Elections en Pologne : le grand partage ?

Atteinte aux libertés contre libéralisme débridé

Le retour de Napoléon à Gdansk Foto: Starscream / Wikimédia Commons / CC-BY-SA 3.0Unp

(MC) – Dimanche dernier, les Polonais se sont déplacés pour élire leurs représentant régionaux à la tête des 16 voïvodies, et les maires à la tête de leurs villes. Ce qu’on craignait n’est pas arrivé : certes, le parti populiste au pouvoir, le PiS (Droit et Justice) arrive en tête avec 33 % des suffrages ; mais il échoue à remporter les grandes villes du pays, que conserve la Plateforme Civique (PO pour Platforma Obywatelska). Faut-il s’en réjouir ?

La Pologne, pays important (nous le répétons sans cesse avec une certaine obstination…) de 38 millions et demi d’habitants, est très divisée et même, polarisée entre conservateurs et partisans du progrès. Du moins d’un certain progrès, celui d’une exploitation libérale accrue. Quant à la gauche, elle n’existe brillamment pas : les sociaux-démocrates semblent avoir élu domicile sous terre, comme les trolls. Parfois, on voit leurs oreilles dépasser. Les Polonais votaient peu, ces dernières années ; mais pour ces dernières élections, la participation a été raisonnable (54%).

33 %, c’est un bon score, mais cela ne constitue pas une majorité. Et le parti arrivé troisième derrière la PO, c’est le vieux PSL (Parti paysan/populaire polonais), avec 17 % des suffrages. Or, le PSL refuse catégoriquement de s’allier avec le PiS. Pour cette raison et d’autres, le PiS n’est majoritaire que dans 2 voïvodies : en Basses-Carpates (autour de Rzeszów, au Sud Est du pays) et en Petite Pologne autour de Cracovie, juste à côté de la précédente.

La droite libérale de la PO a conservé les grandes villes. Dans la capitale, Varsovie, le candidat de la Plateforme, Rafał Trzaskowski, l’a emporté brillamment, avec 54 des votes, contre son adversaire tenace du PiS, Patryk Jaki, qui avait mené une campagne très pugnace dans les différents quartiers. Ailleurs, à Katowice, Poznań, Wrocław et Łódź, la PO l’a emporté dès les premier tour. Soulagement pour beaucoup de Polonais, donc : ces métropoles ne passeront pas aux mains des nationalistes-populistes.

Reste cependant Gdańsk, la 6ème ville du pays, dont on connaît l’importance politique. Là, un hic bien fâcheux pour la Plateforme : deux candidats PO se sont affrontés et ont donc affaibli les chances de la formation… Un choix peu clairvoyant pour la PO : Paweł Adamowicz, maire depuis 1997, a refusé de s’effacer devant la candidature imposée par la Plateforme, celle de… Jarosław Wałęsa, qui n’est autre que le fils du célébrissime héros fondateur de la Pologne actuelle.

Mais le jeune homme n’a recueilli que 25 % des suffrages, tandis que son « rival » de la PO, Adamowicz, a remporté un brillant succès avec 36 % ! Face à eux, le candidat de PiS, Kacper Płażyński, a « fait » 32 %. Cet homme bénéficie d’un certain prestige, parce qu’il est le fils de l’un des fondateurs… de la Plateforme, et que son père est mort lors de ce crash au-dessus de Smolensk (!) qui a fait d’un avion le sépulcre de toute une partie de la classe politique polonaise, le 10 avril 2010. Rendez-vous est donc donné le 4 novembre aux électeurs de Gdańsk, en tout cas, pour le 2ème tour. Adamowicz devrait l’emporter triomphalement : en effet, il bénéficiera du soutien de Jarosław Wałęsa et de celui de la gauche, qui pour l’occasion, pointera ses oreilles de trolls (à savoir l’Alliance de la Gauche Démocratique SLD, le Parti des Femmes et l’association Meilleur Gdansk, Lepszy Gdansk).

L’enjeu de ces élections régionales et municipales est essentiel et spectaculaire, sans doute. Mais ne nous aveuglons pas, nous, Européens de l’Ouest : il s’agit en réalité d’une lutte entre un populisme autoritaire qui supprime ou escamote progressivement les libertés, mais qui jouit d’une grande sympathie auprès de la population à cause de ses mesures sociales (soutien aux familles surtout) et un libéralisme qui lui, n’a pas réellement cette fibre. La liberté ou le pain ? Les choses ne se présentent pas en termes aussi schématiques. Mais ils s’en approchent beaucoup. Et nous attendons le réveil de la gauche. Impossible ? Rien n’est impossible dans un pays tel que la Pologne.

 

 

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