Des présidentielles, un conte d’Andersen et des élections !

Alain Howiller commente les élections et les élections primaires en France…

Les élections et élections primaires ne donnent pas vraiment la voix au peuple... Foto: Rama / Wikimedia Commons / CC-SA 2.0fr

(Par Alain Howiller) – Décidément, cette campagne électorale française s’annonce déprimante : une mauvaise télé-réalité qui s’impose à coups de petites phrases, de manœuvres sordides et de petites combines qui veulent faire croire que le citoyen décidera enfin de son sort alors que grâce aux primaires, de gauche comme de droite, ce sont les partis qui ont repris les choses en main. Le moindre des paradoxes n’est pas que cela se passe au vu et au su de tout le monde, au nom d’une constitution de la Vème République qui, depuis 1958, a été modifiée plus d’une vingtaine de fois et au nom du général de Gaulle (!) dont l’ambition avait été, depuis toujours, de mettre son pays à l’abri du jeu des partis.

En suivant les manifestations des policiers (gare lorsque un gouvernement perd le soutien de ses forces de l’ordre !), je n’ai pas pu m’empêcher de penser que la dégradation de la situation, le délitement du pouvoir font de plus en plus penser à la période 1957/1958 qui actera la fin de la IVème République et la naissance de la Vème !… Du reste, tant que nous y sommes, l’armoire aux souvenirs me glisse que la montée d’un Emmanuel Macron a connu un précédent : la chevauchée fantastique d’un éphémère Ministre et exceptionnel homme de presse qui s’appelait Jean Jacques Servan-Schreiber ! On dit que l’Histoire ne repasse jamais deux fois les plats et qu’il n’y a guère que Jean Luc Mélenchon, Arnaud Montebourg et le Front National qui -en l’état- veulent changer de République : finalement, la majorité de nos hommes politiques sont d’accord pour tout changer… sans rien changer !

Une copie de Stéphane Hessel ? – C’est un peu court au moment où selon un sondage seuls… 5% des Français font confiance aux partis politiques et qu’en quarante ans l’abstention aux élections a progressé en moyenne… 20 points ! Une abstention qui, pour reprendre les propos de François Hollande lors du colloque sur la démocratie organisé le 6 Octobre, « n’est pas un silence, mais un bruit assourdissant entendu lors de chaque élection intermédiaire ! » Et l’orateur de préciser : « J’ai eu conscience que notre pays disposait d’un outil institutionnel dont il serait périlleux de vouloir se priver ! » Jamais, sans doute la crise démocratique n’a été aussi profonde : mais, hormis un peu de dépoussiérage, le changement ce ne sera pas… maintenant !

« Tous pareils, tous complices, tous incapables de changer réellement les choses, tous inefficaces et pourtant hautains », c’est ainsi que Bruno Lemaire décrivait le personnel politique dans « Ne vous résignez pas » (Editions Albin Michel). Une formule qui était une autre façon de reprendre le propos de Stéphane Hessel et son fameux « Indignez-vous ! » Ce que Emmanuel Macron traduisait, à travers sa sensibilité par : « Il faut sortir d’un espace technocratique qui ne parle plus à personne ! » Les débats organisés, en deux tours (20 et 27 Novembre) à droite et au centre et en Janvier à gauche (en principe les 22 et 29) délivreront-ils aux citoyens les codes indispensables pour effacer la fâcheuse impression que le Front National s’accapare la critique et la modernisation de « l’ancien régime » ?

Non, non : le livre n’est pas mort !… – Dans cette compétition, quelles places auront François Hollande et Nicolas Sarkozy ? Le second peine apparemment à sortir de la tête de l’eau, après les vannes qu’ont ouvertes les révélations de son ancien conseiller politique Patrick Buisson dans son livre « La cause du peuple » (Editions Perrin). Face aux révélations de celui qu’on a déjà appelé « le Valérie Trierweiler de droite », Sarkozy appelé le peuple au secours en essayant de « mobiliser la majorité silencieuse de la France d’en bas ». François Hollande a, quant à lui, subi l’impact de ce qu’on pourrait appeler le tome 2 du livre de son ancienne compagne, auteure de « Merci pour ce moment » (Les Arènes-Editeur) avec la sortie de « Un président ne devrait pas dire ça. Les secrets d’un quinquennat » des journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme (Editions Stock).

Deux livres, l’un sur « l’hyper-président », l’autre sur le « président normal » dont les effets ravageurs démontrent à l’envi que le « livre écrit » n’est pas mort : il s’achète et se lit encore ! L’ouvrage de Davet et Lhomme arrive au plus mauvais moment alors que le Président avait peaufiné avec ses collaborateurs, les axes de sa campagne présidentielle qui changeait de registre : oubliée la courbe du chômage qui devait s’inverser de manière significative !… Bienvenue donc aux…. nouveaux axes : la bataille pour protéger et sauver les institutions et la démocratie, menacées par la droite qui veut revenir et l’extrême droite qui veut se saisir du pouvoir ! Bon, le thème avait un peu un côté de « déjà vu », mais il reposait sur un vrai axe de gauche !

Sauvera-t-on le « soldat Hollande » ? – Suffira-t-il pour sauver le « soldat Hollande », lui qui disait : « Je ne ferai pas le choix d’une candidature, si elle ne pouvait pas se traduire par une perspective de victoire (extrait de « Un président ne devrait pas dire ça !… ») ou « Je ne serai pas candidat pour perdre ! » Pourtant les propos rapportés par Davet et Lhomme ont des allures de « compilation suicidaire », comme l’écrivait La Vangardia, le journal de Barcelone !

Après la parution du livre de Valérie Trierweiler, j’avais publié ici même (eurojournalist.eu du 10 Septembre 2014) un article intitulé : « François Hollande dans l’empereur est nu…. » J’avais, alors, des doutes : n’avais-je pas été trop dur en comparant le président français à cet empereur du conte de Hans Christian Andersen ? Ce conte intitulé « Les Habits neufs de l’Empereur » raconte l’histoire d’un monarque tombé sous la coupe de deux escrocs. Ces derniers s’engagent à lui tisser un habit tissé dans une toile magique qui avait une particularité : les imbéciles ne pouvaient pas la voir ! Persuadé que ses sujets n’étaient pas des imbéciles, l’empereur commanda un costume taillé dans cette toile magique.

Quand « l’empereur est nu » ! – Les escrocs firent semblant de la tisser, avant d’en revêtir leur auguste client. L’empereur se mit à parader dans les rues. Pourtant, il ne comprenait pas pourquoi, à son passage, ses sujets -y compris ses proches- étouffaient un rire. Il comprit le jour où un jeune garçon, innocent, lui lança après l’avoir regardé : « Mais l’empereur n’a pas de costume, il est nu ! »

Deux livres viennent de lui tailler un costume sur mesure : quelle leçon le Président -et les citoyens- tireront-ils de cette mésaventure ?

Tout nous dit que le président aura de la peine à s’accaparer le slogan de Michèle Obama lançant, face à Donald Trump : « Quand ils s’abaissent, nous nous élevons. »

A vrai dire, je n’ai pas, hélas, le sentiment qu’il sera seul dans ce cas de figure !

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