc d’une décision préventive, au cas où Recep Tayyip Erdogan aurait l’idée d’envoyer un ministre de son gouvernement à Völklingen, Neunkirchen ou encore Saarlouis. S’il y a des chances à ce que le président-dictateur Erdogan ignore jusqu’à l’existence de ces petite villes sarroises, il pourra jouer une partie de ping-pong avec Annegret Kramp-Karrenbauer et ce, sans le moindre effort de part et d’autre.

Erdogan pourrait maintenant insulter Annegret Kramp-Karrenbauer de « nazie » et Kramp-Karrenbauer pourrait déclarer Erdogan « persona non grata » en Sarre. Personne n’aurait à se déplacer et ce type d’échange pourrait être mené jusqu’aux élections en Sarre et jusqu’au référendum en Turquie. Magnifique. La communication politique à l’état pur.

Si effectivement, des meetings de propagande turque avaient été prévus en Sarre, la décision de Kramp-Karrenbauer aurait été courageuse. Mais là, il ne s’agit que de la communication, d’un geste gratuit, qui sert seulement deux personnes – Erdogan et Kramp-Karrenbauer. On vit une drôle d’époque où on regarde avec stupeur que des gens aussi opposées qu’Erdogan et Kramp-Karrenbauer se découvrent des intérêts communs. Mais bon, au moins on sait que désormais et pour les 11 jours à venir, il n’y aura pas de visite officielle turque du côté de la Goldene Bremm. Rassurant.

Kommentar hinterlassen

E-Mail Adresse wird nicht veröffentlicht.

*



Copyright © Eurojournaliste