Elections européennes de mai 2019

Un drame dont la conclusion doit être reconstruction.

Guêpier d'Europe : c'est le nom de cet oiseau... Foto: El Golli Mohammed / Wikimédia Commons / CC-BY-SA 4.0Int

(MC) – Les prochaines élections européennes seront très singulières, et cela pour plusieurs raisons. Jamais l’Union Européenne, même depuis l‘Europe des Six, n’a été à ce point menacée : par les circonstances extérieures, mais plus encore, par des attaques qui proviennent de son sein même. Le danger est réel, profond, et imminent. Reste à considérer les multiples éléments positifs qui composent l’Europe telle que nous la connaissons actuellement et ses immenses apports, présents ou à venir, pour tous les Etats qui la composent. Non, nous ne voulons pas de Frexit, ni de Dexit, ni d’Italexit, etc !

La guignolerie grimaçante et cruelle qui se déroule à Londres devant nos yeux est pour nous le meilleur des exemples. Pour aucun des 28 Etats membres – bientôt peut-être 27, mais ce n’est pas sûr -, la sortie de l’Union ne représenterait un événement heureux et prometteur. La façon très péjorative et très virulente dont plusieurs courants idéologiques considèrent l’Union peut s’expliquer par plusieurs facteurs ou raisons. Fondamentalement, elle peut l’être par la perspective ultra-capitaliste, libérale, qu’on a mis en œuvre depuis la fin des années 1990 au moins ; le parcours de l’Union aurait pu se passer sous les auspices d’une social-démocratie tempérée, par exemple.

On objectera que précisément, ce que fait l’Union est largement ce que votent les électeurs… Mais le malheur est que les choses sont décidément plus complexes, et surtout, moins claires : le dramatique hiatus entre les délibérations et les décisions qui se tiennent et se prennent dans les institutions européennes tient largement au caractère non démocratique de la Commission Européenne : un problème de structures, donc, sur lequel il faudra impérativement revenir et auquel il faudra proposer des solutions.

Plus factuellement, certaines tendances et certains événements rendront difficile de persuader les citoyens européens à se rendre aux urnes et à faire leur choix en toute connaissance de cause. Et pourtant, il le faut absolument ; il faut se donner les moyens de choisir.

Entre les précédentes élections européennes et celle à venir du joli mois de mai, il semble parfois que tout tende à se précipiter dans un gouffre imprévisible. Au fond, la raison principale en est bien évidemment l’accélération de la globalisation dans l’économie mondiale, dans laquelle l’UE joue à la fois le rôle de l’un des acteurs principaux et celui d’un ralentisseur. Elle est aussi, comme on sait, l’un des boucs émissaires idéal à la fois pour des pays qui ont largement profité de ses prébendes, au point de transformer complètement leurs structures économiques (la Hongrie et la Pologne, notamment), et de pays riches dès les années 1960, mais trop dispendieux,mauvais gestionnaires ou plus royalistes que le roi, c’est-à-dire plus libéraux que l’UE…

Le sentiment que l’UE fait passer autoritairement la globalisation et une libéralisation absolue de l’économie a fait que se sont installés des gouvernements nationalistes et populistes. Dès 2014, le Fidesz de Viktor Orbán a emporté les élections, et a imposé une politique autoritaire qui se voulait protectionniste, anti-immigration extra européenne, « illibérale » (Orbán en effet a repris ce mot forgé vers 2000 à Rosanvallon et à Balibar!). Rappelons qu’il signifiait, initialement, non libéral au sens de : non généreux, donc radin, fesse-mathieu, étroit, fermé…

Dès 2015, le dirigeant hongrois a commencé à élever un mur de protection contre les migrants, et ses femmes-journalistes s’essayaient à des plaquages sur des moustachus de 60 ans qui fuyaient la guerre et la misère de leur pays. Puis, toujours en 2015,ç’a été l’installation du PiS (Droit et Justice) en Pologne. En 2017, Sebastian Kurz leur a succédé en Autriche, puis, en 2018, d’improbables Laurel et Hardy tristes au programme contradictoire en Italie.

Les « peuples » y ont-ils trouvé leur compte ? Refusons nous à pratiquer la prospective à ce sujet et bornons-nous à constater la gravité des mouvement sociaux actuels, et depuis quelques 2 mois, dans la Hongrie du Fidesz : elle est pour nous une réponse suffisante. Les tendances protectionnistes, voire isolationnistes ont été mises à mal pour diverses raisons économiques et essentiellement, pour leur non pertinence et leur inefficacité.Et le gouvernement s’est vu dans la nécessité d’appliquer des mesures… libérales. Résultat : des manifestations massives dans toutes les villes du pays, un protestation qui ne faiblit pas depuis le mois de décembre dernier. Dans les autres Etats que régissent des partis nationaux-populistes, les sujets de mécontentement ne manquent assurément pas, et sont des germes d’une contestation à venir.

Mais pour un certain nombre d’auteurs, lesdits partis populistes sont à même de gagner un nombre très considérable de sièges en mai prochain. Des troupes qui misent sur la démagogie, la recette-miracle, et dont tous ceux qui occupent le pouvoir sont peu ou prou corrompus. Ces partis, qui tentent et tenteront de détruire l’UE de l’intérieur même des institutions, représentent un danger majeur. Première raison pour aller voter.

L’une des raisons politiques pour lesquelles le populisme, ça marche, c’est l’impression très répandue que là-haut, ils s’entendent tous très bien ensemble, les riches, les nantis, l’élite mondialisée. Et il est vrai que la commission Juncker a occupé pendant 5 années le pouvoir, assis par le groupement de droite PPE, avec l’accord du PSE (Parti Socialiste Européen) et l’ALDE, qu’on peut qualifier de centriste… Un pour tous, tous pourris ? Rappelons que cette impression, à notre sens, trouve surtout son origine dans l’absence grave de transparence de la Commission, et aussi, dans la mauvaise qualité de sa communication externe. Faut-il alors supprimer la Commission et rabattre le fonctionnement de l’UE sur le seul Parlement ? Peut-être ? A discuter, en tout cas.

Deuxième impératif absolu : le Parlement Européen doit devenir l’institution d’où part une véritable proposition politique, la construction d’un projet de justice sociale bien articulé, pertinent et explicite. Pour nous, cela signifie que les partis de gauche doivent jouer pleinement leur rôle. La gauche radicale, c’est à dire le groupe GUE/NGL (51 sièges) ? Elle pêche à notre sens par son utopisme congénital, malgré des éléments très performants. La gauche modérée, elle (189 sièges),et donc le groupe Socialistes et Démocrates, doivent jouer pleinement son rôle ! On objectera que la gauche française n’a pas même encore de candidat, 4 mois avant le scrutin. La gauche allemande, elle, en a une, et c’est un motif d’espoir : il s’agit de Katarina Barley, l’actuelle ministre de la Justice SPD ; une personnalité remarquable, plutôt jeune et porteuse d’espoir. Certes, le candidat à la présidence de la Commission, ce sera le vénérable Frans Timmermans – député néerlandais du Parti Travailliste et Premier vice-président de la Commission – ce qui est moins exaltant…

En tout cas, la ferme volonté d’empêcher la victoire de la démagogie et de la confusion populistes, et celle d’opérer un retour à un programme bien articulé de justice sociale sont les deux mamelles du scrutin. Pour ces deux raisons essentielles, nous irons voter pour consolider l’Europe !

 

 

 

 

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